Emmanuel Buisson-Fenet, coanimateur du comité LREM du 1er arrondissement de Lyon, revient pour Lyon Capitale sur la lettre ouverte envoyée à Christophe Castaner par les “marcheurs” du Rhône. Ce militant de la première heure critique la gestion individuelle et opaque de la fédération LREM du Rhône par Caroline Collomb.
Lyon Capitale : Est-ce le retour de Gérard Collomb à Lyon qui a précipité votre lettre ouverte ?
Emmanuel Buisson-Fenet : Bien avant cette lettre, on avait déjà une boucle de messages sur Télégram qui parlait des dysfonctionnements d’En Marche Rhône. Le retour de Gérard Collomb a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, plus que le déclencheur. Depuis longtemps, il y a cette inquiétude de voir le mouvement se concentrer exclusivement sur les périodes électorales et pas sur le débat en interne.
Quels sont ces dysfonctionnements ?
Il y a d'abord une absence d'instance politique locale. Quand on va voir sur le site En Marche Rhône il n'y a rien, aucun organigramme, aucune instance officielle. Or tous les départements étaient invités par nos statuts à mettre en place des instances locales. Ça a été mis en place ailleurs, avec des organisations transparentes, des débats. Nous, il n'y a rien.
En creux, cette lettre est une critique de la gestion de Caroline Collomb...
Cette lettre ne vise pas une personne, mais l'organisation choisie. On ne peut pas tout réguler et tout gérer seulement en envoyant des mails à une seule personne, qui décide de tout. Notre ligne, c'est vraiment de sauver le mouvement pour éviter qu’il devienne soumis aux seuls impératifs électoraux, donc qu’il perde son âme. On veut gagner en 2020 avec tous ceux qui seront sur ses listes. On n'a pas envie de devenir un parti de l'ancien monde où il y a des petits coups par-derrière, des arrangements pour mettre un tel en avant, ou pour ne pas faire de l’ombre à un tel, etc.
Dans votre lettre ouverte, vous écrivez que “certains comités, parmi les plus actifs, avec le plus grand nombre d’adhérents, et qui faisaient preuve d’indépendance, ont été écartés en faveur de comités “dociles”, parfois créés de toutes pièces”. Y a-t-il d’après vous une volonté de phagocyter les comités historiques au profit d'autres, plus proches du pouvoir départemental ?
On a constaté que, sur un certain nombre de territoires, il y avait des choix faits de privilégier un comité plutôt qu'un autre. Le mouvement s'est construit autour des comités créés depuis le début du mouvement. Or, on a vu apparaître sur certains territoires des comités créés de toutes pièces, sans représentativité historique, qui venaient prendre la place du plus ancien. Les marcheurs étaient même invités à rejoindre les nouveaux. Mais ces nouveaux ont très peu d'activité et comportent beaucoup moins de marcheurs. On s'inquiète qu'il y ait une volonté de mettre en place des comités plus dociles.
“Les adhérents doivent avoir la possibilité de se parler sans que tout propos soit forcément rapporté”
Vous parlez aussi d'impossibilité d'avoir des liens avec les élus locaux : députés, élus métropolitains...
Oui, dans l'organisation on a beaucoup de mal à travailler avec les élus locaux. Certaines réunions ont été annulées à la dernière minute. Mais c'est un problème qu'il y a depuis le départ. Certains comités n'ont jamais vu personne, pas un député. Il n'y a rien qui incite à travailler en synergie les uns avec les autres. Par exemple, en juin, on a voulu faire une réunion des animateurs des comités du 1er, du 2e et du 4e arrondissements, pour parler ensemble de ce qui sera la prochaine circonscription métropolitaine. On nous a demandé d'annuler cette réunion. Ça nous a beaucoup choqués. Ce n'était pas un complot, c'était juste la volonté de parler entre nous. Les adhérents doivent avoir la possibilité de se parler sans que tout propos soit forcément rapporté.
Vous donnez l'impression que la promesse initiale du mouvement s'est abîmée depuis 2017...
On a le sentiment qu'il y a un décalage profond avec ce qui a été promis initialement et le fonctionnement local.
“Le problème dont nous parlons est bien local, pas national”
Les époux Collomb auraient-ils importé le fonctionnement du PS, qu'ils connaissent très bien, au sein de LREM dans le Rhône ?
Oui, comme je l’ai dit, il y a la crainte de se transformer dans un parti traditionnel de militants où le seul objectif des élus est d'avoir des troupes. Les marcheurs qui sont venus de la société civile sont tous venus parce qu'ils avaient une expérience professionnelle de bâtisseurs. Il y avait la volonté de construire quelque chose de nouveau. Mais le problème dont nous parlons est bien local, pas national.
Comment a été reçue votre tribune ?
On continue d'avoir des signataires. On dépasse la vingtaine et on espère que ça va augmenter. On ne veut la tête de personne, seulement que ça cesse et que le national se préoccupe de la situation, parce que la section départementale ne peut pas être organisée comme ça.
Avez-vous eu des retours d'élus ?
Je n'ai reçu aucun coup de fil pour dire que ce que l'on raconte est faux. Dans les réactions, il y a deux positions différentes. Certains regrettent la publicité, mais comprennent notre démarche. D'autres pensent que passer par la diffusion publique était le seul moyen de faire bouger les lignes.
En avez-vous parlé à Caroline Collomb ?
Oui, je lui ai immédiatement écrit pour la tenir informée, mais je n'ai pas eu de réponse.
Lyon : les Marcheurs s’attaquent à Caroline Collomb et ses “ambitions”
"Ça a été mis fait ailleurs" ????