Programme des candidats : le chemin de la sortie de crise

Stopper l’hémorragie de la dette publique

Avec la crise des déficits publics, la dette française s’est invitée comme l’un des thèmes clés de l’élection présidentielle. Aucun budget n’a été voté à l’équilibre depuis 1974. Aujourd’hui, les dix candidats à la fonction suprême promettent un retour à l’équilibre pour la fin de leur quinquennat. Les uns par un coup de crayon biffant le déficit français, comme le NPA ou Lutte ouvrière pour qui les citoyens ne sont pas responsables de la dette et n’ont donc aucune raison de la couvrir. Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche) entend résorber le trou, qui se chiffre à plus de 1 500 milliards d’euros, en imposant plus sévèrement les plus hauts revenus. Jacques Cheminade, candidat de l’obscur parti Solidarité et Progrès, s’engage lui à lancer une procédure de faillite du système bancaire qui passerait nos déficits par pertes et profits.

À l’UMP, on joue la carte de la continuité de l’action du président-candidat. Nicolas Sarkozy souhaite toujours inscrire une règle d’or dans la Constitution. Une volonté partagée par de nombreux candidats (François Hollande, Marine Le Pen, François Bayrou) mais chacun avec sa propre inclinaison. Pour équilibrer le budget de l’État en 2016, François Bayrou entend réduire les dépenses publiques de 50 milliards d’euros et augmenter les rentrées fiscales du même montant. Les Verts consacreront un point de PIB à cet objectif vertueux sans vraiment plus d’explication. Le PS pense arriver à l’équilibre en rabotant 29 milliards d’euros sur l’abandon de niches fiscales dès 2013. Le FN promet de s’attaquer aux fraudes, au coût de l’immigration, et d’imposer une relocalisation de la dette par l’épargne des français.

La chasse aux milliards passe dans les programmes par une chasse aux riches. Nicolas Sarkozy, qui vient de réformer l’ISF en abaissant son seuil, part en croisade contre les exilés fiscaux. Il veut les imposer au même niveau que s’ils étaient résidents français. Autour de l’imposition des plus hauts revenus, les candidats de gauche ont fait dans la surenchère : 75 % pour les revenus dépassant le million d’euros annuel (PS), un taux d’imposition sur les revenus de 70 % pour les contribuables déclarant plus de 500 000 euros pour Europe Écologie-Les Verts. Le NPA, le Front de gauche (à partir de 360 000 euros) et Lutte ouvrière veulent carrément aller jusqu’à un taux de 100 %. François Bayrou prévoit pour sa part de s’arrêter à 50 % pour les revenus supérieurs à 250 000 euros. Marine Le Pen propose, elle, la création d’une nouvelle tranche à 46 %, quand Nicolas Sarkozy prévoit de s’attaquer aux grands groupes qui jusqu’à présent jouissaient de niches fiscales pour exonérer d’impôt une partie de leurs bénéfices. Il compte ainsi gagner 2 à 3 milliards d’euros par an. Les différents candidats de gauche ont aussi prévu une mesure de ce type, en augmentant l’impôt sur les sociétés. François Hollande, pour aider les PME et les TPE, et imposer plus lourdement les grands groupes, souhaite changer les taux d’imposition des entreprises : 35 % pour les grands groupes, 30 % pour les PME et 15 % pour les TPE.

Quelle place pour la finance ?

Hormis à l’UMP, les banques sont considérées comme sources de bien des maux. EE-LV, le PS, Jacques Cheminade, le Front de gauche et le Front national souhaitent séparer les activités de banque de dépôt et d’affaires. LO et le NPA vont plus loin, en nationalisant tout bonnement les banques. Jean-Luc Mélenchon propose lui de nationaliser celles en difficulté. Éva Joly veut abolir le secret bancaire et retirer leur licence aux établissements disposant d’avoirs dans les paradis fiscaux.

Quelle politique économique et industrielle ?

François Bayrou a dégainé le premier sur le “made in France”. Électoralement, cette proposition n’a pas eu d’écho retentissant. En revanche, son idée a infusé dans la quasi-intégralité de la classe politique. L’idée est reprise majoritairement à droite. À gauche, il est moins question d’un label “français” que d’une relocalisation de la production. La finalité est la même. Les PME sont les stars de la campagne “économique”. Tous les candidats misent sur ces entreprises non délocalisables pour recréer de la croissance. Tous les partis de gouvernement se sont, en effet, un jour retrouvés en proie à l’impuissance face à des grandes entreprises brassant des milliards d’euros de chiffre d’affaires et insensibles aux menaces, même émanant d’un président (Nicolas Sarkozy et le site de Gandrange) ou d’un Premier ministre en temps de cohabitation (Lionel Jospin et le site de Renault-Villevoorde). Nicolas Sarkozy, Éva Joly, Nicolas Dupont-Aignan veulent leur favoriser l’accès aux marchés publics. Une pluie de niches fiscales devrait aussi tomber sur eux : premier dépôt de brevet gratuit pour les PME (UMP), livret épargne industrie (PS), avantages fiscaux pour les grandes entreprises qui investissent auprès d’une PME (Modem). Jacques Cheminade, Éva Joly, François Bayrou ou encore François Hollande veulent créer une banque de soutien à cette catégorie d’entreprises.

L’autre star des programmes économiques est un invité surprise : le protectionnisme. Nicolas Sarkozy, Jean-Luc Mélenchon et Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République) proposent une taxation plus forte des importations hors Union européenne. Marine Le Pen plaide pour une contribution sociale aux importations égale à 3 % de la valeur des marchandises importées, avec l’idée de relocaliser la production industrielle en France. Le terrain du protectionnisme est déserté par un François Hollande qui préfère suspendre les aides de l’État à une entreprise qui délocaliserait. Pour la stratégie économique de demain, le candidat socialiste, François Bayrou et Éva Joly renvoient au lendemain de l’élection avec la tenue d’une sorte de Grenelle de l’économie. Le président du Modem pointe quelques axes : énergies renouvelables, biotechnologies, nanotechnologies, infrastructures. Jacques Cheminade trace, lui, le chemin de la Lune, qu’il veut industrialiser, et pour arriver à ses fins il veut aussi lancer un grand programme spatial franco-européen en y investissant des milliards d’euros. Il restaurerait ainsi le lustre de l’industrie française.

La grande ligne de fracture s’articule autour de la TVA sociale. Le président Sarkozy la promet en application pour le mois d’octobre. La TVA augmenterait de 1,6 % pour diminuer les charges patronales et ainsi rendre nos entreprises plus compétitives. François Bayrou prévoit lui une TVA de crise qui disparaîtrait avec le retour de la croissance.

Comment remporter la bataille de l’emploi ?

Sans l’écrire noir sur blanc, Nicolas Sarkozy veut revenir sur les 35 heures, par le biais de négociations par branches ou au cas par cas dans les entreprises. À des années-lumière de cette proposition, Éva Joly, Philippe Poutou et Jean-Luc Mélenchon souhaitent instaurer la semaine de 32 heures. Nathalie Arthaud, la candidate de Lutte ouvrière, va plus loin en promettant le travail pour tous quitte à se le partager. À salaire égal bien entendu. Pour le NPA, le Code du travail se simplifierait avec la suppression des CDD et des intérimaires au bénéfice du CDI pour tous.

La formation des chômeurs est une des priorités annoncées par tous les candidats. Nicolas Sarkozy se démarque sur la forme en proposant aux Français de s’exprimer par référendum sur l’un de ses engagements de campagne : la formation obligatoire pour les chômeurs, qui ne pourront pas ensuite refuser un emploi dans leur nouveau secteur sous peine d’être radiés. Pour lutter contre l’assistanat, le candidat UMP propose, tout comme Nicolas Dupont-Aignan, la création d’une journée d’intérêt général hebdomadaire pour les bénéficiaires du RSA. Pour les seniors, Nicolas Sarkozy parie sur une réduction des baisses patronales pour favoriser leur embauche.

Avec son contrat de génération, François Hollande veut faire coup double : favoriser l’entrée des jeunes sur le marché et maintenir les seniors au travail. Pour l’entreprise, la signature de ce contrat sera accompagnée de trois ans de réduction de charges sociales. En outre, le PS veut lancer une sorte de “copié-collé” des emplois-jeunes qui créerait 150 000 emplois. Le Modem propose un dispositif similaire mais sur deux ans seulement et applicable indistinctement pour un jeune ou un travailleur proche de la retraite. Europe Écologie mise sur la croissance verte (démantèlement de centrales nucléaires, nouvelles énergies) pour créer 600 000 emplois en cinq ans. Nicolas Dupont-Aignan mise aussi sur la croissance verte et promet d’indexer l’impôt sur les sociétés sur le pourcentage de CDI et de travailleurs âgés au sein de l’entreprise.

Le Front de gauche veut imposer un pouvoir plus fort des syndicats dans les entreprises en leur octroyant un droit de veto sur les décisions importantes comme les délocalisations et les licenciements. Les entreprises bénéficiaires mais qui licencient se verraient ainsi couper les aides publiques. Une mesure dont François Hollande fait aussi la promotion.

Le Front national mise avant tout sur son “indémodable” préférence nationale pour réduire le taux de chômage et la lutte contre le travail des clandestins.

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