Francois Hollande Vaulx en Velin
©Tim Douet

François Hollande à Vaulx-en-Velin, un retour très mitigé

Cinq ans après sa dernière visite comme candidat, François Hollande est revenu à Vaulx-en-Velin comme président pour célébrer les 40 ans de la politique de la ville.

Francois Hollande Vaulx en Velin ()

©Tim Douet

"François président !". C'était le 6 avril 2012, à J-16 du 1er tour des élections présidentielles. Le candidat Hollande était en visite à Vaulx-en-Velin, première ville d'un périple de deux jours dans les banlieues et quartiers populaires français. Vaulx-en-Velin, ville symbole du malaise des banlieues et de la politique de la ville.

Cinq ans plus tard, mardi 21 mars 2017, derrière un impressionnant cordon de sécurité et de barrières "Vauban", Yacine et ses copains lancent un "Hollande fous le camp !". Le président n'entend pas. Il écoute poliment quelques commerçants du Mas du Taureau triés sur le volet (pas trop revendicatifs) qui voudraient que l'image de la ville change, que les travaux de rénovation urbaine engagés avancent plus vite, que le tramway arrive ("vers 2023, 2024, 2025" soufflera plus tard Jean-Paul Bret, maire de Villeurbanne et membre du Sytral, organisateur des transports dans le Rhône).

"Souhaiteriez-vous que votre enfant grandisse ici au Mas du Taureau, monsieur le président ?" lance, bravache, l'un deux. Le président ne répond pas. Hélène Geoffroy, la secrétaire d'Etat à la ville et ancienne maire de Vaulx-en Velin, prend François Hollande par le bras pour lui présenter le projet de rénovation urbaine du quartier.

François Hollande s'intéresse, pose des questions. Car Vaulx-en-Velin n'est "pas un territoire comme les autres" explique-t-il. "C’est un territoire qui a une histoire et qui est intimement liée à celle de la politique de la ville, qui a aujourd'hui quarante ans. Quarante ans de politique urbaine, de politique sociale, de politique au service des quartiers et des habitants. C’est une politique qui a pu avoir des succès, mais aussi des insuffisances, parfois des ratés, mais qui a néanmoins changé profondément l’environnement, la manière de vivre et aussi d’habiter ici dans ces villes."

À écouter les habitants, mères au foyer, commerçants, jeunes au chômage, lycéens, anciens, ce sont plus les insuffisances et les ratés qu'ils retiendront. «"La rénovation urbaine, les plans banlieue ? C'est un coup de peinture et du sparadrap dans le paysage. Rien n'a changé, on n'a pas de boulot. Ce qu'on voit, ce sont les fins de mois difficiles et ce qu'on a dans notre assiette tous les jours !"

Quelques dizaines de minutes plus tard, François Hollande fera stopper le long cortège présidentiel (au grand dam du groupe de sécurité de la présidence de la République) pour prendre un "bain" de foule d'une trentaine de personnes au pied d'une barre d'immeubles.

"Est-ce que vous travaillez dur monsieur le président?"

Il visite ensuite le chantier de la future école modulaire René-Beauverie, présentée comme "l'école du futur", avec la mise en place d'une classe mobile numérique. "Est-ce que vous travaillez dur ?" demande un élève de CE1. "Ah...oui !" rigole François Hollande. Sourire général. "Est-ce que la France se porte bien ?" lance un autre. "Oui, répond le président. J'essaie de la soigner mais elle n'était pas malade. Elle doit simplement être mieux portante." Les visages se font soudainement plus graves.

Derrières les barrières, des habitants non munis de leur badge "INVITÉ" se font entendre. "On a des choses à vous dire nous aussi !".

Le cortège repart, toutes sirènes allumées. Direction le Planétarium où François Hollande doit s'entretenir avec.... l'astronaute français Thomas Pesquet sur la station spatiale internationale ISS. "Vous nous rendez l’humanité plus proche, nous savez que la planète doit être protégé. Je vous attends à l’Élysée, et même si je n’y suis plus, vous verrez le prochain président. Et moi, j’irai en Normandie pour vous voir".

"Les politiques, c'est fini!"

Francois Hollande Vaulx en Velin ()

©Tim Douet

Sur la place de la Nation, bloquée par les CRS et hautement surveillée par un sniper perché sur le toit de l'Hôtel de Ville (qui déclenche des hurlements d'une trentaine de gamins venus voir François Hollande), policiers et RG sont sur les dents. Ça chahute tranquillement dehors. "J'veux mon selfie moi !" lâche une jeune fille, sac Vuitton au bras et Adidas Originals Superstars aux pieds. "Regardez...Y'a pas d'la famille bogosse là ?" en désignant ses trois copines, hilares. À quelques mètres de là, à l'arrivée du directeur départemental de la sécurité publique du Rhône, Lucien Pourailly, les plus petits crient "oh ! Mate le colonel", "colonel ! Colonel !". Deux courageux demandent s'ils peuvent faire un selfie. Un policier en civil répond du tac au tac, plaisantin. "Après, vous faites des bêtises sur les réseaux sociaux !".

Plus en retrait, les "anciens", résignés. "J'ai voté Hollande, qui nous avait promis la Lune. Le PS, c'est terminé !" décoche Hamzed. Et Mohammed de renchérir : "les politiques, c'est fini !"

Un peu plus tard, à un bâtiment d'ici, à l'ENTPE, devant un amphithéâtre plein, François Hollande fera son dernier discours de président à Vaulx-en-Velin.

"Ce que l'on fait, c'est à l'échelle d'une génération. C'est que tous ces jeunes qui sont à l'école aujourd'hui, qui seront adultes demain, auront une autre ville. La même mais transformée. C’est ce à quoi les élus, tous ceux qui sont ici, les fonctionnaires qui y travaillent et puis tous les acteurs économiques, doivent contribuer à bâtir. (…) Il faut être curieux du monde, curieux de ce qui est au-delà de nous, curieux de ce qui va au-delà de notre ville, même pour vous qui avez la volonté de la changer et de la promouvoir. Il faut être capable de nous dépasser, de porter un projet qui va bien au-delà de notre génération, peut-être même de notre vie, bien au-delà de ce qu'est notre espace de vie momentanée, être capable d'être davantage que des individus mais des citoyens, de porter une volonté, une ambition qui nous rendent fiers, et c'est ce qui se passe ici à Vaulx-en-Velin."

Pendant ce temps, à cent mètres à vol de sniper, les élèves du lycée Robert Doisneau s'étaient mis en grève. "48% d'élèves en plus en 5 ans, 0% de moyens en plus". À Vaulx-en-Velin, c'est toute la politique du gouvernement qui a été critiquée ce mardi 21 mars 2017.

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