Jean-Jack Queyranne
© Tim Douet

Queyranne accuse le coup

DÉCRYPTAGE – Jean-Jack Queyranne fait grise mine après les municipales. À tel point que certains se demandent s’il est toujours candidat aux élections régionales de 2015, comme il l’a déjà annoncé trois fois depuis deux ans.

La claque a été si forte que le président du conseil régional est resté sonné. Nombre de ses poulains ont en effet décroché aux municipales. Maurice Vincent à Saint-Etienne, Bernadette Laclais à Chambéry, Laurent Déroche à Roanne, Philippe Kizirian à Saint-Chamond, Alain Maurice à Valence, Roland Revil à Voiron. La liste est longue de "bébés Queyranne" à s'être inclinés au profit de la droite aux municipales. À Grenoble, Jérôme Safar a même perdu face à son ancien collègue de la majorité régionale, l'écologiste Eric Piolle. "Jean-Jack Queyranne ne s'est pas mêlé des municipales", relativise son entourage à la région. Pourtant, le président affichait une mine déconfite hier en conférence de presse, deux semaines après les municipales.

Les conséquences des municipales

Il faut dire que le scrutin l'a poursuivi jusque dans la sphère privée, par le biais de son épouse, candidate dissidente face à la socialiste Annie Guillemot, à Bron. La femme du président a tout tenté pour faire barrage à la maire sortante, soutenue par Gérard Collomb et Solférino. "Si elle avait fait chuter Guillemot à Bron, Collomb et le PS le lui auraient reproché, car elle aurait pu leur faire perdre la présidence du Grand Lyon et la métropole", analyse-t-on dans l'entourage du président.

Au final, parmi les socialistes régionaux engagés dans la course aux municipales, seul Jean-François Debat à Bourg-en-Bresse a été réélu. L'adjoint aux finances, pressenti pour succéder à Queyranne à la région, a retrouvé son fauteuil de maire dès le premier tour, en faisant alliance avec les écologistes.

Une vague bleue éprouvante donc, mais qui n'empêche pas Jean-Jack Queyranne d'être "candidat" officiellement en 2015. Non, selon sa garde rapprochée, le socialiste s'inquiète plutôt de savoir comment il va composer ses listes. Il envisage de les ouvrir à la société civile, pour éviter de récupérer tous les perdants des municipales qui voudraient se recycler.

L’ombre du “technocrate européen”

Quant à la candidature de l'UMP Michel Barnier à sa droite, commissaire européen au marché intérieur et aux services, "on le sait depuis six mois", minimise l'entourage de Queyranne. "Barnier a six ans de moins que Queyranne, mais ils font partie de la même génération ; les moins de 50 ans ne le connaissent pas. Et puis, il a un profil de technocrate européen", se rassure-t-on dans l'équipe du sortant.

En réalité, l'adversaire promet d'être coriace. Originaire de Haute-Savoie et bien implanté localement, il est aussi ancien ministre de l'Agriculture. "Une personnalité crédible, d'envergure nationale et consensuelle", analyse-t-on jusque dans les rangs de la gauche à la région.

En prime, Michel Barnier, satellisé depuis 2010 à Bruxelles, a le profil de "rassembleur" dont rêve le groupe Union de la droite et du centre (UDC) au conseil régional pour l'emporter en 2015. Il a l'avantage de s'être tenu à l'écart de la guerre Copé/Fillon depuis deux ans et il a les mains libres depuis son éviction de la course à la présidence de la Commission européenne début avril.

La candidature du commissaire ne sera annoncée qu'après l'été, mais il était présent la semaine dernière au salon du Medef à Lyon – "et ce n'était pas pour faire de la figuration", décrypte une source bien renseignée. Barnier commence donc à faire parler de lui, en pleine déroute des municipales pour Jean-Jack Queyranne.

La “politique de gribouille”du Gouvernement

Le coup de grâce est venu la semaine dernière de son propre camp, avec l'annonce de la énième réforme territoriale par le Premier ministre. Manuel Valls a sonné mardi le glas des départements au profit des intercommunalités et des régions à l'horizon 2021. Mais, après les promesses non tenues de Marylise Lebranchu l'année dernière, Jean-Jack Queyranne est apparu complètement désabusé lundi matin face à la presse, limite en colère.

"Le Sénat est départementaliste et les chausse-trappes législatives seront nombreuses", prédit le président socialiste, qui appelle "rapidement" de ses vœux "une loi-cadre", lui qui défend depuis 2012 l'idée de renforcer les régions. D'ici là, il tire à boulets rouges sur les socialistes au gouvernement, les accusant de "bricolage" et de "politique de gribouille".

Seule éclaircie pour lui ces deux dernières semaines, la nomination le 2 avril de Ségolène Royal au ministère de l'Ecologie. La numéro trois du gouvernement, qu'il avait soutenue à la primaire de 2007, se souviendra-t-elle de son ami Jean-Jack Queyranne ? Cette nomination ne lui fera certainement pas de mal en tout cas, à moins d'un an maintenant des élections régionales prévues en mars 2015.

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