Actualisé à 13 heures : l'information vient d'être confirmée par Eldorado, le Transbordeur sort du giron de Victor Bosch, et Lyon Capitale présente le nouveau directeur des lieux.
Petit séisme dans le monde des musiques actuelles. D'après nos informations, l'équipe d'Eldorado, promoteur événementiel lyonnais, prend la direction de la plus belle salle de concert lyonnaise. La Ville ôte ainsi le Transbordeur des mains de Victor Bosch, fondateur et maître des lieux depuis 20 ans.
Plusieurs sources du milieu professionnel des musiques actuelles nous l'ont confirmé ce week-end. C'est Eldorado, promoteur et organisateur d'événements culturels lyonnais, qui prendra, accompagné du tourneur parisien Alias, la délégation de service public du Transbordeur, salle de concerts municipale. C'est Cyrille Bonin, personnalité hyperactive du milieu musical et culturel lyonnais, qui devrait s'asseoir à la place Victor Bosch. Il est par ailleurs prestataire d’Arty Farty, l’association organisatrice de Nuits Sonores, laquelle avait aussi présenté un dossier cette année pour le Transbo, mais avait été recalée au premier tour pour un détail de l’ordre du défaut de pièces administratives.
Retour sur les candidatures présentées (article paru dans le numéro de février) :
Marché public/ TRANSBO à QUAI
“Cette salle ne devrait pas seulement accueillir quelques groupes locaux gracieusement, comme on l’a obligée à le faire dans le cahier des charges imposé par la Ville en 2005, estime Olivier Boccon-Gibod, président du C-mal (collectif réunissant la plupart des structures dédiées aux musiques actuelles de l’agglo). Le Transbo devrait être moteur dans le réseau des salles, il devrait même être à l’initiative de démarches portant les artistes locaux.” Un discours que Victor Bosch, fondateur et gérant du Transbordeur depuis plus de 20 ans, a toujours eu du mal à entendre. “Si on avait dû découvrir les nouveaux Rolling Stones à Lyon, ça aurait été fait depuis longtemps”, a-t-il souvent répété à qui voulait l’entendre. Pas contre l’émergence et l’amateurisme toussotant, monsieur Bosch, mais pas dans sa salle. “Pas faite pour ça.” Et d’ajouter : “je suis bien placé pour le savoir, c’est moi qui l’ai imaginée cette salle, c’est moi qui l’ai pensée dans son moindre détail”. Mais à la veille du renouvellement de la délégation de service publique (DSP) sous laquelle le Transbordeur, en tant que salle municipale, est géré, cet homme devenu multimillionnaire grâce à son activité de producteur (il est l’un des fortunés instigateurs de plusieurs comédies musicales dont le très bankable spectacle Notre-Dame de Paris) semble avoir mis de l’eau dans son vin. Il sait que nombre de ses homologues lyonnais veulent prendre les manettes de son navire ou bien le voir en débarquer, et il a bien compris que sa façon de gérer et d’envisager sa salle était quelque peu désuète, même aux yeux de la Ville qui l’a pourtant soutenu.
Bataille engagée…
Tel qu’il était présenté, le cahier des charges imposé par la mairie en 2005 ne pouvait quasiment être honoré que par un Victor Bosch aux reins suffisamment solides. Lui-même s’en est d’ailleurs plaint ouvertement, regrettant le temps où sa salle roulait en partie grâce aux subsides et, par le même temps, sans cadre contractuel juridique et administratif contraignant. Quand l’équipe culturelle de Collomb est arrivée à l’hôtel de Ville en 2001, l’un de ses chantiers a donc été de remettre le Transbo dans la légalité, tout en faisant quelques économies au passage. En 2005, c’est en délégation de service public que la municipalité avait choisi de faire gérer sa salle, et avait désigné pour cela celui que nombre d’acteurs des musiques actuelles voulait voir partir. Avec, pour argument principal : Victor Bosch présentait un dossier avec le volet économique le plus sérieux. Mais pour cette seconde DSP, qui démarrera donc à l’été 2010, l’avantage financier de Bosch n’est plus aussi évident. Par exemple, Thierry Pilat, ancien programmateur du Ninkasi Kao et aujourd’hui programmateur au Fil de Saint-Etienne, qui avait déjà présenté un dossier en 2005, candidate cette fois aux côtés d’Olivier Poubelle et de sa société Astérios organisatrice de spectacles, qui produit quelques artistes à succès comme Olivia Ruiz ou Vincent Delerm, et dirige également la salle des Bouffes du Nord à Paris. Autre candidat armé : Frédéric Gangneux, un ancien collaborateur de Victor Bosch licencié pour raisons économiques après le changement de gestion du Transbo en 2005. Il se présente également avec un dossier sérieux appuyé par le label et la société organisatrice de spectacles A gauche de la lune. Toujours dans le même milieu de l’événementiel, les Lyonnais d’Eldorado qui avaient déjà déposé un dossier en 2005 sont en course. S’est tout récemment adjoint à cette candidature Cyrille Bonin, un personnage hyperactif du milieu musical et culturel lyonnais, par ailleurs prestataire d’Arty Farty, l’association organisatrice de Nuits Sonores, laquelle avait aussi présenté un dossier cette année pour le Transbo, mais avait été recalée au premier tour pour un détail de l’ordre du défaut de pièces administratives.
… mais quand “c’est bien, c’est beau, c’est Bosch”
De son côté, Victor Bosch a aussi fourbi ses armes, avec l’avantage du sortant. Il pourra prouver en 2010 qu’il sait gérer cette salle sous DSP, malgré la suppression d’une grande partie des subsides publics. Il pourra aussi montrer sa bonne volonté à revoir éventuellement son côté marcheur solitaire et successfull qui n’a que faire de ses voisins. Il a en effet recruté il y a un an dans son équipe une nouvelle coordinatrice, Noémie Dié, qui a su intelligemment créer des liens avec les autres acteurs de la Ville. Arrivée de Paris où elle travaillait dans le milieu du spectacle vivant, elle a initié de nouvelles soirées au Transbordeur, baptisées Open, qui mettent en avant des artistes locaux, et croisent les disciplines. Elle est également à l’initiative d’un tremplin régional jeunes talents, doté d’un jury de professionnels sérieux et de l’appui de la Fnac, et qui aura lieu d’ici mars.
En plus des efforts réalisés par l’équipe actuelle du Transbordeur, on peut estimer qu’il sera difficile pour les challengers de déloger Victor Bosch. En effet, ce dernier fait partie des quelques figures du milieu culturel lyonnais institutionnel, arrivé sur la scène locale en même temps, par exemple, qu’un Thierry Raspail, directeur du musée et de la Biennale d’art contemporain, et qui n’hésite pas à donner un coup de main à une autre figure, Thierry Frémeaux, directeur de l’Institut Lumière pour lancer la première édition de son festival de cinéma Lumière 2009. Son éviction d’une salle qu’il a fondée il y a 20 ans pourrait passer pour un désaveu de la part de la Ville, qui mettrait ainsi un soufflet à l’un des hommes forts, notamment d’un point de vue économique, de son réseau culturel. “De toutes façons, même si c’est Bosch qui remporte à nouveau la DSP, il semble avoir compris que sa salle devait fonctionner autrement et s’inscrire dans un réseau local, analyse un promoteur. Ce qui est rageant, c’est de voir que c’était possible et qu’il aurait pu le faire avant !”
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