Présidentielle J-7 : un dimanche sur un marché lyonnais

Poussée de Mélenchon, indécision des électeurs, début de la campagne des législatives... Rencontre avec des militants sur le marché du quai Augagneur à Lyon.

Tract Hamon marché ()

Benjamin Roure
Tracting pour Benoît Hamon, sur le marché du quai Augagneur (Lyon 3e)

Sur le marché du quai Victor-Augagneur, le long du Rhône du côté de la Guillotière, ça sent déjà un peu les vacances de Pâques. Les commerçants sont là, mais l'allée est moins bondée que d'habitude. Néanmoins, les militants sont bien présents. À une semaine du premier tour de l'élection présidentielle, la distribution de tracts se poursuit, comme depuis plusieurs semaines, tranquillement.

"Beaucoup de gens prennent nos tracts et semblent intéressés, mais ceux qui s'arrêtent pour discuter sont plutôt des convaincus", constate l'adjoint à l'éducation du 3e arrondissement, Yann Ben Hayoun, qui distribue tout sourire le programme de Benoît Hamon. Il y a quand même des provocateurs. "Un type est venu me demander si j'étais d'accord avec l'article 62, s'agace une militante de La France insoumise. L'article 62 de quoi ? Du programme ? J'étais un peu décontenancée... Mais il n'était pas intéressé, il voulait juste me titiller sur l'alliance bolivarienne, qui a fait la une des médias."

"Un second tour Le Pen-Mélenchon suscite une grande inquiétude"

Côté Les Républicains, on discute aussi, mais surtout avec des électeurs gagnés à la cause de François Fillon. Nora Berra, candidate aux législatives dans la 3e circonscription du Rhône, est là. "Les gens qui viennent vers nous n'ont pas de questions sur le programme, mais plutôt des mots d'encouragement, car pour eux, François Fillon est le seul capable de tourner la page du quinquennat Hollande. Le climat est serein, on ne sent aucune agressivité." Effectivement, entre les camps PS et LR, en bons militants de terrain, on sympathiserait presque. Quand il s'agit de prendre une photo de Nora Berra et son équipe, c'est un supporter d'Hamon qui s'y colle.

Nora Berra campagne marché (mardi 16 avril 2019)

Benjamin Roure
Nora Berra (avec la veste grise) photographiée par un militant socialiste.

Ce dernier n'a pas le même ressenti, quant aux électeurs à sensibiliser. "Beaucoup sont indécis, mais ce qu'on nous reproche le plus, c'est la non-alliance avec Mélenchon." Et ça ne loupe pas, un Lyonnais au pull rayé interpelle deux communistes vendant L'Humanité dimanche et distribuant des tracts du candidat de la France insoumise : "Mais ça m'énerve, vous vous seriez rapprochés, c'était sûr que la gauche passait !"

"On n'est plus les petits rigolos de gauche"

La montée de Jean-Luc Mélenchon dans les sondages, et l'écart qui se réduit entre lui et les trois autres favoris – Marine Le Pen, Emmanuel Macron et François Fillon –, est dans tous les esprits. Dans celui des électeurs indécis, comme cette Parisienne en visite, qui a pris une collection de stickers France insoumise mais pense plutôt voter Hamon. Même si elle avoue deux secondes plus tard qu'elle se décidera au matin même du vote – Macron et Mélenchon sont encore en lice dans sa tête. Les électeurs de droite, aussi, observent cette dynamique de campagne. "Je viens de croiser un médecin du 3e arrondissement qui a très peur d'un second tour Le Pen-Mélenchon, glisse Nora Berra. Il me dit que dans cas-là, il s'exilera en Suisse ! Cette hypothèse suscite une grande inquiétude et mobilise notre camp." Dans celui de La France insoumise, on sent une vraie confiance, des sourires. "Le regard des gens a changé, on n'est plus les petits rigolos de gauche, confirme un militant aguerri. Il y a autant une poussée d'un vote utile contre Fillon qu'un vrai sentiment d'adhésion à certains éléments du programme."

Tracting Mélenchon marché ()

Benjamin Roure
Les tracts, badges et stickers de La France insoumise ont un certain succès.

Côté Hamon, on tente de ne pas se résigner, même si on se veut réaliste. "C'est vrai que c'est dur, ce n'est pas une élection de délégué de classe, c'est l'élection présidentielle ! Les sondages c'est une chose, mais le vrai baromètre c'est le porte à porte. Et là, l'accueil qu'on nous réserve est meilleur que lors de la campagne de François Hollande." Et son collègue d'ajouter : "C'est une élection à quatre tours : après la présidentielle, il y a les législatives. Si Macron est président, avec quelle majorité gouvernera-t-il ? Il aura besoin des socialistes." Quatre tours peut-être, mais dimanche prochain, c'est le premier. Et ce sera sans doute le plus important.

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