Nicolas Bonnemaison : “Je me suis trompé”

“Je me suis trompé.” Au deuxième jour de son procès, Nicolas Bonnemaison a avoué un comportement inopportun face à l’une de ses patientes, Mme Iramuno. Dans un échange poignant avec le fils de la victime et l’épouse de celui-ci, le médecin a convenu avoir mal agi en n’informant pas suffisamment la famille de son geste.

Ce jeudi après-midi, la cour a examiné le cas très précis de deux patientes décédées en avril et en mai 2011. Parmi elles, Mme Iramuno, une vieille dame, âgée de 86 ans.

Elle ne souffrait pas, selon les infirmières

Mme Iramuno est transportée aux urgences de l’hôpital de Bayonne suite à une mauvaise chute, en ce mois d'avril 2011. Tombée dans le coma, elle souffre d’une grave hémorragie cérébrale. Dans l’après-midi du 11 avril, elle décède. Une jeune aide-soignante et une infirmière se succèdent à la barre et décrivent cet après-midi-là. Leurs récits sont identiques. Lors de la réunion de transmission, à 14h, le docteur Bonnemaison s’étonne que la patiente soit toujours hospitalisée : "Je vous parie un gâteau au chocolat que demain elle ne sera plus là." Lors de leur tour de garde, elles constatent que la vieille dame est dans un état comateux – "un faciès détendu, elle ne semblait pas souffrir", insistent les deux femmes.

L’aide-soignante entend alors le docteur Bonnemaison casser une ampoule, préparer une seringue et se rendre dans la chambre de Mme Iramuno. Quelques minutes plus tard, le tracé cardiaque leur indique que la patiente va mal. Elles la retrouvent "grise, elle était en train de partir". Elles cherchent à joindre le docteur Bonnemaison, il n’apparaît pas. Sur ce point précis, le médecin ne s’explique pas, affirmant avoir été joignable.

“Je me sentais un peu perdu”

Nicolas Bonnemaison ne réfute pas avoir injecté de l’Hypnovel à cette patiente. Mais il n’a rien dit. Ni au personnel soignant – "pour les protéger", son leitmotiv – ni à la famille. Et c’est bien cela que lui reproche avant tout le fils de la victime, Pierre Iramuno. Dans un témoignage émouvant, celui-ci décrit la prise en charge de sa mère à l’hôpital. Il confirme avoir vu un médecin, le docteur Nguyen, qui lui a révélé la gravité de l’état de la malade : "Le pronostic vital est engagé."

Le lendemain matin, il revient – "Je me sentais un peu perdu" –, il ne rencontre aucun médecin. C’est par téléphone qu’il apprend, dans l’après-midi, le décès de sa mère. À la barre, l’homme âgé de 61 ans est en pleurs. "Je n’ai pas compris, j’étais choqué." En 1994, il avait été confronté à la mort de son père, dialysé. À cette époque, le médecin s’était entretenu avec la famille et avait convenu d’arrêter le traitement.

L’échange incroyable entre Bonnemaison et la famille

Cette fois, le président interroge Nicolas Bonnemaison. Un dialogue poignant s’installe alors entre le médecin et le fils de la victime.

"Je suis bouleversé par votre témoignage, j’espère que vous avez acquis la conviction que c’était mon devoir de vous protéger, avance le médecin. Vous avez été écouté, il n’y a pas eu d’acharnement thérapeutique.

– J’entends bien ce que vous avancez, mais je voulais échanger avec vous, je voulais vous rencontrer, je ne vous ai pas vu, répond Pierre Iramuno.

Je comprends.

Je vous ai entendu, je ne comprends toujours pas, vous n’avez préservé personne ! On est des êtres humains, on fait des erreurs, à un moment il faut assumer, poursuit Pierre Iramuno.

– J’essaie d’assumer.

– Vous êtes également en souffrance.”

L’échange est presque irréel, une explication attendue depuis près de trois ans par la famille, et la reconnaissance par le docteur Bonnemaison d’avoir agi en solitaire, un acte qui n’a finalement protégé personne.

La belle-fille de la victime, tout aussi émue, s’adresse également à Nicolas Bonnemaison. "C’est un mépris pour nous, pour notre famille", avance-t-elle. "C’est un énorme gâchis, il suffisait d’en parler", lance-t-elle, avec impuissance.

"Je suis un homme incapable d’avoir du mépris, tout ce que je souhaite c’est que vous me compreniez un peu mieux, dit Bonnemaison, comme dans une prière. J'ai généré de la souffrance en croyant vous l’épargner. Dans le cas particulier de votre belle-mère, je me suis trompé."

Nicolas Bonnemaison se rassoit, les larmes aux yeux. Comme ébranlé par cet instant. Cette famille est la seule qui s’est constituée partie civile. Les autres apportent leur soutien au médecin, à l’exemple de Pierre Buille, également fils d'une victime. Lui affirme au contraire qu’il y avait un vrai accompagnement de la part de Nicolas Bonnemaison.

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