LA NOUVELLE GARDE POLITIQUE LYONNAISE

A Lyon, même si les "éléphants" du PS et les "barons" de l'UMP se portent bien, quelques nouvelles têtes ont profité de la campagne législative pour émerger : Najat Belkacem (PS), Michel Havard (UMP), Anne-Sophe Condemine (Modem), Emeline Baume (Verts), Nathalie Arthaud (LO), Philippe Meunier (UMP), Abdel Belmokadem (Bové)... Lyon Capitale vous fait découvrir 14 jeunes candidats qui ont en commun de se présenter pour la première fois, d'avoir du talent et des convictions, en un mot d'incarner l'avenir. Certains, surtout à droite, seront élus députés. Les autres le seront sans doute un jour. En espérant qu'ils y parviennent avant d'avoir éteint en eux la flamme du renouveau.

Michel Havard

UMP, candidat dans la 1ère circonscription de Lyon

L'écolo de droite

A tout juste 40 ans, Michel Havard est bien placé pour ravir à Anne-Marie Comparini (UDF) son siège à l'Assemblée. S'il réussit son pari, cet ancien chabertiste a tout pour s'imposer parmi les patrons de la droite lyonnaise. Ses dadas : l'Europe et l'Environnement. Un peu comme les Verts, sauf que lui est clairement de droite. Même dans son parcours professionnel. C'est avant tout un juriste et un commercial. Il travaille dans l'environnement, mais pas dans des associations d'ornithologie : il est passé par une filiale de Bouygues (Saur), en charge du traitement des eaux, avant d'atterrir chez Suez. Il n'est pas non plus un ennemi de la bagnole. Il préfère les mesures "concrètes et efficaces", comme rendre "les voitures propres moins chères que les autres". S'il est élu, il déposera une loi obligeant toutes les grandes surfaces et les immeubles de bureaux à se couvrir de panneaux solaires. "Esthétiquement, ça ne change rien et ça représente quelques centrales nucléaires d'économisées". Des idées, il en a "à la pelle". Ça va des tarifs de péage modulables pour favoriser le covoiturage, au bio dans toutes les cantines scolaires : "Si les collectivités locales et l'Etat ne donnent pas l'exemple, qui va le faire ?" Comme Sarkozy, il a un côté hyperactif. Son portable sonne toutes les cinq minutes. Il change de boulot tous les deux à quatre ans... Peut-être une habitude prise enfant, quand, fils de préfet, il déménageait régulièrement. Il cumule travail dans le privé, mandat de conseiller général et surtout la direction de l'UMP du Rhône (n°2 derrière Perben). Son activisme y est d'ailleurs apprécié à Paris. Depuis 2004, il multiplie les initiatives innovantes : "l'école des militants, des débats participatifs bien avant Ségolène Royal, des questionnaires aux adhérents..." Et ça paye : en trois ans, l'UMP du Rhône a triplé ses effectifs, pour atteindre 10 000 membres et devenir la 6e "fédé" de France.

Najat Vallaud-Belkacem

PS, candidate dans la 4e circonscription de Lyon.

La révélation médiatique

C'est un vrai changement de génération que veut incarner Najat Belkacem dans la 4ème circonscription, face au candidat ultra-favori Dominique Perben, poids lourd de ces élections. L'éviction de Christian Philip? Elle met en évidence "des pratiques aberrantes", "une conception patrimoniale du pouvoir". Elle se veut une adversaire porteuse d'éthique, une "députée-citoyenne" au service des électeurs et ne se servant pas d'eux "comme tremplin". Pas seulement le clivage droite-gauche. A moins de trente ans, elle fait déjà partie des "générations futures", celles qui devront se coltiner la dette budgétaire, les retraites et le réchauffement climatique. Elle ne s'encombre pas beaucoup de dogmes. Elle se reconnaît socialiste dans les valeurs : justice sociale, solidarité. Mais elle n'aime pas l'assistanat, préfère une certaine forme de méritocratie, celle de l'école "c'est là que se construit l'ascension sociale". Dernier coup de pied dans le jeu de quilles, cette proche de Gérard Collomb est franchement pour une ouverture au centre sur les questions économiques : "libérer les forces actives, donner plus de souplesses aux entreprises, moins d'étatisme". Qu'en pensera le vieux PS qui l'a découverte en porte-parole de Ségolène Royal ?

Anne-Sophie Condemine

UDF-Modem, candidate dans la 4e circonscription de Lyon.

La nouvelle ambassadrice de Bayrou

"Elle peut devenir la figure du Modem à Lyon" confie un cadre du parti de François Bayrou. Elle, c'est Anne-Sophie Condemine, 46 ans, candidates aux législatives face à Dominique Perben (UMP). Mariée, 3 enfants, cette ancienne hôtesse de l'air se révèle un peu sur le tard. Peut-être parce qu'elle a beaucoup voyagé, suivant son mari aux Emirats Arabes Unis et au Koweit. Ou qu'elle s'est longtemps occupé de ses enfants et investi à la Peep. Conseillère régionale depuis 2004, elle est - paraît-il - "l'élue UDF la plus écoutées par les services, car ses interventions sont sérieuses." Envoyée de plus en plus souvent au front par Mercier, elle défend avec conviction la "révolution du centre", s'offusque déjà de l'absence de proportionnelle, qui pourrait priver l'UDF de député : "Mais quoi qu'il arrive, on ne va pas disparaître ! Avec 75 000 adhérents nouveaux, bien sûr qu'on survivra ! Si on n'a pas de députés, on fera autrement..." persuadée qu'un jour ou l'autre, les idées de Bayrou l'emporteront : "C'est le sens de l'histoire".

Emeline Baume

(Les Verts) candidate suppléante dans la 2e circonscription de Lyon.

L'aristo-dynamite des Verts

Emeline Baume fait partie des oiseaux qui ne court pas les rues chez les Verts... Et c'est bien dommage ! Issue d'une vieille aristocratie rurale et fauchée (les "de Brosses"), elle est avant tout une fille de paysans... "Je suis d'une famille nombreuse, très petite maison dans la prairie" rigole-t-elle. Jusqu'à 16 ans, elle ne connaît que sa ferme, quand, le bac en poche, elle débarque à Lyon et trouve une colloc' dans les pentes de la Croix-Rousse. Elle s'occupe des personnes âgées isolées, avant de trouver son vrai "truc", la communication.

A "30 piges", elle débarque en politique un peu par hasard mais avec une incroyable énergie. "Dans tout ce que je fait, j'ai une gnaque terrible, parce que mes parents ont tellement ramé". Elle aussi a eu sa "part de malheurs" : elle a perdu deux sœurs, avant d'être frappée par une leucémie. Pas étonnant qu'elle s'engage avec une sensibilité à fleur de peau et une sincérité rare. Ecologiste tendance "petits oiseaux", elle n'est pas du genre sectaire. Elle reconnaît d'ailleurs que Sarkozy est "sacrement bon" sur l'environnement : "Mais s'il zappe le nucléaire, les OGM, les autoroutes ou le bio, à quoi ça sert ?" Elle plaide pour une autonomie réelle des Verts : "On y va tout seul, et on fait notre trou. Point ! Je suis certaine que le discours sur l'urgence écologique est aussi entendable par des gens de droite."

Elle pourrait s'engager aux municipales, "parce qu'on ne parle pas assez des vieux ! Pourtant, ils sont plus nombreux que les jeunes, on a intérêt à sortir des tracts écrits un peu plus gros !" Mais elle n'est pas là pour faire carrière : "Je fais partie de cette nouvelle génération qui a envie d'être efficace et se dit : je suis là pour un mandat, pas plus, j'ai envie de faire ça, ça et ça. Après, je retournerai m'occuper des petits vieux..." En gros, ça doit dépoter ! Dommage qu'elle ne soit que suppléante. A côté d'elle, Guylaine Gouzou-Testud, paraît bien pâlichonne.

Nathalie Arthaud

(LO) candidate dans la 4e circonscription de Lyon

La future Arlette boulevard des Belges

Après Arlette Laguiller employée au Crédit Lyonnais, il semble que Lutte Ouvrière aime cultiver les paradoxes : celle qui pourrait la remplacer à la présidentielle de 2012, Nathalie Arthaud, sera candidate aux législatives dans la très bourgeoise 4e circonscription de Lyon... Pourtant, Arthaud travaille à Rillieux et habite à Vaulx. "On avait déjà une candidate là-bas, moi je pouvais bouger" explique-t-elle : "On ne pense pas que dans les beaux quartiers tout le monde vote Sarkozy... On veut défendre nos idées partout, y compris dans cette circonscription, où il y a quand même des travailleurs." Ça s'appelle la foi.

Sarah Peillon

(PS), candidate suppléante (de Touraine) dans la 3e circonscription

La rupture à gauche

A 26 ans, diplôme de Science-Po en poche et un peu d'expérience comme chargée de com' à la CCI puis à la Région, Sarah Peillon est prête à dynamiter le PS. C'est qu'elle ne digère pas la défaite et craint que son parti n'en tire pas les bonnes leçons. "Le problème, c'est qu'on n'a pas adapté notre doctrine au XXIe siècle ! A force de ne vouloir se fâcher avec personne dans le parti, on stagne. Depuis 2002, Hollande a juste fait en sorte que le parti n'éclate pas, mais je ne suis pas sûre que ça aurait été une mauvaise chose..." Et d'enfoncer le clou : "Depuis le référendum, je me sens plus proche de l'UDF que de Mélanchon !" Pour elle, il est temps de trancher dans le lard : "Il faut assumer une ligne social-démocrate et dire aux gauchistes : soit vous vous alignez, soit vous partez ! A droite, Sarkozy, avant de réunir son parti, il lui a fait faire une vraie révolution idéologique..." Proche de Dominique Strauss-Kahn, elle ne croit pas en lui comme au messie : "Je suis social-démocrate avant tout, ce n'est pas une question de personne. A la limite, je me définirai comme rocardienne, même si, à mon âge, ça fait bizarre (rires)..." A la tête du parti, elle verrait bien son homonyme, Vincent Peillon, "même si ça ne me facilitera pas la vie (rires) !"

Sheila Mc Carron

(PS), candidate dans la 8e circonscription.

Braveheart en Beaujolais

"Les choses faciles ne sont pas intéressantes, si je me présente, ce n'est pas pour être figurante !" Sheila Mc Carron n'est pas du genre à mâcher ses mots, en français "off course" et teintés d'un accent "scottish". Une écossaise dans le Beaujolais ? Sheila n'est pas née ici, mais elle se veut le héraut d'une nouvelle forme de citoyenneté. "Mon parcours original est un moyen d'enrichir le débat." Cette traductrice pour un éditeur de logiciel était déjà à gauche avant de franchir la Manche en 1998. "J'ai vécu le thatchérisme au Royaume Uni, on s'achemine vers cela en France. J'ai déjà vu le film et je peux garantir que c'est loin d'être un happy end." Elle se lance dans une bataille qu'elle refuse de croire perdue d'avance, avec une énergie détonnante et un sacré caractère. Même au PS, certains la trouvent "aussi casse-couille qu'Arnaud Montebourg". Elle assume : "J'ai pas peur de me rendre chiante pour obtenir une réponse claire à un problème."

Abdel Belmokadem

(Gauche Alternative 2007), candidat dans la 14 e circonscription

Le leader "positif" des quartiers

Marquer le territoire. Montrer qu'on peut y aller. Abdel Belmokadem n'est est plus à faire ses preuves. En 90, il s'improvise médiateur de quartier pour ramener le calme au Mas du Taureau après les émeutes. Il continuera d'exercer pendant plusieurs années. En 2000 il crée Nes&Cités, un cabinet de formation spécialisé dans la médiation et la gestion des conflits, en France et à l'étranger. Novembre 2006, il monte l'opération Jobs et Cités. Un camion télescopique transformé en forum de recrutement sillonne les banlieues parisiennes. Il se pose au pied des tours à la rencontre des candidats : mille cinq cents jobs sont en jeu. Entré en politique en 2001, Abdel Belmokadem se bat pour une "République équitable et laïque". Maire adjoint chargé de la vie associative à Vaulx-en-Velin, il parcourt les quartiers pour inciter les gens s'impliquer et démontrer que chacun peut faire de la politique. Il ne croit pas aux grand partis qui ne font jamais vraiment de place aux gens des quartiers populaires ; pourtant "l'élite de la France, elle est là". Né à Vaulx-en-Velin, militant depuis plus de quinze ans, Abdel Belmokadem bénéfice d'une indiscutable popularité renforcée par son image de leader positif. Et d'un véritable savoir-faire dans l'approche de la réalité des quartiers.

Baptiste Dumas

(UMP), candidat suppléant à Villeurbanne

Le petit Borloo de Villeurbanne

Souriant, la poigne ferme et le débit rapide, Baptiste Dumas a un air de gendre idéal. Et il sait ce qu'il veut : faire tomber la mairie de Villeurbanne. A 34 ans, le suppléant d'Henry Chabert - un homme qu'il admire - entend apporter "une touche sociale" au candidat UMP. Directeur du Pôle Rhône-Alpes de l'Orientation, Dumas a quitté l'UDF en 2005 pour l'UMP tendance Borloo : "Je ne suis pas de gauche, mais d'une droite plutôt sociale." Avec l'expérience de Chabert, il pense que Villeurbanne est mûre pour basculer : "Il y a une fatigue démocratique à Villeurbanne, les choses sont en train de changer : les gens veulent tourner la page du PS." Et si ce n'est pas pour cette fois, ça viendra : "Ça fait cinq ans que je suis dans l'opposition, je suis persuadé que je gagnerai un jour ! Il n'y a aucun bastion !"

Jérôme Saddier

(PS), candidat dans la 9e circonscription

L'outsider de Villefranche

A 37 ans, Jérôme Saddier est convaincu qu'il sera un jour maire de Villefranche. Après avoir longtemps tergiversé, la gauche s'est en tout cas rassemblée derrière cet ancien des cabinets d'Alain Richard (Défense) et d'Elisabeth Guigou (Emploi). La victoire de Sarkozy repousse certainement de quelques années ses ambitions, mais il croit à une certaine usure de la droite locale : "Bernard Perrut, le député sortant, a succédé à son père. Le mandat est confisqué par une famille depuis 30 ans : ce n'est pas sain". Même s'il ne réussit pas cette fois, Saddier devrait peser au sein du PS du Rhône, où il est un des chefs du file du NPS.

Philippe Meunier

(UMP), candidat dans la 13e circonscription

Le hussard de l'Est Lyonnais

Certains auront été surpris de voir l'Est lyonnais basculer à droite. Pas Philippe Meunier. Il sait qu'à Saint-Priest ou Décines, la gauche se maintient depuis des années grâce à des triangulaires avec le FN. Grâce aussi à la médiocrité des candidats de droite. Lui a déjà prouvé ses capacités.

En toute logique, il devrait battre Martine David (PS) en juin prochain et s'ouvrir ainsi les portes de la mairie de Saint-Priest. Sur ses anciennes terres ouvrières, Meunier ne fait pas campagne sur le bouclier fiscal ou les droits de succession, mais sur la préférence communautaire, ou la laïcité.

Il veut ainsi "interdire le voile intégral dans tous les lieux publics", car ce catho laïc n'accepte pas de "voir des femmes ramenés à la condition de fantômes". Il défend aussi la mixité sociale : "Ici, ça veut dire moins de logements sociaux et attirer les ménages plus aisés, et pas construire de nouveaux logements sociaux comme le veut Martine David. La gauche joue la misère pour garder son électorat sous tutelle !" Très virulent avec Martine David, il fustige aussi sa faible activité parlementaire : "Député, c'est pas représentant de commerce ! Son travail national, c'est zéro."

Patrick Verchère

(UMP), candidat dans la 8e circonscription

Le plus jeune député de France ?

A 34 ans, Patrick Verchère devrait devenir facilement l'un des plus jeune député de France. Merci à Robert Lamy, député sortant, dont il était l'attaché parlementaire, et qui a estimé, à 66 ans, que l'élection de Sarkozy devait permettre l'émergence d'une "nouvelle génération".

Une aubaine pour Verchère, qui se définit comme un "gaulliste social comme Fillon". Sur le fond, il ne faut pas forcément en attendre des étincelles : né dans le coin, à Pont-Trambouze, il restera "terre-à-terre", représentant avant tout sa circonscription viticole. Il veut ainsi réformer la loi Evin, pour autoriser la pub pour le vin, boisson injustement "stigmatisée dans les spots de la sécurité routière, alors que la plupart des accidents sont dus aux whisky-coca et vodka-pomme..." Il défendra aussi "un crédit d'impôt pour le bois-énergie, car c'est un enjeux économique pour le nord de ma circonscription."

Stéphane Lallemant

(Libéral), candidat dans la 2e circonscription de Lyon.

Alternative libérale ?

Seul candidat d'Alternative Libérale dans le Rhône, Stéphane Lallement se présente dans la 2e circonscription. Mais sans le label de son parti car il est classé dissident. Bien qu'il en soit quand même le seul représentant départemental. Et toujours plus ou moins adhérent de l'UMP. Son programme : l'Etat n'a pas à intervenir, ni pour imposer le SMIC ni pour interdire les drogues. Il plaide pour un revenu universel de 300 euros qui remplacerait tous les revenus de remplacement. Pour un impôt sur le revenu à taux fixe (de l'ordre de 10%). La privatisation de toutes les écoles pour les mettre en concurrence ; une allocation serait distribuée aux élèves pour qu'ils puissent choisir librement leur école. Stéphane Lallement rêve du score de 7% réalisé par Alain Madelin à la présidentielle de 2002 dans la circonscription.

Enquête de Raphaël Ruffier-Fossoul, Pierre Gandonnière et Anne-Claire Genthion

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