35 heures - Ces collectivités qui sont hors-la-loi

Temps de travail. Dix ans après le décret du 25 août 2000, relatif à l’aménagement et la réduction du temps de travail dans la fonction publique, la Ville de Lyon et le Grand Lyon ne respectent toujours pas la loi. Dans ces deux collectivités, les agents travaillent… moins que le minimum légal.

La loi est pourtant claire et a été rappelée par une décision du Conseil d’État du 9 octobre 2002 : “la durée annuelle du travail de 1600 heures dans la fonction publique territoriale constitue un plancher” (1). C’est-à-dire une limite minimum qu’il ne faut pas franchir. Pourtant, à la Ville de Lyon, on travaille 1568 heures par an au lieu des 1607 heures prévues par la loi. Les agents de la municipalité bénéficient de 27 jours de congés au lieu de 25, de 15 jours de RTT et, cette année, de 3 jours “du maire”. “Normalement, Gérard Collomb accorde un jour de congé en plus à ses agents. Cela a été institué depuis des années. Mais, compte tenu du fait, qu’en mai, les 4 jours fériés tombent un samedi, il a souhaité leur donner deux jours de plus. Une façon de compenser !”, explique Marc Dupont, directeur adjoint en charge des ressources humaines à la Ville de Lyon.

Au Grand Lyon, l’histoire se répète. Les 4600 agents de la communauté urbaine travaillent, en moyenne, 1575 heures par an. Une durée annuelle de travail en deçà du “plancher” minimum légal de 1607 heures. D’après Christine Prieur, déléguée générale adjointe en charge des ressources humaines au Grand Lyon, les congés accordés seraient de 27 jours au lieu de 25, de 15 jours de RTT, de 3 jours supplémentaires donnés par le Président ainsi que de 2 jours fractionnés.

Gérard Collomb a-t-il voté la loi sur les 35 heures ?

Instituée par Martine Aubry, au début des années 2000, la loi sur les 35 heures de travail hebdomadaire a fait grand bruit. La France a été divisée en deux entre partisans et opposants. Les derniers ayant dû s’y résoudre. À la Ville de Lyon et au Grand Lyon, on semble avoir été épargné par ces débats. Les élus auraient-ils entendu parler de cette fameuse loi du 3 janvier 2001 qui aménage et réduit le temps de travail des collectivités territoriales, applicables aux agents de l’état ? Il semblerait pourtant que Gérard Collomb, sénateur-maire de Lyon, ait examiné, débattu puis voté la loi sur les 35 heures au palais du Luxembourg.

Des avantages acquis avant 2001

Alors comment explique-t-on ces “générosités locales” ? à l’hôtel de ville, on met en avant le fait que “des règlements, propres à la ville, et antérieurs aux 35 heures, ont perduré au-delà de la mise en place de la loi”. “Mais nous ne sommes pas les seuls à faire ça ! Il y a bien d’autres communes françaises qui ont attribué des jours de congé en plus, en fonction des coutumes locales”, ajoute Marc Dupont. Au Grand Lyon, cela correspond également à “des avantages acquis avant 2001”. Au sein de ces deux collectivités, la situation semble être tout à fait normale. “Nous sommes en conformité avec la loi sur l’ARTT”, assure avec un certain aplomb Christine Prieur, du service des ressources humaines du Grand Lyon, “sauf qu’on a trois jours de congés en plus. Ce régime est très proche de celui des 1607 heures annuelles.” Dans les bureaux de l’hôtel de ville, on affirme même que l’on respecte strictement la loi sur les 35 heures.

La Ville de Lyon et le Grand Lyon semblent aujourd’hui à l’abri de toute menace. Seul Michel Vergnaud, le président de la Canol, s’émeut encore de cette situation qui perdure : “Nous sommes dans une République où l’on ne respecte pas les lois que l’on vote. Tout le monde s’en fout ! À l’époque, j’avais alerté le préfet, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, et Dominique Perben, le Garde des Sceaux. Mais personne n’a bronché.” D’après les calculs de cet ancien salarié d’IBM (réactualisés en fonction du nombre de fonctionnaires en poste en 2008), ce non-respect de la loi coûterait une petite fortune aux contribuables lyonnais. 3,4 millions d’euros par an pour les 3 jours de congé supplémentaires accordés par la Ville de Lyon. L’équivalent de 24 000 jours d’absences payés par la collectivité, soit une centaine de postes de travail. Et 2,5 millions d’euros chaque année au Grand Lyon, ce qui représente 60 postes de travail et 13 800 jours d’absences.

(1) Les 7 heures supplémentaires ont été instaurées en 2004 avec la journée de solidarité en faveur des personnes âgées.

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Le département du Rhône et Écully ont corrigé le tir

Depuis qu’elles ont été condamnées par le tribunal administratif, ces deux collectivités font désormais travailler leurs agents 35 heures. Bonnes élèves, elles se sont pliées à la décision des magistrats. Pourtant, avant le jugement du tribunal administratif de septembre 2003, le Conseil général du Rhône avait passé des accords avec les représentants du personnel particulièrement favorables pour eux. Le protocole prévoyait 9 jours de congés en plus de ce qu’exige la loi. Soit 1533 heures travaillées au lieu de 1600 heures. À Écully, les fonctionnaires étaient également bien lotis. Le protocole d’accord avait entériné un jour de congé supplémentaire pour 5 années de service dans la fonction publique. Ce que la loi n’envisage pas. Mieux, le maire de la bourgade accordait 3 jours de congé supplémentaires par an “eu égard à l’implication du personnel dans la réflexion sur le nouveau fonctionnement des services”.

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