Jérôme Kerviel : héros ou escroc ?

Un véritable déferlement médiatique s’est abattu ce week-end au sujet du retour de Jérôme Kerviel en France. Orchestré par son avocat, David Koubbi, le passage de l’ex-trader de la Société Générale condamné à 5 ans de prison dont 3 fermes a occupé l’espace politico-médiatique pendant deux jours. Arrêté à Menton à minuit, il doit être présenté ce lundi au procureur de Nice.

Finalement, le suspens n'aura pas duré bien longtemps. Aussitôt franchie la frontière franco-italienne, Jérôme Kerviel a été interpellé devant les yeux de son comité de soutien. "Cela a été violent", a décrit, ému, le père Patrice Gourrier, qui s'est mis en disponibilité pendant quatre mois pour terminer la marche de Kerviel jusqu'à Paris.

Une condamnation confirmée en appel en 2012

L'ex-trader est actuellement emprisonné à Nice en attendant de voir le procureur. Samedi, les autorités françaises avaient intimé à l'ancien courtier de se présenter avant dimanche minuit afin de purger sa peine de 3 ans de prison fermes pour abus de confiance, faux et usage de faux et introduction de données informatiques frauduleuses.

Alors défendu par feu Olivier Metzner, le plus grand avocat de droit pénal des affaires, son premier procès s'était déroulé sur quatre semaines. Sa condamnation a été confirmée en appel en juin 2012, après avoir changé d'avocat. Enfin, la Cour de cassation, en mars 2014, a de nouveau confirmé la condamnation de Jérôme Kerviel à de la prison. En revanche, elle a cassé celle qui lui avait infligé des dommages et intérêts record de 4,9 milliards d'euros. Pour le volet civil de l'affaire, la plus haute juridiction a donc renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Versailles. Ce sera "le procès de la Société Générale", avait commenté Me Patrice Spinosi, un des avocats de l'ancien trader.

L’appel à François Hollande

Le combat continue pour Jérôme Kerviel, cherchant sur les routes italiennes une forme de rédemption mais une véritable vitrine médiatique. Dimanche matin, Jérôme Kerviel a demandé une entrevue avec François Hollande. L'Elysée s'est contenté d'une laconique réponse : "Aucune rencontre n'est à l'ordre du jour" avec les avocats de Kerviel. Le chef de l'Etat était "attaché au respect" des décisions de justice.

Un escroc pour Sapin, un innocent pour Mélenchon

Les réactions politiques se sont succédé dimanche. Michel Sapin, interrogé à ce sujet, a sans doute été l'un des plus virulents. Kerviel est "un escroc", a jugé le ministre des Finances. "M. Kerviel est un délinquant et un délinquant condamné par la justice française pénalement (...) C'est un escroc [qui] doit bien entendu purger sa peine”, a déclaré Michel Sapin au Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI, qui a cependant précisé que Jérôme Kerviel pouvait "faire des demandes à l'institution judiciaire pour aménager sa peine" et "saisir le président de la République (...) d'une demande de grâce". "Cela fait partie de la loi et du respect des droits des uns et des autres, mais qu'on arrête avec ce cinéma", ajoute, au final, le ministre.

De son côté, Jean-Luc Mélenchon, comme à son habitude, a clairement soutenu l'ancien trader de la Société Générale. Il "est innocent, donc on le soutient", a commenté ce dimanche soir Jean-Luc Mélenchon sur le plateau de BFMTV. "Il est un homme qui a été transformé en coupable", estime le coprésident du Parti de gauche.

Même soutien de la part de Marine Le Pen au micro de RTL : "C'est un pion. S'acharner sur un homme sans remettre en cause le système, c'est facile." Une position qu'elle partage donc avec Jean-Luc Mélenchon. Elle ironise d’ailleurs à ce sujet : "Parfois, il a raison... Dans les constats, pas dans les solutions."

“Scandaleux d’interpeller le président”, selon l’avocat de la Société Générale

Désormais détenu à la maison d'arrêt de Nice, Jérôme Kerviel avait entamé une marche entre Rome et Paris contre la "tyrannie des marchés" en février. La Société Générale, elle, a dénoncé dès samedi la "violence du tapage médiatique orchestré" par son ancien trader, mêlant selon elle "mensonges, amalgames et approximations".

Ce lundi matin, sur Europe 1, Jean Veil, l'avocat de la Société Générale, s'est exprimé pour la première fois sur ce qui s'est passé ce week-end. "Je trouve scandaleux que M. Kerviel interpelle le président de la République comme l'a fait Leonarda", a jugé Jean Veil. Le conseil de la Société Générale a aussi estimé lundi que "la presse se laissait mystifier dans des conditions absolument incroyables" par l'ancien trader.

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