Georges Képénékian © Antoine Merlet

Municipales à Lyon - Képénékian : “je me suis toujours méfié des idéologies”

Lyon Capitale continue de vous présenter les candidats en lice pour le second tour des élections municipales qui se tient ce dimanche 28 juin. Au tour de Georges Képénékian ce mercredi. Au premier tour, il est arrivé en quatrième position avec 12% des voix. L’ancien maire de Lyon, pendant l’intermède ministériel de Gérard Collomb, joue la partition de l’équilibriste entre deux blocs qu’ils jugent incapable de gouverner la ville de Lyon et se pose en alternative pondérée.

Lyon Capitale : Quelles leçons tirez-vous de la crise sanitaire que nous venons de traverser ?

Georges Képénékian : cette période a amené les gens à réfléchir, à regarder différemment leurs manières de vivre. Notre rapport à la mort a changé. Nos sociétés pensaient maîtriser les incertitudes. Quand il y a un accident quelque part, une cellule psychologique est mise en place. Pendant le confinement, 60 millions de personnes ont vécu un choc. Une nouvelle anxiété s’installe dans une société qui se posait déjà des questions avant comme l’avait montré le mouvement des gilets jaunes. Cette crise a eu des effets sanitaires puis sociaux avec un appauvrissement pour certaines familles et nous commençons découvrir la violence des conséquences économiques.

En quoi avez-vous remodelé votre programme pour l’adapter à ce second tour qui se déroule dans un contexte radicalement différent et avez-vous de nouvelles priorités ?

J’avais fait de la santé et de l’environnement mes priorités. Je continue de dire que la question sanitaire doit être le gendarme de toutes les autres. C’est pour cette raison que je propose de créer une agence municipale de la santé qui soit un lieu de coordination et de prévention. Il faut que, en cas de deuxième vague, nous n’ayons pas à courir après des masques ou des équipements de protection. Les Lyonnais ne l’accepteraient pas une seconde fois. Nous ne pouvons plus faire comme si ce que nous venons de vivre ne pouvait pas se reproduire. Il faudra aussi être attentif aux conséquences économiques de la crise et je pense en particulier aux commerçants, aux artisans et aux petites entreprises. La ville, avec la commande publique, peut les soutenir. Les acteurs économiques n’attendent pas que des subventions, mais que l’on organise la vie de la cité en prenant en compte leurs besoins. Il faut aussi se pencher sur le monde de la culture. Les artistes captent les évolutions de la société et les interrogent. Après cette crise, on peut se demander à quoi ressemblera la création de demain. Nous avons besoin de nouveaux lieux pour permettre l’interdisciplinarité ou de nouvelles pratiques culturelles. Surtout que je ressens après le confinement une soif d’échanger à nouveau.

Vous abordez ce deuxième tour dans une position inconfortable. Vos concurrents ont tous procédé à des alliances qui les placent arithmétiquement très loin devant vous. Êtes-vous désormais sur une candidature de témoignage ?

Quand on s’allie en pensant aux bénéfices que l’on en retire individuellement, je n’appelle pas cela une alliance. Des gens se sont sentis bafoués par l’alliance entre Gérard Collomb et Les Républicains. Je ne pense pas que de ne pas avoir scellé d’alliance soit un handicap pour moi. Je ne suis pas sur que les Lyonnais acceptent d’être téléguidés par des enjeux nationaux et régionaux comme le font les écologistes et Laurent Wauquiez.

Vous avez pourtant discuté avec les écologistes et avec Yann Cucherat durant l’entre-deux tours. Vous avez longtemps souhaité vous trouver des alliés…

J’ai envisagé de travailler avec Grégory Doucet ou Yann Cucherat. Mais je ne pouvais m’allier dans les conditions énoncées par certains. Pour moi, il était hors de question de perdre notre socle de valeurs et notre liberté de pensée. Quand les écologistes me demandent de renier ce que j’ai pu faire, c’est une manière de faire en sorte qu’aucun accord ne soit possible. Je n’ai pas le moindre questionnement sur l’obligation de porter plus haut des politiques de développement durable, mais quand ces questions sont poussées de manière radicale par des personnalités autre que les Verts, cela dit quelque chose d’autre. De la même manière, je ne pouvais pas aller vers la droite conservatrice et dure. Yann Cucherat a fait le choix de s’allier avec une droite qui n’est pas la sienne.

Durant cette campagne d’entre deux tours, vous dénoncez la radicalisation à gauche des écologistes désormais alliés à Nathalie Perrin-Gilbert et les socialistes. Mais vous étiez sur des listes communes en 2008 quand vous entrez en politique. Quand vous avez été maire, les écologistes et le PS étaient dans votre majorité sans que vous ne trouviez à y redire…

En 2008, Nathalie Perrin-Gilbert n’est pas liée à la France insoumise. Nous travaillons à l’époque avec le Parti communiste. Cela n’a rien à voir. Pour nous, c’est une ligne rouge. Nous sommes opposés à toute forme d’extrémisme. À Lyon, nous sommes plutôt dans la recherche de la confluence plus que dans la confrontation.

Vous avez évoqué l’alliance entre les listes Cucherat et Blanc. Mais là aussi dès 2008 avec Richard Brumm puis encore en 2014, vos listes s’étaient ouvertes à des personnalités de droite. À l’époque, vous n’y étiez pas opposé…

Il s’agissait de personnes isolées quand aujourd’hui, ils fusionnent des listes. Le message envoyé n’est pas le même.

Vous n’êtes pas présent au second tour dans tous les arrondissements et vous êtes arrivés en quatrième position du second tour avec seulement 12% des suffrages. Qu’est-ce qui vous fait croire que vous serez le prochain maire de Lyon ?

Je le pense toujours. Au sortir du second tour, il n’y aura pas de majorité claire. Il faudra donc des gens capables de rassembler et aussi d’expérience pour gouverner face à la crise qui arrive. Les autres candidats ne sont pas capables de le faire. Ceux qui pensent pouvoir gouverner seuls sont enfermés dans leur idéologie. Lyon a toujours été une ville d’ouverture qui s’est tenu à distance des carcans politiques. Notre ville est ouverte sur le monde. Notre attractivité n’a pas juste amené des emplois, mais aussi des talents. Nous avons un héritage à développer dans l’équilibre. Je trouve stupide de dire que l’on est contre le tout économique ou contre le tout écologique. Je suis pour l’équilibre. Je le fais depuis longtemps. Toute ma vie, je l’ai consacré à l’humain. Je me suis toujours méfié des idéologies, mais j’ai un socle de valeurs. Je ne suis pas un radeau qui vogue au gré des vagues. Je sais qu’il faudra être attentif à la question sociale. Aucune ville moderne ne peut s’en détourner. Nous voyons monter les appels à l’aide de personnes qui n’ont plus de quoi se nourrir ou se loger. Nous sommes dans un moment où il faut prendre soin des Lyonnais. Je pense avoir été dans ce registre toute ma vie, sans faire de procès aux autres.

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