Piratant plusieurs sites d'extrême droite, le groupe Anonymous rend public un échange de mails entre le conseiller régional FN et l'universitaire négationniste Robert Faurisson. On y apprend que Bruno Gollnisch s'était senti "gluant" après avoir reconnu publiquement le génocide juif et l'existence des chambres à gaz. Le retraité lui reprochait de s'être "déculotté", le jugeant trop "peureux". Bruno Gollnisch ne nie pas la correspondance avec Robert Faurisson.
Robert Faurisson est un professeur de lettres, figure de proue du négationnisme, depuis la publication en décembre 1978 d'une tribune dans Le Monde "Le problème des chambres à gaz ou la rumeur d'Auschwitz". Il y nie à la fois l'existence de camps d'extermination et celle du génocide juif. Bruno Gollnisch est un leader historique du Front National, conseiller régional. Attaqué pour contestation de crimes contre l'Humanité, il a gagné en Cassation en 2009.
L'un et l'autre entretiennent une relation épistolaire. C'est ce qui ressort des révélations du groupe Anonymous qui a piraté plusieurs sites Internet d'extrême droite selon nos informations (lire ici) et celles du Nouvelobs.com (lire ici). Il y a quelques jours, est mis ligne un échange de courriels entre les deux hommes, remontant à juin 2009. C'est d'abord le leader frontiste qui envoie un message à l'universitaire, lui demandant de bien vouloir "examiner" un texte de sa conférence de presse, regrettant par avance que "certains passages" lui "déplairont" (voir un extrait ci-dessous).
L'enseignant retraité lui répond dans la foulée. Et par le ton employé, c'est bien Gollnisch l'élève : "Ce qui me déplaît et fortement, ce sont les propos que vous avez tenus devant la caméra". Et par un lien Internet de renvoyer son correspondant vers une vidéo de Lyon Capitale où Bruno Gollnisch affirme : "les crimes contre l'humanité commis par le régime national socialiste, je les reconnais, je les atteste et je n'ai que compassion et sympathie pour les victimes" (lire ici).
"Vous voilà à nouveau gluant"
Des propos qui font bondir Faurisson. "Ainsi que je vous l'ai dit lors de notre conversation téléphonique de ce jour, vous vous êtes, une fois de plus, déculotté en fin de course", le corrige-t-il. Ensuite, le négationniste fait référence à un jugement de première instance de novembre 2006. Alain Jakubowicz, avocat de la Licra, avait alors obtenu une victoire symbolique face au numéro deux du FN. Il lui avait proposé de suspendre sa procédure si celui-ci reconnaissait publiquement, lors du procès, l'existence du génocide juif et des chambres à gaz. Le leader nationaliste s'était exécuté.
Faurisson revient donc sur cette reculade dans son courriel. "Après votre procès devant Schir (le président du tribunal correctionnel, ndlr), vous m'aviez dit qu'à la suite de l'incroyable concession que vous aviez faite publiquement à Jakubowicz, vous vous sentiez 'gluant'. Vous voilà à nouveau gluant", assène le négationniste. La missive se conclut méchamment. Le professeur gronde l'élu régional : "On ne se dispute pas avec Bruno Gollnisch mais on est en droit de lui dire son fait ; il manque vraiment de caractère ; il est trop peureux. Quel gâchis en tous cas !".
"J'ai des échanges avec quantité de gens"
Ce document pose une première question : est-il authentique ? Nous avons contacté ce mardi Bruno Gollnisch : "Je reçois 200 courriels par jour", avance-t-il, indiquant ne pas s'en souvenir. Entretient-il une correspondance avec Robert Faurisson ? "J'ai des échanges avec quantité de gens. Monsieur Faurisson était professeur à l'université de Lyon... (Bruno Golnisch aussi, ndlr)". Le conseiller régional ne souhaite pas commenter la teneur du courrier, tout comme l'utilisation par lui-même de ce terme de "gluant".
Alain Jakubowicz accueille avec satisfaction ces révélations, même s'il s'interroge sur le procédé du piratage de messageries. "J'avais le sentiment de remporter le face à face et cela le confirme. C'est un message envoyé aux négationnistes et aux nazillons : le numéro deux du Front National reconnait l'existence des chambres à gaz et du génocide juif". Selon lui, Bruno Gollnisch est depuis prudent. De plus, relève-t-il, le négationnisme ne figure pas "dans la ligne de Marine Le Pen pour qui c'est un combat d'arrière garde".