Entre “enracinement” et “excellence”, Marion Maréchal a présenté ce vendredi son école, l’Issep (Institut de sciences sociales, économiques et politiques). Elle dit vouloir y proposer “une alternative éducative au monde intellectuel supérieur”. Une alternative bien marquée à droite et un véritable projet politique.
56 rue Denuzière, non loin de l’hôtel de région, la devanture noir, or et blanc de l’Issep est prête. Un fourgon de police surveille les lieux, à quelques mètres de ce qui ressemble à une entrée de garage. À l’intérieur, les locaux, neufs, sont plutôt sombres. Dans la salle de classe, Patrick Libbrecht, le président honoraire, et Patrick Louis, coprésident du conseil scientifique, présentent la nouvelle école devant une bannière portant le slogan “Excellence, éthique, enracinement, engagement”.
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“Nous souhaitons former les entrepreneurs de demain (…) et créer des personnalités, car aujourd’hui la différence se fait sur les personnalités et les valeurs qu’elles défendent”, débute le président honoraire. Patrick Louis, père de la conseillère régionale Anne Lorne, insiste sur la “volonté de l’établissement d’élaborer un projet de formation qui soit en adéquation avec les besoins des entrepreneurs et des collectivités”. Un projet basé sur “un enracinement et sur la culture générale”.
“Enracinement”
De son côté, Marion Maréchal s’est félicitée d’avoir déjà reçu “60 préinscriptions en magistère et 160 en formation continue”. Selon la cadette de la famille Le Pen, 120 professeurs ont aussi candidaté pour assurer des cours à l’Issep. Se défendant à plusieurs reprises d’avoir un projet politique avec cette école, elle a tout de même admis qu’il s’agissait d’“offrir une alternative éducative dans un monde intellectuel supérieur sclérosé sur le plan intellectuel”. “C’est une école, pas un parti. Il n’y a pas de programme politique, mais ce sera un carrefour des intelligences. Le projet peut être politique au sens noble du terme puisque l’on vise à former une élite capable d’exister dans la vie de la cité”, a-t-elle ajouté. Insistant régulièrement sur le mot “enracinement”, Marion Maréchal a assuré que “les grands auteurs seront présents” dans les enseignements, “auxquels s’ajouteront d’autres auteurs afin de mettre en perspective pour que chaque élève se fasse sa propre opinion”.
Le conseil scientifique de l’Issep
Si Marion Maréchal se dit prête à accueillir des professeurs marqués à gauche – s’ils ont “compétence, expérience et charisme”, force est de constater que pour le moment le conseil scientifique chargé de la sélection des professeurs et du projet pédagogique est bien marqué à droite, voire à l’extrême droite :
Yves-Marie Adeline, docteur en sciences de l’art de l’université Panthéon-Sorbonne, fondateur et ancien président du parti royaliste Alliance Royale
Thibaud Colin, enseignant en classes préparatoires au collège Stanislas à Paris, essayiste engagé contre le mariage homosexuel
Guillaume Drago, professeur de droit public à l’université Panthéon-Assas
Raheem Kassam, ancien rédacteur en chef du site d’extrême droite Breitbart News London et ancien conseiller principal du leader de l’UK Independence Party (Ukip), Nigel Farage
Paul Gottfried, historien et philosophe américain spécialiste des mouvements conservateurs
Oleg Sokolov, historien russe de l’université de Saint-Pétersbourg, spécialiste de la civilisation française
Pascal Gauchon, ancien directeur de Prépasup et directeur de la revue Conflits, ancien membre d’Ordre Nouveau (ancêtre du Front national)
Jacques de Guillebon, rédacteur en chef de L’Incorrect – “C’est notre poil à gratter qui va apporter esprit critique avec un peu d’insolence dans un monde devenu conformiste à force d’anticiper la conformité”, a déclaré Patrick Louis
Alain Marion, professeur émérite à Lyon 3
Jean-Marie Faugère, ancien général des armées puis conseiller défense du groupe Thales
Roger Chudeau, inspecteur général de l’enseignement supérieur, ancien inspecteur d’académie passé par les cabinets de Gilles de Robien et de François Fillon à Matignon.
Travailler avec Laurent Wauquiez : une possibilité
De son côté, l’ancienne députée FN a assuré qu’il n’était pas prévu qu’elle intervienne et qu’elle refuserait “de commenter la politique tant qu’elle travaillera dans l’école”. Une école située non loin des locaux du conseil régional présidé par Laurent Wauquiez. Lequel sera invité à l’inauguration de l’Issep comme tous les “acteurs politiques et économiques du quartier”, a expliqué la cadette de la famille Le Pen. “Avec Laurent Wauquiez, nous avons passé cinq ans ensemble à l’Assemblée nationale sans jamais nous parler. À lui de voir s’il veut rattraper le temps perdu”, s’est amusée Marion Maréchal, qui a plusieurs fois affirmé dans le passé qu’elle pourrait travailler avec le président du parti Les Républicains.
Lyon “parfaitement placé” pour viser l’Italie
Marion Maréchal a aussi expliqué pourquoi elle avait choisi Lyon pour implanter cette école : “Cela s’est fait pour une raison historique. Je voulais plutôt créer une business school, mais cela ne s’est pas fait et j’ai fusionné mon projet à celui de l’équipe de Lyon porté par Sylvain Roussillon et Thibaut Monnier, qui souhaitaient créer une école de sciences politiques. Nous souhaitons aussi former une élite politique et économique et venir à Lyon c’était symboliquement sortir de l’entresoi parisien. De plus, Lyon est une ville très accessible, au tissu économique très varié. Enfin, nous avions la volonté de nous développer en Italie et Lyon est parfaitement placé pour ça.”
Deux sessions de sélection des futurs élèves auront lieu, fin juin et en septembre. Le coût de l’année sera de 5 592 euros pour le magistère et de 1 900 euros pour la formation continue. L’école sera financée par les inscriptions, le mécénat et des dons, selon sa direction. “Nous refusons les dons étrangers, d’où qu’ils viennent. Nous le faisons pour ne pas être suspectés d’être à la botte de quelqu’un”, a assuré Marion Maréchal. Il en faudra pour payer les 100 000 euros de loyer annuel des 400 m2 de locaux, sans compter les salaires des professeurs. L’école travaille actuellement à un partenariat avec une université européenne, afin de faire reconnaître ses diplômes. “Nous avons déjà plusieurs pistes, dans des pays variés”, affirme Marion Maréchal.
Cette conférence de presse, nos confrères de Rue89 Lyon et de Libération n’y avaient pas été conviés. Une décision “assumée” par la direction de l’Issep, après des articles récents qui lui ont déplu, selon M. Libbrecht, rapporte Le Point.