Quatre Français, dont deux pilotes, sont jugés à partir de lundi en République dominicaine. Ils sont accusés de trafic de drogue après la découverte de près de 700 kg de cocaïne dans leur avion en mars 2013. Le Lyonnais Pascal Fauret et Bruno Odos, les pilotes, ont toujours nié savoir qu’il y avait de la drogue à bord de l’engin. Le procès, déjà reporté en décembre dernier, devrait bien se tenir à partir de ce lundi.
Qui a été arrêté en mars 2013 ?
20 mars 2013, sur le tarmac de l'aéroport de la célèbre station balnéaire de Punta Cana. Un avion, un Falcon 50, qui appartient à l'homme d'affaires Alain Afflelou, a été confié à une société, SN-THS, basée à Bron. L'engin s'apprête à décoller pour Saint-Tropez. À bord de l'appareil, les douaniers retrouvent près de 700 kg de cocaïne répartie dans 26 valises.
Quatre Français sont alors interpellés : Pascal Fauret et son copilote, Bruno Odos, ainsi que deux autres hommes, Nicolas Pisapia ("un client courtois et discret", rapportent les pilotes) et Alain Castany, un membre d'équipage.
Outre les quatre Français, une trentaine de Dominicains sont aussi interpellés. Parmi eux, des membres du service de sécurité de l'aéroport et même des policiers.
"On a été arrêtés dans un grand coup de chalut qui devait emporter tout un réseau", explique avant le procès l'un des deux pilotes à l’AFP. D'ailleurs, dans cette affaire, ils n'ont été auditionnés que 10 minutes, par l’agence américaine antidrogue.
Quel est l’enjeu du procès ?
Selon leur avocat, les deux pilotes, qui nient toute implication, risquent jusqu'à 25 ans de prison.
Juridiquement, pour permettre aux deux hommes de s'en sortir, il faut déterminer quelle est la nature exacte du vol. Est-elle privée ou commerciale ?
Selon l'accusation, il s'agit bien d'un vol privé et que donc la responsabilité des bagages revient à l'équipage. Pour sa part, la défense s'appuie sur la réglementation internationale pour prouver qu’il s’agit d’un vol commercial. Dans ce cas, les autorités locales seraient considérées comme responsables des bagages. Le procès, prévu sur 5 jours, devrait déterminer cet enjeu juridique. En décembre dernier, une première audience avait été reportée. La présidente du tribunal de Saint-Domingue avait justifié sa décision par l'absence de certains témoins appelés à comparaître.
Qui a vu la drogue ?
L'épouse de Pascal Fauret, Sabine Fauret, contactée par Lyon Capitale, est exaspérée par la lenteur de cette procédure, et s'interroge aussi sur la présence réelle de la drogue. "Nous n'avons jamais vu de poudre blanche, sinon des paquets lors de l'arrestation de mon mari. D'ailleurs, on se serait cru dans un film hollywoodien", remarque-t-elle ironiquement. Il est vrai que la cocaïne a été immédiatement détruite par les enquêteurs.
Les deux pilotes ont vécu 15 mois en prison puis, depuis 8 mois, ils sont assignés à résidence près de l'aéroport de Punta Cana. Ils ne souhaitent qu'une chose : rentrer rapidement chez eux, visiblement épuisés par la lenteur de la justice.
"Ma vie a été transformée, il faut se battre", explique Sabine Fauret, qui considère que la France "les a abandonnés". Elle estime, notamment sur le plan diplomatique, que le pouvoir s’est finalement peu investi. Pourtant, elle voit "un dénouement heureux de cette affaire" avec la tenue du procès. "C'est moins difficile qu'au début, avoue-t-elle. Désormais on peut communiquer sur Skype."
Où en est l’enquête française ?
En fait, il existe également un volet français de cette affaire Air Cocaïne.Cette enquête a débuté au moment de l'interception de l'avion en République dominicaine. D'abord ouverte à Paris, elle a été transférée sur Marseille. Dès janvier 2013, des enquêteurs français étaient alertés par les comportements suspects de passagers d'un Falcon 50 qui avait atterri un mois plus tôt à Saint-Tropez.
Ce 9 décembre, un douanier qui travaillait à Toulon (aujourd'hui soupçonné de complicité) était allé à l'aéroport et avait accueilli un avion avec à son bord les deux pilotes et Nicolas Pisapia, l'homme d'affaires. Dix valises étaient alors déchargées de l'appareil par les soins du douanier. Un autre homme, Franck Colin, a été mis en examen et incarcéré à la prison de Luynes : il avait affrété l'avion. Enfin, Pierre-Marc Dreyfus, le patron de la société basée à Bron, a été mis en examen pour "importation de stupéfiants en bande organisée, association de malfaiteurs et direction d'un groupement en vue de l'importation et du trafic de stupéfiants et blanchiment".
Le 23 février dernier, la juge d'instruction française est venue voir les deux pilotes et les a interrogés, ce qu'ils réclamaient depuis longtemps. Rien n'est ressorti de cet entretien, à seulement quelques jours de leur procès.