Près de trente ans d’existence, et seulement deuxième concert lyonnais (après les Nuits de Fourvière en 2018) pour les Écossais de Belle & Sebastian, formation gentiment culte sur le flanc de la pop ouvragée, inventive et fragile. Autant dire un événement pour quelques wagons de fans enamourés.
Formation modestement culte, aussi discrète qu’infiniment talentueuse, on ne peut pas dire qu’en près de trente ans d’existence, le groupe pop écossais Belle & Sebastian ait beaucoup gâté ses fans lyonnais par sa présence en live. Il avait même fallu attendre 2018 et l’amphithéâtre aimantant des Nuits de Fourvière pour que la bande de Stuart Murdoch se fende d’un passage dans la capitale des Gaules. Laquelle avait été accueillie avec émotion par les fans de toujours, moins nombreux que la colonie de suiveurs des BTS, mais malgré tout importante et surtout connaisseuse.
Au vrai Belle & Sebastian a vécu au diapason de la personnalité de son héraut très discret, esthète fragile et fatigué chronique (il souffre de la maladie appelée encéphalomyélite myalgique, ce qui l’empêche, dans sa jeunesse, d’étudier mais visiblement pas de composer) dont on était à l’époque à peine surpris d’apprendre qu’il avait fondé son groupe dans une église.
Nous sommes alors au mitan des années 90 et toute la (Grande-)Bretagne est occupée par la britpop, ses mélodies un peu rétros, ses guitares rugissantes, ses coupes de douilles et ses pénibles concours d’ego. Toute la Bretagne sauf le dénommé Stuart Murdoch, donc, qui, réfugié au premier étage d’une église dont il est le gardien et dont il se sert comme terrain d’expérimentation et studio d’enregistrement, résiste à l’envahisseur.
Tigermilk
Originaire d’Ayr, un port du sud-ouest écossais, il grandit dans la banlieue de Glasgow, où il fait office d’enfant de chœur (l’église est donc un terrain connu) et joue beaucoup de piano. Plus tard, il est tour à tour DJ, vendeur dans un magasin de disques et même représentant en bacon (un métier qui n’existe probablement qu’en Grande-Bretagne). Dans l’enfer britpop, Murdoch fait office de chérubin, il préfère l’isolement et la solitude des livres aux roulements d’épaule et aux “fucking fuck” balancés à la télévision. Il n’a le verbe haut (mais châtié) que dans ses chansons, dont il entame l’écriture pour pallier l’échec de ses études. Il les livres au départ en solo sous diverses appellations (dont La Pastie de la bourgeoisie, qui sera plus tard le titre d’un de ses morceaux).
Un soir dans un bar, il rencontre un type qui a la particularité d’être musicien et d’avoir le même prénom que lui : Stuart David. Les deux fondent Belle & Sebastian, du nom d’un roman de la Française Cécile Aubry, bien connu notamment pour son adaptation en série télé. Les deux recrutent un quatuor de musiciens d’où émergera rapidement la voix enfantine d’Isobel Campbell.
Le groupe est vite remarqué par un étudiant qui non seulement chasse des talents pour un jeune label, Jeepster, mais participe à un programme qui édite chaque année, comme un projet de fin d’études, le travail d’un artiste, en général un single. Belle & Sebastian est si convaincant qu’on lui propose carrément l’édition d’un album à mille exemplaires, qui aura pour titre Tigermilk et préfigurera tout le programme (y compris tardif) du groupe. Le disque tourne à la radio mais est évidemment rapidement sold out et devient une rareté si bien que pas grand monde ne l’a écouté (en France, personne) quand le groupe publie son deuxième disque, considéré comme son premier album : If You’re Feeling Sinister.
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