Jean-Marc Hourse, avocat lyonnais spécialiste du droit de l'environnement
Jean-Marc Hourse, avocat lyonnais spécialiste du droit de l’environnement

Pollution aux PFAS dans le Rhône : quelles condamnations pour Arkema et Daïkin ?

Jean-Marc Hourse,  avocat lyonnais, spécialiste du droit de l'environnement, est mandaté par 32 communes porter leur plainte contre X pour écocide pour la pollution aux PFAS, les polluants éternels du Rhône.

Lundi 30 octobre, une plainte contre X pour le compte de 32 communes et d'une communauté de communes du Rhône, de 6 fédérations de protection du milieu aquatique et autres professionnels de la pêche et de 36 personnes physiques a été déposée au procureur de la République de Lyon pour la pollution aux PFAS, ces polluants dits éternels déversés dans le Rhône.

D'ici la fin de l'année, les 30 communes de l'agglomération de Vienne-Condrieu pourraient très probablement se greffer à cette plainte.

Que risquent les entreprises à l'origine de ces pollutions, à savoir Arkema et Daïkin ? Eléments de réponse avec Jean-Marc Hourse, avocat au barreau de Lyon, spécialiste du contentieux environnemental qui a été mandaté par les plaignants.

"Ce dossier est absolument incroyable, tant il met en exergue le dysfonctionnement du système administratif français." explique l'avocat mandaté par les 75 plaignants qui disent avoir été "alertés sur les risques générés par les activités d’Arkema et Daikin".

Lire aussi :
- Pollution du Rhône : plainte contre X pour "écocide", 300 000 habitants concernés


La retranscription intégrale de l'entretien avec Jean-Marc Hourse

Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes chrono. Nous recevons aujourd'hui Jean-Marc Hourse, bonjour.

Bonjour Guillaume.

Jean-Marc Hourse, vous êtes avocat au barreau de Lyon, spécialiste du droit de l'environnement et c'est vous qui avez été mandaté par 75 pays plaignants pour porter une plainte contre X, notamment pour écocide, sur tout ce qui touche à la pollution aux "polluants éternels", soit 300 000 habitants concernés. Alors je parlais d'écocide mais au final vous avez soumis au procureur de la République de Lyon quatre qualifications pénales. Pour quelles raisons quatre qualifications pénales ?

Alors quatre qualifications pénales ne serait-ce que parce que déjà elles existent. Ça couvre largement le le panel des possibilités juridiques. Alors la première qui a été utilisée, comme vous le savez ça a été dit déjà dans vos articles, c'est la mise en danger de la vie d'autrui qui est une qualification particulière compliquée assez contraignante. C'est à se demander pourquoi le législateur a sorti de telles qualifications, de telles conditions à réunir qui sont très difficiles. Et donc il fallait élargir donner la possibilité au procureur de poursuivre sur d'autres possibilités. La seconde possibilité étant l'écocide qui est une infraction relativement récente 2020-2021. Mais nous sommes quand même concernés par les PFAS puisqu'ils ne sont pas interdits.

Les PFAS, les polluants éternels

Les polluants éternels. Ils sont toujours relâchés dans la nature. Et après il y a les qualifications classiques que l'on utilise en matière d'environnemental qui sont les rejets dans la nature de substances nocives et dangereuses. Et donc voilà ça fait donc quatre qualifications possibles pour le procureur de la République qui pourra choisir.

Et donc c'est au procureur de la République qui vous aurez ce qu'on vient de dire soumis quatre qualifications pénales qui lui va choisir la qualification qui lui semble plus proche d'aboutir la plus apte d'aboutir ou pas c'est ça ?

Alors c'est ça, mais il a la possibilité de renvoyer en correctionnelle si c'est son désir ou de renvoyer devant la juge d'instruction en retenant telle et telle possibilité. Voilà il n'est pas obligé de choisir immédiatement. Et au final je le rappelle c'est le tribunal qui choisit d'ailleurs la qualification qui peut être retenue.

D'accord. Donc 75 plaignants on le disait qui représente à peu près j'avais fait le calcul 300 000 habitants c'est quand même pas rien. Il y a notamment 32 communes, une communauté de communes, des personnes physiques, six fédérations de pêche et de protection du milieu aquatique. Vous êtes avocat depuis 1991 au barreau de Lyon. Est-ce que c'est quand même vous êtes spécialiste ce que je disais dans le contention environnementale est-ce que c'est un des plus gros dossiers en termes environnementaux que vous avez eu à traiter dans votre carrière ?

Oui la barrière a été franchie avec ce dossier. Vous avez raison, Guillaume, c'est le dossier le plus gros le plus large en termes de plaignants, étant précisé qu'au demeurant, comme vous venez de l'indiquer, les mairies représentent évidemment leurs habitants. Et donc ça représente 200 à 300 000 personnes. Et les fédérations de pêche représentent à peu près chacune d'elles 30, 40, 50 000 adhérents.

Donc là, l'enquête c'est un service une cellule spécialisée de la gendarmerie qui est chargée de l'enquête : l'office centrale de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique. Est-ce que vous en tant qu'avocat vous avez des nouvelles de cette enquête ? On en est où ?

Alors, je n'ai pas encore de nouvelles. Il faut que j'aille voir puisqu'une partie du dossier est déjà chez la gendarmerie d'instruction. Et l'autre partie qui correspond à la plainte qui a été déposée il y a une quinzaine de jours. Je dois également prendre rendez-vous avec les services enquêteurs pour savoir où ils en sont. Mais eux-mêmes vont être confrontés à un dossier qui est quand même un mastodonte y compris pour eux.

Donc on l'a dit c'est une plainte contre X. On ne cite pas X, enfin on sait quand même qu'ils me semblent qu'Arkema et Daikin sont dans le viseur, dans le collimateur...

On peut l'imaginer.

On parlait de 75 plaignants. Peut-être d'ici la fin de l'année il y aura les 30 communes de l'agglomération de Vienne-Condrieu. On en est où ?

Alors, on a été approchés par l'agglomération de Vienne, vous avez raison. Qui, pour des raisons de délibération, d'information auprès des 30 communes, attendait pour nous mandater au début du mois de décembre. Donc c'est en cours, ça devrait se faire. Donc ça ferait 30 communes de plus plus 30 personnes physiques de plus. Donc ça ferait encore 50 à 60 plaignants supplémentaires. Et l'agglomération alors je n'ai pas le chiffre en tête mais l'agglomération de Vienne représente encore quelques dizaines de milliers d'habitants. Donc gros gros dossier comme on le disait.

Qu'est-ce que les communes les plaignants que vous défendez et vous qu'est-ce que vous attendez de la justice ?

Alors ce qu'on attend de la justice c'est qu'une enquête soit menée. Et le terme de cette enquête c'est que l'on sache véritablement ce qui s'est passé : Pourquoi ces produits ont été utilisés ? À quel moment ? S'ils sont véritablement aussi nocifs qu'on commence à le penser, et que les études notamment en provenance du continent nord-américain nous l'indiquent sont véritablement très nocifs pour la santé, puisqu'on commence à faire un certain nombre de rapports avec des cancers hormono-dépendants. C'est pas rien. Que l'on sache à partir de quand les informations auraient dû être données pourquoi ces produits se sont retrouvés dans le grand public depuis des années, et est-ce qu'il n'aurait pas fallu à un moment donné appliquer le principe de précaution dès lors que sur le continent nord-américain. Les entreprises que vous avez citées, qui ne sont pas nommément citées dans la plainte, ont quand même eu des affaires judiciaires qui se sont soldées par des transactions.

Effectivement, une enquête pour connaître un peu qui, quoi comment, où, pourquoi. Est-ce que en termes de sanctions on peut imaginer qu'est-ce qu'on peut imaginer en termes de sanctions ?

Alors en termes de sanctions quand on parle de sanctions, on parle d'application de la loi pénale. Donc ce sont des condamnations, je dirais, de principe, sauf à imaginer qu'ils aient fait exprès de relâcher des produits dangereux, je ne le sais pas à ce stade puisque l'enquête n'est pas connue. Mais ce serait des condamnations à des peines de prison avec sursis, des condamnations à des amendes qui peuvent être très, très lourdes et indemniser pour l'instant les communes, les personnes physiques qui sont dans la plainte. Mais il pourrait y avoir d'autres personnes physiques qui pourraient se greffer, si un jour on fait le lien entre les PFAS et des maladies très dangereuses qui attaquent le corps humain.

Cela risque d'être un dossier qui risque de durer très longtemps Ça c'est à peu près sûr. Merci beaucoup Jean-Marc Hourse, au revoir.

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