Fadettes : Squarcini “n’a fait qu’exécuter un ordre”

Bernard Squarcini comparaissait ce mardi 18 février devant la 17e chambre correctionnelle de Paris dans l’un des volets de l’affaire dite des “fadettes”. Il est suspecté d’avoir utilisé les factures téléphoniques d’un journaliste du Monde, Gérard Davet, pour trouver sa source. Durant l’audience, l’ancien patron de la DCRI a dit avoir agi sur demande de son supérieur hiérarchique. Le parquet a requis 5 000 euros d’amende.

Bernard Squarcini se présente à la barre, un sourire aux lèvres, parlant d’une voix ferme et forte. Il répète sa version, déjà donnée sur cette affaire des “fadettes”. Le 18 juillet 2010, Le Monde, sous la signature de son journaliste enquêteur Gérard Davet, délivre le procès-verbal de Le Maistre, dans l’affaire Bettencourt, "qui démontre les liens forts, voire consanguins, entre lui et Éric Woerth, alors ministre du Travail", avance Gérard Davet à la barre.

Un simple exécutant ?

Suite à un appel de Frédéric Péchenard, directeur général de la Police nationale, son supérieur hiérarchique, Bernard Squarcini, alors en Corse pour un mariage, demande le 19 juillet à son adjoint de relever les fadettes* de Gérard Davet. "J’ai été saisi par une autorité, j’avais une compétence particulière", affirme le spécialiste du renseignement, célèbre notamment pour avoir pu permettre l’arrestation d’Yvan Colona. Deux jours plus tard, il demande le listing téléphonique de David Sénat, conseiller spécial auprès de Michèle Alliot-Marie, la garde des Sceaux de l’époque. Le conseiller sera remercié quelques jours plus tard, soupçonné d'être la source du journaliste du Monde.

Visiblement agacé par les questions autour des personnes visées, en l’occurrence Gérard Davet et David Sénat, le prévenu s’emporte un peu : "On n'est pas au ministère de la Culture ! Il faut un peu de décence, il faut de la réserve lorsque l’on travaille dans un ministère régalien." Cela transparaît durant l’audience : Bernard Scquarcini est imprégné d’un vrai sens du devoir : "Je suis un haut fonctionnaire, au service de l’État, j’ai été élevé comme cela." Quitte à enfreindre la loi, pour "protéger les intérêts de la nation", comme il l’évoque ?

Le fameux article 20 de la loi de 1991

Sa défense se base notamment sur le recours à l’article 20 de la loi de 1991 sur le secret des correspondances. "C’était une demande faite dans le cadre de fuites au plus haut sommet de l’État", explique l'un des témoins à la barre. Bernard Squarcini s'appuie donc sur cet article qui prévoit l'autorisation du contrôle des communications lorsque les intérêts de la nation sont visés.

Pourtant, au début de l'année 2010, une loi sur la protection des sources des journalistes avait été votée par la majorité. Un poil amer, Gérard Davet souligne que, "sans arrière-pensée, la garde des Sceaux a remercié un conseiller, en ayant voté une loi sur le secret des sources quelques mois plus tôt". En revanche, le grand absent de ce procès reste Frédéric Péchenard, qui n'a pas été cité comme témoin.

Le parquet a requis 5 000 euros d'amende. La décision du tribunal sera rendue le 8 avril prochain.

* Abréviation argotique de “factures téléphoniques détaillées” : fadet/fadette.

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