Jean-françois Copé
© tim douet

Psychodrame à l'UMP : les Lyonnais s'inquiètent d'un grand déballage

Alors que François Fillon et Jean-François Copé vont confier leur destin à Alain Juppé, dans le Rhône, les cadres locaux de l'UMP redoutent une escalade de la violence dans la chasse aux fraudes.

Qu'il semble loin le temps où dimanche au siège de l'UMP, dans le 6e, les cadres du parti, pro-Fillon et pro-Copé, se félicitaient d'une même voix d'un exercice de démocratie interne réussi. Depuis, l'UMP explose à Paris. Le recours à Alain Juppé a été validé par les deux camps et pour les cadres lyonnais de l'UMP, ce signal d'apaisement est la première bonne nouvelle depuis dimanche soir. "Je n'avais pas pris position pour privilégier l'union. Vu les évènements, ma position n'était pas sotte. La nomination d'une administration transitoire me paraît pertinente. Sinon la situation ne se décantera pas rapidement et positivement", plaide Dominique Nachury, la députée du 6e.

"Si Alain Juppé peut amener une période de calme pourquoi pas. Mais, ce ne sera pas une tâche aisée. Je suis content que Jean-François Copé ait accepté. Il faut sortir par le haut et la commission des recours va permettre de savoir qui a gagné. Je soutiens cette démarche de consensus", explique Christophe Guilloteau, député de la 9e circonscription du Rhône et soutien de Jean-François Copé.

Chaque camp se retranche derrière son champion

Si en milieu d'après-midi, Alain Juppé est devenu l'homme de la situation, les partisans de Jean-François Copé se montraient plus réservés en début de journée. "Dans la mesure où François Fillon a sollicité Alain Juppé, son indépendance est relative. Faire arbitrer un scrutin par une personne qui a refusé d'y participer, c'est aussi contestable", pointait un partisan du député-maire de Meaux. "Dans nos statuts, il existe la possibilité de faire appel à la commission des recours. Je ne comprends pas l'idée de demander à Alain Juppé de trancher. Autant s'en référer à nos statuts qui permettent d'examiner les fraudes et de nommer notre président", estimait pour sa part Emmanuel Hamelin, conseiller municipal à Lyon et soutien de Jean-François Copé.

Les fillonistes refusaient eux de saisir cette commission dont il dénonce l'impartialité. "François Fillon a dit que la commission des recours souffre des mêmes problèmes que les autres instances de l'UMP. Elle est présidée par un soutien de Jean-François Copé. Je ne sais pas comment procèdera Alain Juppé mais il est la voix de la sagesse. Il est réellement indépendant. Il ne s'agit pas d'une solution miracle mais raisonnable", note Vincent Chriqui, conseiller régional et ancien collaborateur de François Fillon. Dans les faits, les souhaits des deux camps vont être exaucés. La commission des recours va se réunir pour recompter les voix et Alain Juppé supervisera les opérations avant de proclamer les résultats.

Le pire est à venir

Pour autant, la route vers la publication des résultats s'annonce chaotique. Le bras droit de Jean-François Copé a déjà dégainé face caméra la liste des fraudes électorales à Nice. L'inventaire des fraudes va débuter. "Avec 98 voix d'avance, Jean-François Copé a dit : "n'allumons pas le feu puisque l'on gagne". Il y a eu plus de tricherie chez Fillon. Je veux bien le croire quand on connaît les gars du Sud. Jean-François Copé a tous les éléments. Il ne voulait pas les utiliser pour minimiser les conflits", pointe un cadre de l'UMP.

Avant de sortir du chaos, la droite va s'y enterrer pour quelques jours. "Ils vont ajouter les bulletins des trois départements manquants mais enlever ceux de Nice. Au final, ce n'est pas 1300 votes qu'ils vont dégager, c'est ceux des 300 000 adhérents qui ont participé. Il y a eu des dysfonctionnements. Tout bureau où un litige a été constaté sur une procuration ou sur l'organisation pourra être annulé. Au final, le scrutin sera annulé et on va repartir avec moins d'adhérents. L'UMP, c'est fini. Notre parti est comme une poule sans tête qui continue à courir", s'énerve un responsable départemental. "S'il y a encore des contentieux après le recompte des voix par la Cocoe ou la commission des recours, il faudra que les intéressés trouvent une solution après des négociations politiques", préfère voir le toujours optimiste Michel Forissier, secrétaire départemental de l'UMP.

Des urnes non règlementaires à Oullins

Localement, l'examen attentif des irrégularités constatées lors du scrutin pourrait aussi avoir des répercussions. Dimanche, Philippe Cochet, le copéiste président de la fédération du Rhône, a ainsi constaté la présence d'urnes non règlementaires à Oullins, le bureau de vote de la 12e circonscription. Dans cette ville, François Fillon est arrivé très largement en tête. Il bénéficiait du soutien des deux parlementaires de la commune : Michel Terrot et François-Noël Buffet. "Les urnes n'étaient pas transparentes sur toutes leurs faces. Il n'y avait pas de compteur ni de cadenas pour fermer l'urne", décrit un proche de Philippe Cochet. "Je n'imagine pas une seconde qu'ils aient triché dans ce bureau de vote. Ce n'est pas dans la façon de faire de Michel Terrot", plaide un partisan de Jean-François Copé.

Jusqu'à présent, les votes de cette circonscription ont été validés. Philippe Cochet s'est limité à un simple constat du matériel de vote. Si les camps Copé et Fillon se livrent à un grand déballage des pratiques litigieuses, les tensions pourraient ainsi gagner le Rhône. "Il y avait deux assesseurs pro-Copé qui ont fait cette remarque sur le procès-verbal. Ils n'ont jamais lâché l'urne des yeux et n'ont rien vu d'anormal. Philippe Cochet n'aurait jamais du en parler pour instiller le doute. Il devrait être là pour calmer le jeu. Dans d'autres bureaux du Rhône, il y a aussi des soucis mineurs qui n'ont entraîné aucun problème. 26 cas douteux recensés par la Cocoe et aucun dans le Rhône. S'ils cherchent des irrégularités, ils en trouveront partout", tranche-t-on dans l'entourage de Michel Terrot.

"Des irrégularités partout"

Si l'identité du futur président relève à l'heure actuelle de la science fiction, tous les élus UMP s'accordent sur un point : "nous donnons une image catastrophique de notre parti". "Nous sommes confrontés à un problème d'affichage et les journalistes sont friands de ce genre de situation. Je pensais que l'on ferait mieux que le PS en 2008. C'est d'autant plus dommageable que politiquement, vu l'action du gouvernement, nous avions un boulevard devant nous", s'agace Christophe Guilloteau.

"Les deux ont accepté d'appeler Alain Juppé mais sur la base des constatations de la commission des recours tenu par des copéistes. Nous n'avons gain de cause sur rien, déplore un partisan de l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy. À 50-50, François Fillon aurait du dire qu'il refusait d'être président dans ces conditions. Nous sommes engagés dans un scénario où personne ne sortira grandi. L'issue est claire : nous allons revoter. Il y a eu des erreurs de tous les côtés : dans l'organisation, à la Cocoe et chez les lieutenants des deux candidats. Ils jettent de l'huile sur le feu et ils vont finir par nous coûter très cher. S'ils se penchent en détail sur les irrégularités, ils vont en trouver partout".

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