Europe Ecologie/Les Verts : "renaissance" de l'écologie politique

REPORTAGE - Un nouveau parti est né. Europe Ecologie/Les Verts propose de refonder l'exercice de la politique. Le mouvement Europe Ecologie initié il y a deux ans par Daniel Cohn-Bendit entame un nouveau cycle qui n'est pas sans poser quelques difficultés.

La famille française de l’écologie politique s’est rassemblée ce samedi à Lyon lors des Assises nationales d’union entre Europe Ecologie et Les Verts. "Europe Ecologie/Les Verts", c’est d’ailleurs le nom qu’ont donné les militants avec 53,19% des voix à cette nouvelle force politique qui, en l‘espace de deux ans, s‘est imposée dans la roue du Parti Socialiste. Chacun, Nicolas Hulot en tête, salue le chemin parcouru depuis les journées d‘été des Verts à Toulouse en 2008 où ce nouveau mouvement n‘était qu‘embryonnaire et était âprement discuté suscitant irritations, crispations et incompréhensions. Après les deux bons scores électoraux des européennes (16,28%) et des régionales (12,2%), les Assises de Lyon signent la fin d‘un cycle politique pour Europe Ecologie. "C‘est un jour de renaissance" s’est d’ailleurs exclamée Cécile Duflot, la secrétaire nationale des Verts et future secrétaire nationale du nouveau parti.

Mais en même temps qu’elle démultiplie perspectives et espoirs, une re-naissance expose dans les mêmes proportions à l’échec. "En espérant qu’à l’avenir, vous ne soyez pas une vulgaire offre supplémentaire" sur l’échiquier politique a prévenu un Nicolas Hulot qui reste toujours à l’écart, se fondant de plus en plus dans le rôle de conscience morale autoproclamée des écologistes français. "Vous avez une occasion historique de redonner du désir à ceux qui se sont éloignés de la noblesse de la politique", a-t-il poursuivi. Car les intentions de la fusion d’Europe Ecologie et des Verts est d'inaugurer une ère nouvelle dans la fabrication du politique et de ses pratiques : "créer le premier parti politique coopératif de l’histoire", selon Cécile Duflot. Rien de moins.

Coopérateurs et tirage au sort

"Les partis ont peu d’adhérents", constate la secrétaire national du parti, "y compris les Verts", quand Europe Ecologie a, selon elle, mobilisé 35.000 personnes. Philippe Meirieu, lui, perçoit les partis traditionnels comme "des machines destinées à organiser des carrières politiques et à réguler la compétition pour les places." ll ne le dit pas, mais les Verts sont eux aussi tombés dans ce travers, prisonniers de luttes d’égos et de courants, concernés aussi par le cumul des mandats. Avec Europe Ecologie/Les Verts, les uns et les autres entendent se fixer de nouvelles règles et, selon Meirieu, mettre au cœur de leur fonctionnement "la probité des engagements individuels et collectifs."

"C’est un parti et un réseau coopératif", expose Cécile Duflot, à propos de cette nouvelle formation. Cet OVNI politique doit répondre "à une frilosité vis-à-vis de l’engagement partisan." Pour ce faire, sera créé, entre les adhérents et les sympathisants, le statut de "coopérateurs." Ceux-ci vont participer aux travaux de réflexion, pourront voter lors de débats thématiques. Ils ne participeront pas à la désignation des candidats, mais pourront gagner l’investiture du parti et se présenter aux élections. "A la condition qu’ils ne soient pas membres d’un autre parti", précise Meirieu. "C’est une passerelle vers l’engagement approfondi", souligne Duflot.

En plus des coopérateurs, l’autre innovation consiste à l’établissement du tirage au sort et sur la base du volontariat de 20% des membres des instances du futur mouvement. Un procédé qui rappelle la Grèce Antique qui, s’il n’est pas antidémocratique, remet en cause le principe de l’élection. Ce tirage au sort serait utilisé dans les instances de réflexion, pour trancher une position commune. Il n’est toutefois pas question de l’utiliser pour choisir un candidat. "C’est un moyen de donner la parole à ceux qui ne sont pas dans une logique de carrière, à ceux qui ne jouent pas des coudes pour parler", explique Philippe Meirieu qui reconnait avoir été réticent au début. Selon lui, avec ce système, "les calculs politiciens de courant tombent", puisque le résultat final ne peut être anticipé.

Ces propositions ont un air de déjà-vu. Elles viennent après les modes déçues et épuisées par le marketing politique de la démocratie participative et des forums citoyens formés en 2007 par Ségolène Royal et Désirs d’Avenir. Les écolos sont convaincus d’en avoir tiré les leçons et de pouvoir éviter les écueils de l‘illusion participative. "L’intérêt de la coopérative, c’est d’aller vers les citoyens. Il nous faut une structure où on écoute le citoyen et si on écoute, d’être capable de changer nos propositions. Les partis politiques ont fait une erreur en pensant que la démocratie participative, c’est la démocratie" a martelé Daniel Cohn-Bendit. "Désirs d’avenirs, c’était des débats gadgets. Il faut donner une valeur décisionnelle aux propositions des citoyens", ajoute Michèle Rivasi.

La gauche ?

L’autre difficulté et futur enjeu pour le nouveau parti réside dans la définition de ses relations avec le reste des partis de gauche. Europe Ecologie cultive l'équivoque sur ce point. Quand Cécile Duflot réaffirme son ancrage à gauche, Daniel Cohn-Bendit plaide pour sortir sortir du clivage bipartisan. D’autres, comme le Modem de François Bayrou, s’y sont essayés avec quelque infortune. "Le rôle politique d’Europe Ecologie est de rassembler au-delà de la gauche pour gagner face à Nicolas Sarkozy. La force politique capable de rassembler au-delà de la gauche, et non pas contre la gauche traditionnelle et radicale, c’est l’écologie politique", clame Daniel Cohn-Bendit.

Mais il y a quelque chose d’insoluble dans ce contrat de rassemblement. Car en n'excluant a priori ni la gauche traditionnelle (PS, PCF, PRG), ni la gauche radicale (NPA, Parti de gauche), ni même le centre (Modem), Europe Ecologie propose un contrat de rassemblement impossible tant les antagonismes partisans et idéologiques de ces différents mouvements politiques sont enracinés. Les logiques électoralistes dicteront sans doute les alliances futures. Mais la visée du nouveau parti n'est pas de subir les alliances électorales, mais au contraire de les organiser: Europe Ecologie/Les Verts "a vocation à devenir majoritaire et pas une force de contestation" dit Cécile Duflot. Avant d'y parvenir, il faudra démontrer que toutes ces difficultés ne sont pas insurmontables.

Lire aussi : Ecologie : un mutant politique va naître samedi à Lyon

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