Euthanasie : le procès du Dr Bonnemaison devant les assises

Le docteur Bonnemaison comparaît devant la cour d’assises de Pau à partir de ce mercredi. L’urgentiste bayonnais est accusé d’avoir euthanasié sept patients en 2010 et 2011. Le médecin a toujours dit avoir agi par compassion pour les victimes. D’ailleurs, seule une famille s’est portée partie civile, d’autres soutenant la démarche de l’accusé.

L’homme, aujourd’hui âgé de 53 ans, est accusé d’avoir empoisonné sept personnes accueillies dans l’unité des urgences de l’hôpital de Bayonne. Nicolas Bonnemaison comparaît libre, mais il encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le tout sur fond de vif débat autour de la légalisation de l’euthanasie.

Dénoncé par les infirmières

Dès 2011, un premier rapport avait été rédigé par une cadre des services d’urgences de l’hôpital de Bayonne, suite à des témoignages d’infirmières et d’aides-soignantes. Elles avaient dénoncé le curieux comportement de Nicolas Bonnemaison, qu’elles avaient décidé de surveiller. À plusieurs reprises, elles avaient constaté que le médecin avait administré des sédatifs à des patients hors du protocole médicamenteux habituel. Le rapport remis à la PJ de Bayonne avait conduit à la mise en examen de l’urgentiste pour empoisonnement sur personne vulnérable, début août 2011.

Le médecin a toujours expliqué s’intéresser durant son parcours professionnel à la prise en charge des malades en fin de vie. Il dit avoir agi pour les patients, en accord avec les familles, tout en admettant ne pas en avoir parlé au personnel médical. Il aurait administré de l’Hypnovel, un psychotrope, et au moins une fois du Norcuron (à base de curare), substance entraînant la paralysie des muscles respiratoires utilisée en anesthésie-réanimation.

Les paris de Bonnemaison ont choqué une famille

Aucune famille n’a porté plainte et seul un couple a décidé d’être partie civile, choqué par le comportement du médecin. Durant l’enquête, Nicolas Bonnemaison aurait lancé des paris sur l’espérance de vie de leur parente. Le fils de la victime reproche également au médecin son manque de dialogue, affirmant ne pas l’avoir rencontré. D’autres familles, au contraire, ont clairement décidé de soutenir l’urgentiste. C’est le cas de Patricia Dhooge, dont l’époux est décédé, quinze ans après un long combat contre la maladie, le 30 mars 2010. Nicolas Bonnemaison lui avait administré un sédatif. Pour Patricia, le médecin a simplement abrégé les souffrances de son mari en fin de vie.

Des ministres et une loi

Au total, près de 70 témoins vont se succéder à la barre. Outre le personnel soignant, les familles des victimes, un député et deux anciens ministres vont venir témoigner : Jean Leonetti, père de la loi sur la fin de vie, Bernard Kouchner et Michèle Delaunay, ex-ministres de la Santé. Ceprocès intervient alors que l’opportunité d’une réforme de la loi Leonetti du 22 avril 2005 est en discussion. Le texte, qui n’autorise pas l’euthanasie, mais tend à instaurer un droit au “laisser mourir”, est notamment jugé insuffisant par les partisans de l’euthanasie.

En janvier dernier, François Hollande s’est prononcé pour une loi qui permette, “dans un cadre strict”, à un majeur atteint d’une maladie incurable de demander “une assistance médicalisée pour terminer sa vie en dignité”. Les termes se veulent volontairement flous alors que l’euthanasie demeure une question clivante au sein de la population française. Le Gouvernement a déjà reçu plusieurs avis et poursuit ses consultations pour un texte prévu d’ici à la fin de l’année. En juillet 2013, la majorité des membres du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a recommandé de ne légaliser ni l’assistance au suicide (exécuté par le patient lui-même), ni l’euthanasie (acte réalisé par un tiers).

Nicolas Bonnemaison a été définitivement radié du Conseil national de l’ordre des médecins le 14 avril dernier.

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