Jean Bellorini © Michel Cavalca

Théâtre : un drôle de suicide au TNP

Jean Bellorini s’attaque à une œuvre peu jouée d’un auteur russe, Nikolaï Erdman, et longtemps mise à l’index, Le Suicidé.

L’argument de la pièce de Nikolaï Erdman, Le Suicidé, est relativement simple. En pleine nuit, Sémione Sémionovitch, chômeur et miséreux, tente de soulager sa faim en avalant un saucisson. Il fait trop de bruit, réveille sa femme, une violente dispute éclate. Et le piteux héros disparaît en menaçant de pousser bientôt “son dernier soupir”…

Persuadée qu’il va mettre fin à ses jours, sa femme appelle à l’aide. La nouvelle se répand, attire le voisinage et c’est toute une galerie de personnages qui se pressent pour commenter le funeste événement. Dans ce bal macabre, Sémione entrevoit la gloire posthume qu’on lui fait miroiter et finit par se prendre au jeu : en se suicidant, pourrait-il enfin devenir quelqu’un ?

Sur cette trame, en bon écrivain russe, Nikolaï Erdman multiplie les complications comiques et réflexions philosophiques.

Surtout, il fait passer, par l’humour et la satire, une critique virulente des régimes oppressifs et totalitaires, où le sens de l’existence est encore plus absurde qu’ailleurs.


L’une des plus belles pièces de la Russie communiste


C’est ce qui a valu à cette pièce, écrite durant les années 20 (elle date de 1928), de n’avoir jamais été jouée en Russie du vivant de l’auteur (né en 1900 et mort en 1970). Elle fut même interdite alors que le grand Meyerhold avait prévu de la monter.

Nikolaï Erdman © Wikimedia

Par la suite, Nikolaï Erdman préféra se consacrer à sa carrière de scénariste, moins risquée, tout en restant sous étroite surveillance du régime stalinien. Ce n’est qu’en 1969 que la pièce fut mise en scène pour la première fois en langue russe, mais en Allemagne. Puis en 1980, en anglais, à Broadway (New York).

En France, elle fut notamment montée par Jean-Pierre Vincent, traduite par Michel Vinaver, en 1984. Aujourd’hui, elle est considérée comme l’une des plus belles pièces de la Russie communiste.

Nul doute que Jean Bellorini saura restituer toute sa saveur à cette farce politique grinçante, cette comédie qu’il qualifie de “vaudeville soviétique”. Pour ce faire, outre les fantastiques costumes dessinés par Macha Makeïeff, il a fait appel à sa troupe de comédiens, chanteurs et musiciens qui ont fait le succès de ses dernières mises en scène telles Onéguine de Pouchkine ou Le Jeu des ombres de Valère Novarina.


Le Suicidé, vaudeville soviétique – Du 15 au 17 décembre et du 6 au 20 janvier au TNP


 

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