les manifestations contre l'élection de Sarkozy ont tourné à l'émeute. Lyon Capitale est allé à la rencontre de ceux que Nicolas Sarkozy ne comptera jamais parmi son électorat.
Ils ont manifesté sauvagement contre l'élection de Nicolas Sarkozy à Lyon comme dans des dizaines de villes de France. Certains ont cassé des vitrines, mis le feu aux poubelles ou jeté des projectiles sur les forces de l'ordre. D'autres se sont conduits pacifiquement. Du soir de l'élection au mardi suivant, ces scènes d'émeutes se sont reproduites.
Les deux premiers soirs, les manifestations spontanées drainent des mécontents de tous âges et origines. Les premiers heurts avec la police font partir les moins déterminés. Ne reste plus qu'un noyau dur, prêt à l'affrontement ou à tenir pacifiquement le pavé. "On sait qu'on ne le fera pas démissionner, ni partir les flics, explique Thomas*, futur professeur de lettres. Le but est de réussir à s'exprimer le plus longtemps avec le moins d'arrestations et de blessés possibles".
Ils sont présentés comme des anarcho-libertaires rompus à l'émeute urbaine. En réalité, c'est davantage un patchwork d'individus. Leur point commun est d'avoir participé au mouvement anti-CPE. Certains jeunes des quartiers étaient présents, surtout le dimanche soir. "A la différence du mouvement de 2006, les jeunes de banlieues ne sont pas venus pour piquer les portables. Ils exprimaient la même révolte que nous en cassant les vitrines, poursuit François, étudiant en sciences-politiques."
"Rendre certains territoires ingouvernables"
La minorité la plus agissante est constituée de ceux qui n'avaient pas désarmé après le retrait de la loi sur le CPE. La plupart, environ 200, était réunis en AG jeudi 10 mai. Partant de leur expérience contre le CPE, ils sont persuadés qu'un mouvement social peut aboutir même s'ils sont minoritaires. Certains remettent en cause la légitimité des élections, d'autres acceptent le jeu démocratique. Tous veulent en découdre maintenant et dans la rue. "Il a été pendant cinq ans au gouvernement, on n'a pas besoin d'attendre les premières mesures, souligne un étudiant en master de sociologie".
Outre les étudiants, il y a aussi des jeunes travailleurs, des déçus de la gauche, qui sont allés voter "contre Sarkozy et non pour Royal". "Certains manifestent leur joie, pourquoi ne pourrions nous pas montrer notre colère, souligne, Jean, barman. D'autant que tout chez Sarkozy me fait peur : ses idées autant que sa personne. Peut-être qu'au regard de l'histoire, nous aurons eu raison de manifester".
Les plus remontés sont sans conteste les libertaires, qui n'hésitent pas à jeter des bouteilles sur les CRS et à briser les vitrines. Dans un tract, on peut lire que "sous le régime de Sarkozy, il n'y a que deux positions tenables : la résistance hargneuse ou la collaboration. Se sortir de la France d'après, c'est rendre des portions de territoire ingouvernables, et ça peut se tenter en manif".
Ce sont au moins 85 de ces jeunes contestataires, violents et non-violents, qui ont été arrêtés pendant les trois soirs. Avec à la clé des dizaines de condamnation : de simples heures de travaux d'intérêts généraux jusqu'à des peines de six mois fermes. Malgré les condamnations qui pleuvent et les rues quadrillées par les forces de l'ordre, une nouvelle manifestation est appelée le 16 mai, jour de l'investiture de Nicolas Sarkozy.
*Les prénoms ont été changés
VIDEO : Témoignage d'un manifestant, étudiant en sociologie à l'université Lyon 2. Pour des questions d'anonymat, il a souhaité être filmé de dos
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