Raphaël Vulliez, le cofondateur du collectif Jamais Sans Toit, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Raphaël Vulliez, le cofondateur du collectif Jamais Sans Toit, est l’invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.

Jamais Sans Toit : "On se retrouve à faire le travail de l'Etat et des collectivités territoriales"

Raphaël Vulliez, le cofondateur du collectif Jamais Sans Toit, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.

EDIT : L'émission a été enregistrée avant l'annonce de la Ville de Lyon, le mercredi 18 décembre, disant qu'elle allait mettre à l'abri 160 jeunes isolés en recours de minorité, ainsi qu'elle logera, pendant la période des vacances scolaires de Noël 72 personnes, dont 47 enfants, hébergés jusqu'à présent dans 16 établissements scolaires de Lyon.

Raphaël Vulliez dresse un bilan des 10 ans de Jamais Sans Toit : "Alors en 10 ans, si je donne quelques chiffres, on a occupé plus de 200 établissements scolaires. On a dépassé le cap des 900 enfants qui ont été mis à l'abri dans les écoles, temporairement, le temps d'intégrer le circuit légal d'hébergement d'urgence. On pourrait se féliciter de ces chiffres, à l'origine notre objectif c'était à la fois de mettre à l'abri de toute urgence les enfants qui sont à la rue, de les repérer, de les mettre à l'abri temporairement la nuit dans les écoles et surtout d'alerter les pouvoirs publics afin que la loi soit appliquée. On peut faire le constat au bout de dix ans qu'on est devenu un peu un rouage d'un dispositif beaucoup plus global et ceci, par contre, on ne peut pas s'en satisfaire. C'est-à-dire que finalement on pallie les manquements des pouvoirs publics. Il y a de plus en plus d'écoles occupées et de plus en plus tôt. Cette année, on a occupé des écoles dès la rentrée scolaire et on n'a jamais un record à 26 écoles occupées. Alors on pourrait dire c'est bien, Jamais Sans Toi au niveau du maillage territorial fait son travail mais en fait c'est surtout parce qu'il n'y a pas assez de place d'hébergement d'urgence et que finalement on se retrouve à devoir faire le travail de l'Etat et des collectivités territoriales."

Plus de détails sur le nombre d'enfant dormant dehors à Lyon et la politique que mènent les écologistes dans la vidéo...


Bonjour à tous, bienvenue dans votre émission 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale, aujourd'hui nous recevons Raphaël Vulliez qui est le cofondateur du collectif Jamais Sans Toit, bonjour Raphaël Vulliez. Merci d'être venu sur notre plateau alors votre collectif Jamais Sans Toit fête ses 10 ans cette année, on le rappelle le cœur de votre action c'est de mettre à l'abri des enfants et leurs familles qui, dans l'établissement où ils sont scolarisés, ces enfants et familles sont sans-abris. Est-ce que vous pouvez, on va rentrer directement au cœur du sujet finalement, nous dire, faire un bilan de ces dix années . Comment a évolué le sans-abrisme des familles et des enfants de votre point de vue ?

Alors en 10 ans, si je donne quelques chiffres, on a occupé plus de 200 établissements scolaires. On a dépassé le cap des 900 enfants qui ont été mis à l'abri dans les écoles, temporairement, le temps d'intégrer le circuit légal d'hébergement d'urgence. On pourrait se féliciter de ces chiffres, à l'origine notre objectif c'était à la fois de mettre à l'abri de toute urgence les enfants qui sont à la rue, de les repérer, de les mettre à l'abri temporairement la nuit dans les écoles et surtout d'alerter les pouvoirs publics afin que la loi soit appliquée. On peut faire le constat au bout de dix ans qu'on est devenu un peu un rouage d'un dispositif beaucoup plus global et ceci, par contre, on ne peut pas s'en satisfaire. C'est-à-dire que finalement on pallie les manquements des pouvoirs publics. Il y a de plus en plus d'écoles occupées et de plus en plus tôt. Cette année, on a occupé des écoles dès la rentrée scolaire et on n'a jamais un record à 26 écoles occupées. Alors on pourrait dire c'est bien, Jamais Sans Toi au niveau du maillage territorial fait son travail mais en fait c'est surtout parce qu'il n'y a pas assez de place d'hébergement d'urgence et que finalement on se retrouve à devoir faire le travail de l'Etat et des collectivités territoriales.

On le rappelle vous n'êtes pas des travailleurs sociaux, les collectifs sont des parents d'élèves, des professeurs ou même des voisins qui se mobilisent, donc la démarche est totalement citoyenne ?

C'est une démarche totalement citoyenne, ce ne sont que des bénévoles qui donnent de leur temps, de leur énergie, qui parfois délaissent leur foyer et qui dépensent aussi des sommes d'argent. En ce moment, on est à 32 000 euros dépensés depuis la rentrée scolaire, rien qu'en nuits d'hôtel. C'est énorme. C'est deux fois plus que l'année dernière. Il faut saluer la générosité citoyenne. Dès qu'il y a un enfant à la rue, l'élan de solidarité ne faiblit pas depuis dix ans mais il vient pallier les manquements des pouvoirs publics et se substituer finalement au principe de solidarité qui est inscrit dans la loi. 

Et le droit au logement aussi. 

Effectivement, le droit à l'hébergement d'urgence est inconditionnel et ça a été réaffirmé par le conseil constitutionnel. C'est toujours la détresse qui prévaut, simplement il manque des places. Et puis on se retrouve dans une situation où pendant pas mal de temps il n'y avait pas de gouvernement.  On n'a pas encore de budget donc nous attendons que les budgets tombent pour pouvoir loger toutes ces personnes. En ce moment, on est à plus de 400 enfants à la rue.

Dans la métropole de Lyon c'est 400 enfants qui dorment dehors ou qui n'ont pas de solution officielle.

Tout à fait, c'est 400. Ça n'a jamais été aussi élevé. Si on compare avec l'année dernière c'est + 20% et si on compare à il y a trois ans c'est trois ou quatre fois plus. C'est vraiment un scandale. Un autre chiffre qui est quand même assez hallucinant : à Lyon il y a 216 enfants sans toit, et la moitié sont hébergés dans les écoles. Nous on n'a pas vocation à devenir un dispositif officiel d'hébergement d'urgence comme vous le rappelez, nous ne sommes pas des travailleurs sociaux et nous n'avons pas vocation.

C'est une situation qui devient pérenne et simplement c'est une compétence de l'État, il faut préciser l'hébergement d'urgence, cependant les collectivités aussi essayent d'avancer sur les sujets. A Lyon la majorité écologiste semble plutôt ouverte sur ces questions, en tout cas il y a un nouveau poste à la Ville je crois sur l'hébergement d'urgence qui a été créé il y a peu. Est-ce que ça a changé quelque chose la majorité écologiste aussi avec leur arrivée au pouvoir à la Métropole et à la Ville ?

Il faut rappeler effectivement que l'hébergement d'urgence incombe principalement à l'État. La Métropole prend en charge certains publics, les femmes isolées avec enfant de moins de trois ans et les femmes enceintes. Normalement les villes n'ont pas de compétence en matière d'hébergement d'urgence. La Ville de Lyon avait lancé un plan zéro enfant à la rue, le but c'était de dire on annonce un objectif à atteindre sinon on ne fera rien. Le seul levier sur lequel ils peuvent agir c'est en mettant du patrimoine municipal à disposition de l'Etat qui ensuite crée des places d'hébergement d'urgence, mais c'est vrai que c'est un petit peu limité. Alors je pense qu'avec la création d'une délégation à l'hébergement d'urgence qui est actuellement occupée par Sofia Popov à la Ville de Lyon, il y a une volonté de prendre à bras le corps cette situation en espérant qu'elle ait des marges de manœuvre, ce qui n'est pas simple.

On l'a dit la compétence de l'hébergement d'urgence c'est l'Etat. Un nouveau gouvernement a été nommé il y a peu avec François Bayrou ou un chrétien démocrate comme il l'a aussi dit. Est-ce que vous attendez quelque chose de particulier de ce gouvernement sur l'hébergement d'urgence ?

On attend qu'il augmente substantiellement le budget de l'hébergement d'urgence. Valérie Létard avait dans ses arbitrages essayé de faire valoir que comme cette année ça avait coûté 250 millions d'euros en termes d'hébergement d'urgence qu'on garde le même budget pour l'année d'après pour éviter qu'il soit insincère. Alors c'est un petit peu technique mais en gros pour que l'équilibre budgétaire soit à peu près respecté et qu'on ne se dise pas finalement on va créer tant de places d'hébergement d'urgence on met que 120 millions d'euros sur la table alors que ça va coûter tant. C'est aussi ce que préconise la cour des comptes il faut que le budget de l'hébergement d'urgence il soit réaliste et qu'on ait une vision un peu plus à un peu plus long terme pour éviter que déjà ça ne coûte cher à l'Etat puisque si c'est uniquement
financer des nuits d'hôtels c'est pas possible à long terme et c'est pas efficace. 

Effectivement merci beaucoup d'être venu sur notre plateau. Plus de détails sur l'actualité sociale et l'hébergement d'urgence sur le site lyoncapitale.fr à très bientôt. 

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