Plus de 200 militants et sympathisants de Jean-Luc Mélenchon étaient attendus pour la soirée électorale à la salle de spectacle Le Croiseur, le QG lyonnais de La France Insoumise. Malgré la défaite de leur candidat, les partisans de Jean-Luc Mélenchon ont fêté avec plus ou moins d’entrain son score de 19,6 % jusque tard dans la nuit.
À 19h, l’ambiance est tendue chez les quelques militants de La France Insoumise déjà réunis au Croiseur. Dans la salle, un écran géant retransmet le direct de BFMTV. "Je regarde plus les infos, ça me déprime", lance une jeune femme. "T'as raison, c'est pire que les résultats du bac", lui répond, goguenard, un sympathisant en veste de cuir. En terrasse, on s’échange les derniers chiffres annoncés par la RTBF, sans leur donner de crédit. Les clopes s’enchaînent. “Je suis stressé depuis ce matin, j’ai hâte que ça se termine !” s’exclame un adhérent. Certains font déjà un passage à la buvette tout juste ouverte pour tenter de se calmer les nerfs. Les yeux fixés sur son smartphone, un militant rigole : “Radio Londres vient de l’annoncer : la rose est dans les choux !”
En quelques dizaines de minutes, les militants arrivent par groupes de quatre ou cinq, jusqu'à avoisiner la centaine. “On attend plus de 200 personnes”, précise Emmanuel Mourier-Rouland, cosecrétaire du Parti de gauche et organisateur de la soirée. À 20h, tous se pressent devant l’écran géant pour voir le résultat des élections. La déception est palpable quand apparaissent les visages de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron. Des huées s’envolent vers l’écran : “Vendu !” “Fasciste !” Quelques secondes plus tard, les 19,6 % de Jean-Luc Mélenchon provoquent les vivats de la foule. “Tu as vu ? On était à ça de réussir !” “Bon, maintenant, on a deux options : boire ou pleurer”, plaisante un militant en s’éloignant vers le bar.
“Moi j’irai voter blanc, je refuse de donner crédit à l’un ou l’autre”
Une défaite, vraiment ? Pour Emmanuel Mourier-Rouland, il y a de quoi trouver du réconfort malgré ce revers : "On double les voix depuis 2010, la stratégie est la bonne. Et vous avez vu la moyenne d’âge ? La majorité des adhérents sont jeunes, et viennent de tous les milieux !” Alors, pourquoi cette défaite ? "La dernière semaine, c'était une catastrophe, déplore-t-il. Il y a eu un travail de sape dans les médias. Et le vote utile a encore joué..." Au bar et en terrasse du Croiseur, les avis divergent. Certains fustigent l’alliance manquée entre Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon, d’autres le boulevard médiatique offert à Macron par les grands titres de la presse. “Au moins, Fillon va aller en prison”, coupe un militant en maillot de l’équipe de France, provoquant quelques éclats de rire.
Au QG de La France Insoumise, on s'interroge : et maintenant ? "Maintenant, il faut penser aux législatives", répond un militant. "On n’a pas le choix, il faut continuer la lutte aux élections intermédiaires", abonde un second. Sur France 2, un militant France Insoumise appelle à voter Macron pour faire barrage à Le Pen, il est aussitôt sifflé par quelques voix dans la foule. "Moi, j'irai voter blanc, je refuse de donner crédit à l'un ou l'autre", justifie un sympathisant. À l'extérieur de la salle, des militants entament a capella le chant des résistants italiens Bella Ciao.
“On va tous aller en Martinique !”
“Chut, Manuel Bompard va prendre la parole !” Devant l’écran géant, la foule a tu son brouhaha pour laisser la parole au directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, retransmis en direct sur Youtube depuis le QG parisien : “Les estimations données à cette heure font état d’une très forte incertitude sur les résultats du deuxième tour à l’élection présidentielle (...). Les calculs qui sont les nôtres et les projections sur la base de ces résultats font état d’un écart entre les différents candidats, notamment entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen de près d’un point seulement.”
La déclaration est accueillie à grands cris et par des applaudissements au QG lyonnais. Reprenant espoir, les militants scandent de nouveau "Résistance !" en chœur. À 22h, la foule écoute studieusement l’allocution de Jean-Luc Mélenchon, et applaudit à tout rompre son discours, où le candidat conseille d’attendre les résultats finaux de minuit.
Si, à l’heure dite, la centaine de personnes encore présente continue de commenter, entre deux pintes, le résultat de l’élection, l’espoir n’y est plus. Pourtant, l’ambiance reste joyeuse. “On est encore là pour un bon moment”, prévient une des barmen. Dans un coin de la pièce, deux sympathisants se sont approprié un piano pour en tirer quelques notes à trois mains. Sur l’écran géant, les présentateurs télé annoncent encore les résultats outre-mer : 27,37 % en Martinique pour Jean-Luc Mélenchon. “C’est peut-être ça, la solution, on va tous aller en Martinique !”
Alors pourquoi tant d'amertume de la part de Mélenchon ?