Anais Belouassa Cherifi
Anais Belouassa Cherifi

La députée LFI Anaïs Belouassa-Chérifi revient sur la polémique sur l'apologie du terrorisme

Anaïs Belouassa-Chérifi, députée La France Insoumise de la 1re circonscription du Rhône, est l'invitée de 6 minutes chrono.

La France Insoumise a déclenché une nouvelle polémique en proposant un projet de loi, par l'intermédiaire du député du Nord Ugo Bernalicis, pour abroger le délit d'apologie du terrorisme. "On répond à ce qu'on a pu voir sur le terrain et aux dérives aujourd'hui que peuvent avoir ce délit d'apologie du terrorisme envers notamment des opposants politiques, des militants politiques et même des militants syndicaux. Un des cadres de la CGT du Nord a été condamné quand même à un an ferme de prison avec sursis pour un tract. Est-ce que ça, c'est pas une dérive, en fait, dans un état de droit", Anaïs Belouassa-Chérifi.

La députée lyonnaise assure qu'elle votera la censure contre le gouvernement de Michel Barnier en cas de recours au 49.3 pour faire passer le budget : "la responsabilité, elle se porte vers EPR et vers le Rassemblement national qui joue la béquille de la Macronie. Et donc, moi, la motion de censure, elle est très claire. S'il y a motion de censure, on la votera".

La retranscription intégrale de l'entretien avec Anaïs Belouassa-Chérifi

Bonjour à tous et bienvenue, vous regardez 6 minutes chrono, le Rendez-vous quotidien de la rédaction de Léon Capitale et aujourd'hui nous sommes avec Anaïs Belouassa-Chérifi. Vous êtes députée la France Insoumise, élue sous l'étiquette Nouveau Front Populaire lors des législatives de juin dernier, députée de la première circonscription du Rhône qui englobe le cinquième et aussi quatre autres arrondissements. L'énumération serait trop longue, je voulais revenir avec vous avant de parler du budget, d'une éventuelle motion de censure, de l'avenir politique de Michel Barnier, revenir sur un élément qui fait beaucoup parler ces dernières heures, c'est une proposition de loi déposée par un député de la France Insoumise, monsieur Bernalicis, qui propose de revenir sur une loi de 2014 qui instituait le délit d'apologie du terrorisme. Vous voulez supprimer l'apologie du terrorisme ?


Il n'instituait pas l'apologie du terrorisme, en fait la loi de 2014 transfert le délit d'apologie du terrorisme dans le code pénal. Et le code pénal, vous savez comme moi, il est soumis au droit commun. Le délit d'apologie du terrorisme, avant il était dans la loi de presse 1881.


Qui est aussi pénal.


Non, c'est faux, vous le savez autant que moi parce que ça ne requiert pas les mêmes normes juridiques. En fait, le droit de presse, ça permet d'avoir comme le délit de crime une espèce de… En fait, je vais essayer d'être assez claire. Aujourd'hui, le transfert dans le code pénal, ça fait aujourd'hui que ce délit, il est dans le droit commun. Et donc tous les juges, par exemple, peuvent juger des faits terroristes. Sauf que le problème aujourd'hui, c'est qu'on manque cruellement de moyens et de relais dans la sphère anti-terrorisme. Le droit de presse, ça a préconisé que seulement les juges anti-terroristes pouvaient juger ces délits. Et quand vous jugez ces délits et que vous êtes un juge relatif à l'anti-terrorisme, vous êtes donc le seul compétent, le seul en lien avec les services pour pouvoir lutter contre l'anti-terrorisme. Nous, ce qu'on dit aujourd'hui, c'est que, en fait, de l'avoir instauré dans le droit commun, c'est que tout le monde, y compris des militants politiques, syndicaux, écologistes, sont attaqués pour ce délit. Et en fait, ça brouille les pistes et ça fait qu'aujourd'hui, on ne peut pas lutter contre le terrorisme. On l'a vu en 2014, c'était Bernard Cazeneuve qui avait fait cette proposition de loi. Ça n'a pas empêché, malheureusement, ce qui s'est passé en 2015, ces événements tragiques et dramatiques. ce qu'on dit, c'est que ce droit commun, il n'est pas soumis aux mêmes normes que le droit qu'ont les juges anti-terroristes, c'est-à-dire d'avoir des sujets très concrets d'être en lien avec les services. Et par exemple, si on veut lutter contre le terrorisme, on peut tout à fait remettre les moyens des services dédiés à cette question.


Ce qu'on entendait notamment de certains avocats, j'ai en tête Richard Malka, l'avocat historique de Charlie Hebdo, qui disait ça veut dire que si la proposition d'Ugo Bernalicis était adoptée, on pourrait dire ce qui s'est passé au Bataclan, c'était formidable...


Je pense que c'est de la petite polémique et vous avez un certain nombre de juristes, d'avocats et de par exemple Jacques Toubon, l'ancien défenseur des droits qui avait mis un point d'alerte sur cette question. Il avait dit, attention, si ça tombe dans le droit commun, ça peut avoir comme conséquence que tout le monde peut être attaqué pour cette question. Et donc, on ne va pas précisément sur les personnes qui potentiellement vont faire des actes terroristes. Ça veut dire qu'on a une multiplication des moyens au lieu d'avoir les juges antiterroristes qui sont dédiés à cette question, qui travaillent déjà avec les services de sécurité et donc qui ont une implication plus concrète pour lutter contre le terrorisme dans notre pays.


Est-ce que, d'une certaine manière, la France Insoumise, avec cette proposition de loi, ne se tire pas une balle dans le pied au moment où il y a des échéances importantes ? C'est-à-dire que vous cristallisez le débat là-dessus, alors qu'il y a cet enjeu notamment du budget, d'un éventuel 49.3, d'une éventuelle motion de censure. Est-ce que vous ne vous trompez pas de combat ?


Moi, je pense que chaque parlementaire peut déjà faire des propositions de loi qu'il souhaite. C'est ses compétences, vous voyez. Vous leur avez faite, vous ? C'était une de vos priorités ? Moi, je ne suis pas assez compétente sur ce domaine pour pouvoir dire si j'étais assez compétente pour faire cette proposition de loi. Hugo Bernalicis travaille sur les questions de justice, les questions judiciaires, et donc a travaillé depuis des années sur ces questions. Et donc, c'est juste que nous, en fait, on répond à ce qu'on a pu voir sur le terrain et aux dérives aujourd'hui que peuvent avoir ce délit d'apologie du terrorisme envers notamment des opposants politiques, des militants politiques et même des militants syndicaux. Un des cadres de la CGT du Nord a été condamné quand même à un an ferme de prison avec sursis pour un tract. Est-ce que ça, c'est pas une dérive, en fait, dans un état de droit ?


On va revenir sur la question du budget qui devrait être adopté par 49.3. Il y aura une motion de censure que vous déposerez. L'incertitude sur cette motion de censure, c'est la position du Rassemblement national. Est-ce que ça vous gênerait qu'ils en appuient finalement de vos voix pour faire tomber le gouvernement barbier ?

Moi, je pense qu'il y a un truc qu'on dit pas assez parce qu'on n'a pas d'analyse, enfin, que personne analyse la séquence budgétaire qu'on vient d'avoir. Alors, le gouvernement est arrivé durant cette séquence budgétaire en disant nous, on veut faire 60 milliards d'économies dans ce budget. D'accord ? Alors nous, la France Insoumise a été le groupe politique qui a été le plus assidu à l'Assemblée nationale et nous avons montré à quel point on était en capacité de faire un contre-budget. C'est ce qui s'est passé. Vu que EPR, donc le groupe macroniste, était absolument pas présent, 10% d'assiduité quand même sur leur banc, c'est quand même une catastrophe pour un groupe politique avec la majorité présidentielle. Et donc nous, nous avons réussi à faire passer un certain nombre de mesures. Une toute simple, la taxe Zucman. La taxe Zucman, en fait, elle prévoit de taxer à hauteur de 2% les patrimoines supérieures d'un milliard d'euros. Donc cette taxe, elle permettait d'avoir 26 milliards de recettes. Donc ça, c'est un budget, c'est des choix politiques. Nous avons fait le choix politique de faire peser et d'avoir un intérêt général dans ce budget, c'est-à-dire demander aux plus riches de notre pays d'aider et de contribuer à l'effort collectif. Le gouvernement, il fait quoi ? Il dit non, on ne va pas revaloriser les retraites en janvier, on va déplacer en juillet. Voilà, ça, c'est les choix politiques de ce gouvernement. Et nous, nous ne sommes pas d'accord. Et ce qui s'est passé dans l'hémicycle, c'est que le Rassemblement national et la majorité, le socle commun, comme on peut l'appeler, a voté contre le budget, contre le budget dans lequel nous avons fait des mesures de justice sociale, de justice fiscale. Et donc, en réalité, la responsabilité, elle se porte vers EPR et vers le Rassemblement national qui joue la béquille de la Macronie. Et donc, moi, la motion de censure, elle est très claire. S'il y a motion de censure, on la votera. Pourquoi ? Parce que nous, on a été en capacité d'avoir un contre-budget, d'avoir des contre-propositions, de combler le déficit public que les macronistes ont fait depuis sept ans. Et nous, on a des propositions de justice fiscale et de justice sociale.

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