Une délibération qui attribuait une subvention de 20 000 euros à l’association Montanea s’est bizarrement retrouvée en commission Lycées du conseil régional. Pour Corinne Morel-Darleux, élue du rassemblement Citoyens, Écologistes et Solidaires (RCES), qui a fait parvenir au procureur de la République des éléments concernant des soupçons de prise illégale d’intérêt à l’encontre de Gilles Chabert, le président de la commission Montagne, “cela ressemble à un aveu”. Entretien.
Lyon Capitale : Comment avez-vous découvert que la subvention de 20 000 euros à l'association Montanea, votée en novembre dernier, était évoquée en commission Lycées ?
Corinne Morel-Darleux : Monique Cosson, notre élue qui siège à la commission Lycées, m'a alertée sur le fait qu'il y avait un rapport concernant l'association Montanea : un des sujets sur lesquels j'avais saisi le procureur de la République concernant des soupçons de prise illégale d'intérêts.
Il se trouve qu'une délibération propose d'annuler la subvention votée en commission Montagne et de la réaffecter via la commission Lycées. Ce qui en réalité permet à M. Chabert de ne plus être la personne qui attribue la subvention, donc de sortir du potentiel conflit d'intérêts dans lequel il est, puisqu'il est également membre du bureau de l'association Montanea.
En tant que membre de ce bureau, il n'aurait pas dû participer à l'instruction du dossier. Quand le dossier a été discuté, il présidait la commission Montagne et était donc sous le coup d'une double casquette un peu embarrassante.
Ces nouveaux éléments vont-ils être transmis au procureur de la République ?
Cela fait, coup sur coup, deux changements de pied de M. Chabert. Le premier, c'est qu'il a démissionné de son poste d'administrateur à la Compagnie des Alpes, qui était un des points que nous avions soulevés. Et là, une délibération revient sur l'attribution de la subvention et permettrait à M. Chabert de ne plus être dans le circuit qui l'attribue. Pour moi, cela va plutôt dans le sens de nous donner raison à propos de ces soupçons de prises illégales d'intérêt que nous avions relevés.
Nous allons donc verser cela au dossier que nous avons déposé au procureur de la République afin que la justice s'empare de ce dossier et se saisisse ou non de l'affaire. Notre rôle n'est pas de juger, mais d'apporter ces pièces à l'information de la justice, mais aussi des citoyens électeurs, qui ont le droit de savoir ce qu'il se passe à la Région avec leurs élus, et surtout avec l'argent public.
Gilles Chabert a-t-il donné des explications ?
Jusqu'ici, la ligne de défense de M. Chabert était de dire qu'il n'avait pas présidé la commission au moment où le dossier Montanea avait été présenté. Or, le compte rendu de la commission du mois de novembre dernier précise le contraire. Je me souviens moi-même, puisque je siège à cette commission, que c'était lui qui la présidait à ce moment-là.
C'est vrai que ce n'est pas lui qui a présenté le rapport, mais il est faux de dire qu'il ne présidait pas la commission. Cette ligne de défense ne tenait pas, puisque nous avons les comptes rendus de ces commissions et ces documents tiennent lieu de procès-verbaux. Peut-être essaye-t-il un autre circuit pour se dégager de ces chausse-trappes dans lesquelles il s'est mis lui-même.
Ce vendredi, nous sommes en commission Montagne et nous verrons si M. Chabert en parle. S'il ne le fait pas, j'en parlerai, car je considère que ça fait partie de mon devoir d'élue.