Alors que les citoyens, année après année, se détournent des urnes, le référendum d’initiative citoyenne a rapidement émergé du mouvement des Gilets jaunes pour tenter de redynamiser une démocratie en laquelle beaucoup d’entre eux ne croient plus et dont ils sont devenus les passagers clandestins depuis une vingtaine d’années. La plupart avouent alterner entre vote extrême, vote blanc et abstention.
Les Français et leurs responsables politiques entretiennent une relation ambiguë avec le référendum. Les torts sont partagés. En 1969, le général de Gaulle a définitivement quitté le pouvoir après avoir sollicité des Français leur avis sur la régionalisation. Les électeurs s’étaient moins prononcés sur l’aspect institutionnel qu’ils n’avaient fait savoir qu’ils voulaient changer d’ère, un an après Mai 68. Les politiques abordent depuis l’outil référendaire avec une grande circonspection, estimant que les citoyens ne répondent pas à la question posée mais se prononcent sur le sort de celui qui la pose. Cette arme à double tranchant n’est plus utilisée qu’avec une extrême précaution. “Nos gouvernants pratiquent le référendum de la façon la plus délétère possible. Ils l’utilisent pour faire consentir les gens à des décisions qu’ils ont déjà prises. Demander de dire oui ou non en bloc, c’est l’usage le plus pauvre du référendum”, s’étrangle Gil Delannoi, directeur de recherche au Cévipof. Du côté des électeurs, le traumatisme est arrivé quarante ans plus tard. Trois ans après avoir rejeté par référendum le traité constitutionnel européen, les Français ont vu le projet adopté par le Congrès. Parmi les Gilets jaunes présents sur les ronds-points, ils sont nombreux à ne pas avoir digéré ce contournement de leur vote. Mais ils n’en veulent pas à l’outil, qu’ils désirent au contraire renforcer. Ils focalisent leur colère sur ceux qui l’ont utilisé.Il vous reste 72 % de l'article à lire.
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