Fort des très bons chiffres de fréquentation de la saison qui se clôture, Michel Belletante a concocté un programme prometteur pour le théâtre de Vienne qu’il dirige. Comme à son habitude, ses choix sont éclectiques, puisant à la fois dans le répertoire et la création contemporaine. Une programmation vivante et réjouissante mais aussi portée par les interrogations plus sombres de notre époque.
“Le théâtre doit conserver son rôle dans l’éducation culturelle et populaire”. Conforté par la saison passée qui a établi un record dans l’histoire du théâtre à l’italienne de Vienne – avec 20 000 spectateurs et un taux de remplissage de 87 % – Michel Belletante tentera à nouveau de s’adresser à tous les publics, et surtout, à toutes les générations.
C’est donc avec un spectacle à voir en famille que démarre la saison. Avec La fille de l’eau (12 octobre), le metteur en scène Laurent Brethome propose une création librement inspirée d’un conte peu connu des frères Grimm, L’Ondine de l’étang, portant sur la quête initiatique d’une jeune fille, fruit d’un pacte diabolique entre la nature et les hommes.
Autre création très attendue, celle de Gaëlle Bourgeois, artiste associée du théâtre, qui présentera début 2025 Trois minutes de temps additionnel (21 janvier), un spectacle qui fait l’objet d’une résidence artistique et d’ateliers avec des collégiens. Un récit sur le destin cruel de deux adolescents guinéens recrutés par un club de football anglais, dont l’existence va basculer. Un thème sur l’avidité, l’exploitation et le déracinement qui touchera le jeune public, lequel pourra également assister à une ultime représentation de la pièce sur un véritable terrain de football à Crolles en Isère.
Également destiné au public familial, Tristan et Yseult de Julien Gauthier (19 mars), Rien ? de la compagnie Monsieur K (29 mars), ou encore Vole, Eddie, vole(31 janvier), l'histoire d’un Anglais qui nourrit le rêve fou de participer aux Jeux Olympiques d’hiver en saut à ski.
Mais à Vienne, le théâtre du répertoire garde toujours une place de choix – on connaît l’amour de Michel Belletante pour les classiques revisités… C’est le cas avec Fantasio (19 novembre) de Musset, véritable chassé-croisé amoureux digne des Caprices de Marianne, et dont une version quelque peu rock sera présentée le 19 novembre.
Autre texte emblématique, La Cantatrice chauve (20 février) d’Eugène Ionesco, livrée dans une version datant de 1957, toujours jouée au théâtre de la Huchette à Paris. Une pièce “dans son jus” qui détient le record du monde du nombre de représentations – plus de 20 000 – et trois millions de spectateurs dans une même salle !
Mais c’est assurément aux femmes qu’une grande partie des 33 spectacles proposés par le théâtre François-Ponsard sont dédiées. Ariane Ascaride ouvre le bal le 18 octobre avec Du bonheur de donner, reprenant des poèmes inédits de Berthold Brecht. Dans La ligne rose (15 mars), trois opératrices de téléphone dans les années 1920 inventent de manière innocente… le téléphone rose.
Le 11 avril, c’est une Iphigénie transposée dans un contexte de luttes sociales au pays de Galles – que ne renierait pas Ken Loach – et incarnée par Gwendoline Gauthier qui campe un personnage de femme, puissante et combative (Iphigénie à Splott).
Germaine Tillion, résistante lyonnaise sera mise à l’honneur dans Une opérette à Ravensbrück (14 décembre), qui abordera dans une forme burlesque un sujet pourtant poignant, la perte de l’identité féminine dans un camp de concentration.
Autre thème, la question de l’identité sexuelle qui taraude les artistes de notre époque. Le talentueux comédien Jean-François Breuer, reprend le rôle touchant de Guillaume Galienne dans Les Garçons et Guillaume à table le 5 décembre pour un spectacle à fleur de peau.
Enfin, comment parler de la culture à Vienne sans évoquer la programmation musicale. Fort de son succès, le cycle des Dimanches en musique va s’enrichir avec cinq nouveaux concerts (Bach, Ravel…) à partir du mois de novembre. Le théâtre François-Ponsard rendra hommage à Léo Ferré (L’Espoir… Orly chante Ferré, le 7 novembre), Serge Reggiani (Reggianissimo en musique de chambre,le 28 janvier), et Nina Simone (avec Kareen Guiock Thuram dans Nina, le 4 avril), puis offrira une Carmen remaniée dans un spectacle de danse surprenant et où, promet Michel Belletante, le public “en prendra plein les yeux” (Car/men, le 4 février).
Et pour clôturer cette saison qui promet d’être passionnante, l’un des événements à ne pas rater est sans doute l’adaptation de l’opéra de Verdi (Traviata – vous méritez un avenir meilleur, le 20 mai), où l’on découvrira la comédienne Judith Chemla – l’une des voix de la vague #MeToo – dans un registre lyrique tout simplement bouleversant.
Présentation de saison ce soir, jeudi 6 juin à 19h. Théâtre François-Ponsard, Vienne – www.theatre-francois-ponsard.fr