Yann Cucherat © Antoine Merlet

Municipales à Lyon - Yann Cucherat : “nous sommes outsiders”

Dans la dernière ligne droite d’une campagne municipale hors normes, Lyon Capitale vous (re)présente les candidats encore en lice. Ce mardi, c’est au tour de Yann Cucherat (ex-LREM). Arrivé en troisième position au premier tour des élections municipales à Lyon, il a enregistré le ralliement d’Étienne Blanc, le candidat LR qui était pourtant arrivé devant lui le 15 mars dernier. L’ancien gymnaste se pose dans ce deuxième tour en candidat de la continuité face à des écologistes qu’il classe dans le camp de la rupture.

Lyon Capitale : En tant que candidat à la ville de Lyon quelles leçons tirez-vous de cette crise ?

Yann Cucherat : Comme n’importe quelle expérience de vie, cette crise invite à repenser nos habitudes, nos a priori et certaines certitudes qui nous polluent l’esprit. Se retrouver impuissant face au malheur des gens, à la mort, à la souffrance nous invite à faire preuve d’humilité et à repenser notre rapport à l’autre. Si je suis maire, je voudrai que l’image qui reste de mon mandat soit celle d’un élu qui a créé du lien entre les différentes générations et entre des gens de couches sociales différentes. Il me paraît, par exemple, essentiel de développer des résidences pour personnes âgées qui ne soient pas forcément des Ehpad. La crise sanitaire que nous avons vécu nous invite à ne pas être dans la demi-mesure.

Le deuxième marqueur sur lequel nous devons mettre l’accent, c’est l’éducation et cela fait encore plus sens aujourd’hui après cette crise. Je veux une école ouverte sur l’extérieur et c’est pour cette raison que nous proposons, par exemple, les classes environnement. Nous allons réaménager le chalet du parc de la tête d’or pour en faire un lieu dédié. Sur le parking, nous créerons une ferme pédagogique. Les enfants sortir de l’école et prendront conscience du rythme des saisons, ils pourront mettre la main dans la terre et aller à la rencontre d’animaux en voie d’extinction. Le parc de la Tête d’Or est un symbole, mais nous pouvons imaginer le faire dans d’autres parcs municipaux.

Quelle sera la priorité de votre mandat si vous êtes élus le 28 juin prochain ?

L’enjeu premier pour le futur maire de Lyon ce sera l’économique. Le chômage va prendre de l’ampleur dans les prochains mois. La crise sanitaire va déboucher sur une crise économique sans précédent. Nous voyons dès aujourd’hui que le chômage monter notamment chez les jeunes et on peut s’interroger sur la situation à l’automne quand des entreprises auront fermé ou seront restructuré. Si je souhaite que les Lyonnaises et les Lyonnais soient heureux, il faut qu’ils aient un emploi. J’ai peur qu’un grand nombre d’entre eux se retrouvent en difficulté. Nous avons un rôle à jouer pour préserver l’emploi et accompagner le commerce et l’artisanat. Des mesures prises pendant la crise comme la gratuité des terrasses, des enseignes publiques ou des baux commerciaux qui appartiennent à la collectivité doivent être prolongés.

Pour accompagner les commerçants, nous proposons aussi une politique d’acquisition de foncier afin de pouvoir maîtriser les loyers et redynamiser des secteurs comme nous l’avons fait, avec la Métropole, rue Romarin. Je propose aussi pour aider nos artisans le Fabàlyon, c’est une plateforme sur laquelle tout ce qui est fabriqué à Lyon serait mis en valeur et livré gratuitement aux habitants. Au contraire d’Amazon qui a un effet destructeur nous valoriserions notre savoir-faire dans un système vertueux. Nous devons aussi continuer à attirer des entreprises et des filières sur le territoire. C’est important pour l’emploi, mais cela peut aussi être une réponse aux enjeux environnementaux. Nous voulons que Lyon devienne la capitale de l’hydrogène.

Durant cet entre-deux tours, vous vous êtes alliés avec Les Républicains, vos opposants lors du mandat qui s’achève, pour faire barrage à vos anciens alliés que sont les Verts et les socialistes. Ne pensez-vous pas que vous allez perdre des électeurs en route avec cette alliance à front renversé ?

Sur nos listes, nous avons des élus qui viennent du PS comme Jean-Yves Sécheresse ou d’Europe Écologie comme Alain Giordano. Le PS a rejoint EELV, mais je pourrai vous dire à quel point ils ont lutté pour que les écologistes et les Insoumis n’arrivent pas au pouvoir. Certains sont dans des positions opportunistes pour préparer le coup d’après. Avec Étienne Blanc, François-Noël Buffet et Gérard Collomb, nous n’avons jamais parlé de poste. Nous avons fait une alliance de bon sens face à un contexte terrible. Chacun a mis son ego de côté pour servir l’intérêt du territoire. Nous ne sommes pas dans la tambouille. Je m’inscris pas dans le même parcours que mes adversaires ou que certaines grandes figures locales qui sont investis depuis de nombreuses années dans la politique.

Mon parcours est celui d’un Lyonnais qui s’est construit dans cette ville et qui a pu vivre un parcours politique. Je ne suis pas dans un appareil politique, mais dans la volonté d’accompagner les gens dans leur quotidien. Je ne me suis jamais rien interdit et j’ai toujours appelé au rassemblement le plus large. Mais je n’ai pas réussi à aller chercher mes collègues d’hier. Avec Étienne Blanc, nos programmes sont compatibles. Je suis séduit par ses quais flottants. J’en étais même jaloux. Il y avait des curseurs sur lesquels nous n’étions pas d’accord comme la sécurité. Il voulait doubler les effectifs de police municipale et tripler le nombre de caméras de vidéoprotection. Je ne trouvais pas ça réaliste. Nous avons réussi à déplacer les curseurs.

Au premier tour, vous n’avez réuni que 15% des suffrages, soit 20 points de moins qu’en 2014 et très loin derrière Grégory Doucet (EELV). Pensez-vous que votre alliance peut inverser la tendance ?

Je suis réaliste sur le fait que nous sommes outsiders si l’on tient compte des résultats du premier tour, mais je suis convaincu par notre projet et notre équipe. Notre principal adversaire sera l’abstention : en fonction de la mobilisation citoyenne, nous avons encore une chance de gagner. Nous avons pris nos responsabilités en faisant un rassemblement large pour transformer Lyon sans rupture. Aux Lyonnais de prendre les leurs et d’aller voter pour décider de la décennie future. Est-ce qu’ils souhaitent que Lyon continue de rayonner et d’être ouverte sur le monde ou qu’elle soit repliée sur elle même ? Moi, je veux être dans le continuum des maires qui se sont succédé depuis un siècle.

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