Young / Crosby, Stills & Nash : rencontre du 4e type ?

Hasard du calendrier, le grand Neil Young et ses anciens complices Crosby, Stills & Nash se produisent ce début de semaine à Vienne et à Lyon. De quoi fantasmer une fugace reformation surprise de Crosby, Stills, Nash & Young ? Impossible de ne pas y penser.

Il est assez inouï de constater qu’à un jour d’intervalle les théâtres antiques de Lyon et de Vienne accueillent des légendes du rock à peine moins antiques mais tout aussi séminales : le trio country-folk Crosby, Stills & Nash d’un côté, pour les Nuits de Fourvière, et leur ancien compère Neil Young, qu’on ne fera à personne l’affront de présenter, pour Vienne. Le fait est que tout au long de leurs carrières respectives les quatre musiciens n’ont cessé de se croiser.

Rencontre de Mort

C’est avec Stephen Stills – futur mari de... Véronique Sanson – que Young débuta l’aventure “commune” au sein de Buffalo Springfield (1966-68) dont le For What it’s Worth est entré dans la légende hippie. Le destin des deux hommes n’a été fait que de séparations et de retrouvailles – s’étant rencontrés une première fois au Canada, ils se recroisent par hasard dans un embouteillage angeleno, Stills reconnaissant la voiture, plutôt unique, de Neil Young : un corbillard baptisé Mort, utilisé pour traverser clandestinement la frontière américano-canadienne. Stills bondit alors de son véhicule pour aller saluer son vieil ami, sans savoir qu’une partie de leur avenir commun se joue là.

À la suite de Buffalo Springfield, Stills fonde avec David Crosby (membre fondateur et congédié des mythiques Byrds) et l’Anglais Graham Nash, qui a connu les grandes heures de la pop british avec The Hollies, l’un des plus grands “super-groupes” – ces formations dont les membres ont déjà connu un grand succès avec d’autres groupes – de l’histoire : Crosby, Stills & Nash.

Un an plus tard, à la demande de Stills, le trio est rejoint par un Young à la carrière solo pourtant en plein décollage et devient, le temps du mythique Déjà Vu (tout simplement l’un des meilleurs albums de tous les temps) et d’une participation à Woodstock où Young refusera d’être filmé : Crosby, Stills, Nash & Young.

Pilule psyché

Young multipliera les allers-retours, notamment scéniques, avec le trio. Mais la relation est faite de brouilles et de réconciliations, le Canadien ayant non seulement une admirable carrière à mener – ce que font également ses camarades, tel David Crosby avec l’époustouflant If I Could Only Remember My Name – mais surtout ne supportant que modérément de devoir jouer les assistantes sociales auprès de ses camarades, Stills notamment étant régulièrement en proie à de sérieux problèmes d’alcool, ce qui vaudra d’ailleurs à Crosby & Nash de se produire un temps en duo.

D’autant que le grand Neil n’est pas non plus épargné par la vie au début des années 1970, entre le décès traumatisant de son guitariste Danny Whitten – Young lui a prêté les quelques dollars ayant servi à acheter la dope dont il fera une overdose –, des problèmes de cocaïne, la naissance d’un enfant handicapé mental (un deuxième, atteint du même mal, suivra). Cela n’empêchera pas Neil Young et Stephen Stills d’enregistrer en 1976 un album sous le nom de The Stills & Young Band (son titre, Long May You Run, est une déclaration d’amour de Young à son fameux corbillard) et de refonder Buffalo Springfield le temps d’une tournée, en 2011.

Aujourd’hui, au regard des parcours respectifs de chacun, Crosby, Stills & Nash sont davantage des figures de musée d’un âge d’or du folk – et de la période hippie – dont ils ne se sont jamais vraiment remis, quand Young campe toujours au sommet. Le cœur balançant à son habitude entre folk déchirant et recherche plus sonique que sonore, le Loner qui, dans les années 1990, contribua à façonner le son grunge avec son fidèle groupe Crazy Horse est toujours capable de mettre une pilule à notre belle jeunesse. En témoigne son dernier album, Psychedelic Pills, sorti l’an dernier, véritable déflagration sonore. On rêve néanmoins secrètement, étant donné le peu de temps et de distance séparant les deux événements, et si le calendrier et les humeurs le permettent, que l’un ou les autres s’invitent sur l’une des deux scènes – et pourquoi pas les deux ? – le temps d’une fugace impression de Déjà Vu.

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Neil Young & Crazy Horse. Lundi 15 juillet, à 20h, au théâtre antique de Vienne.

Crosby, Stills & Nash. Mardi 16 juillet, à 21h, au théâtre antique de Fourvière. Nuits de Fourvière 2013.

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