© Rodolphe Haustraete

Théâtre : "Farhenheit 451" au TNP, une dystopie aux résonances contemporaines

Mathieu Coblentz et la compagnie du Théâtre Amer propose une mise en scène de Fahrenheit 451, de Ray Bradbury au TNP de Villeurbanne. Une adaptation libre et poétique d’un roman qui nous rappelle que la littérature est l’un des derniers sanctuaires de liberté et de résistance.

"Nous entreprenons de dire le roman, simplement, rageusement, joyeusement. Dire avec les mots d'une fable dystopique, dans un monde saturé d'images, d'urgences et d'injonctions, la puissance de l'imagination". C'est avec ces intentions que le metteur en scène Mathieu Coblentz et les comédiens de la compagnie du Théâtre Amer, se sont emparé du grand classique de la littérature d’anticipation, Fahrenheit 451, écrit par Ray Bradbury en 1953.

Cette dystopie, suit le personnage de Montag, un pompier en charge de détruire par le feu tous les livres, considérés comme subversifs.

Persuadé d’œuvrer pour le bien collectif d’une société, heureuse de son ignorance, il prend petit à petit conscience de l’aliénation de l’humanité provoquée par la disparition de ces ouvrages, et s’y oppose. Il s’enfuit et rencontre d’autres résistants – les Hommes-livres - qui apprennent ces œuvres par cœur afin de pouvoir les transmettre aux générations futures.


Laisser libre cours à l’imaginaire, avec "la liberté de changer de regard"


De ce texte, ils n’en ont pas tout retenu. Juste la substance. Pour faire "naître le théâtre" de ce roman, les sept comédiens et musiciens de la compagnie du Théâtre Amer ont puisé dans la matière qui leur était offerte dans ce roman sombre, pour proposer un spectacle vivant et "dire la joie face à la résilience possible d’une humanité éclairée par les livres".

© Rodolphe Haustraete

Ils chantent, jouent de la musique "accoucheuse d’émotion" dans un décor calciné, utilisant du matériel d’enregistrement radio qui évoque des cachettes de résistants ou des abris pendant la guerre. La chaleur de la trompette renvoie, quant à elle, à l’univers du polar américain cher à Bradbury.

Ce dispositif scénique est très convaincant. Il reste sommaire et intemporel – loin de l’idée futuriste du roman qu’on peut se faire – afin de laisser libre cours à l’imaginaire, avec "la liberté de changer de regard" en s’appuyant sur la puissance des mots et du jeu.


"Entrer en dialogue avec les auteurs du passé"


Ainsi, chaque comédien s’empare à la fois des dialogues de son personnage et du récit de Bradbury. Il joue et raconte son rôle dans le même temps, l’incarne tout en le maintenant à distance, pour mieux l’observer.

C’est ainsi qu’il devient à son tour, un Homme-livre, passeur de la connaissance. Un jeu dans le jeu, une mise en abyme, pour affirmer "la nécessité pour chaque génération de se réapproprier les savoirs pour entrer en dialogue avec les auteurs du passé".

À l'heure des médias de l'entertainement, des réseaux sociaux inondés de fake news ou des chroniques télé à l'emporte-pièce, qui relèguent la connaissance, la complexité, la lenteur, la patience ou même le répit – corollaires de la lecture - à des valeurs antédiluviennes, on ne peut que saluer le choix de Mathieu Coblentz de convoquer l'œuvre du romancier américain qui constitue un véritable plaidoyer pour la littérature.

Et son spectacle sème cette idée-là de la plus belle des manières, telles ces pages de livres qui s'envolent pour atterrir dans le public afin de transmettre ces œuvres indéfiniment.


Farhenheit 451, au TNP de Villeurbanne - Du 21 au 25 septembre 2021 - www.tnp-villeurbanne.com


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