Des économies et plus d’investissement. La recette budgétaire de Laurent Wauquiez à la tête de la région Auvergne-Rhône-Alpes ne change pas. Le budget 2018 de la collectivité porte toujours ces priorités, mais aussi des doutes sur le deuxième volet : la réalité des investissements.
L’assemblée plénière du conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes présentait hier et ce jeudi un menu particulièrement lourd. Avec le budget à l’ordre du jour, ce sont des débats marathon qui ont lieu : 180 amendements pour près de sept heures de temps de parole. Avant le début de l’assemblée plénière, Laurent Wauquiez a présenté son budget primitif de manière plus concise et plus simple à la presse. S’appuyant sur un rapport de la Cour des comptes et du ministère de l’Intérieur sur l’état financier des collectivités locales, le président LR du conseil régional s’est décerné un satisfecit : “Nous sommes, pour la Cour des comptes, la région la mieux gérée de France. Nous sommes en tête sur la baisse des dépenses de fonctionnement (-5,1 %) et la première des régions fusionnées pour la hausse des investissements.”
La réalité de l’investissement en question
L’investissement, c’est le nerf de la guerre du budget primitif présenté par Laurent Wauquiez et sa majorité ce mercredi. Pour Étienne Blanc, son premier vice-président, chargé des finances, l’investissement devrait dépasser le milliard d’euros pour la première fois du mandat. Il pointe une hausse de 250 millions d’euros par rapport à la majorité socialiste qui les a précédés. Mais, pour beaucoup de conseillers régionaux d’opposition, voire certains de la majorité, Laurent Wauquiez brille plus à l’heure de faire des économies (encore 50 millions pour l’année à venir) qu’au moment d’investir. C’est d’ailleurs le sens du coup de semonce porté par Patrick Mignola, conseiller régional Modem et ancien vice-président, dans l’édition de décembre de Lyon Capitale : “Il faudra bien faire attention sur le prochain compte administratif au niveau d’investissement. J’ai peur qu’il ne soit pas du tout conforme à ce qui a été annoncé. L’an passé, on nous disait que nous allions sous-consommer notre budget, mais là, ce sera encore plus le cas. Les plans d’investissement, en particulier, sur les lycées ont été lancés trop tard.” Le député centriste reprend ainsi les critiques de l’opposition, qui pointent depuis le début du mandat des effets d’annonce, difficilement transposées dans le budget régional. Lors des débats, ce mercredi, ils ont encore pointé cet écart. “Il y a beaucoup de paroles, mais l’investissement n’est pas toujours exécuté. Il est particulièrement inquiétant de voir que 16 % des postes ouverts à la région ne sont pas pourvus. Si les services ne peuvent pas travailler correctement, l’investissement ne pourra pas être fait. On entend des remontées dans ce sens des élus locaux, des entrepreneurs ou d’associations qui ne voient pas arriver les moyens annoncés”, pointe Jean-Charles Kohlhaas, coprésident du groupe Le Rassemblement (EELV et Parti de gauche).
Marshall à petits pas
Le “plan Marshall” pour les lycées illustre pour l’opposition l’écart entre les annonces et les réalisations. Lors de la précédente assemblée plénière du conseil régional, Laurent Wauquiez fléchait pour ce domaine 1,5 milliard d’euros, dont 500 millions pour un plan d’urgence et de rattrapage. Mais, au vu du budget primitif, l’accélération du tempo semble minime : +14 millions d’euros. La hausse est d’ailleurs moins franche qu’en 2017 (+29 millions). La ligne Lycées avoisine dans le budget 2018 les 250 millions d’euros. Ce qui place toujours la région en retard sur ses temps de passage pour atteindre le milliard et demi d’euros promis deux mois plus tôt.
Des discours destinés à une autre audience
La présentation du budget de la région semble épouser les besoins de l’agenda politique personnel de Laurent Wauquiez (il est le grand favori de l’élection à la présidence du parti Les Républicains). Ce que n’a pas manqué de souligner Jean-François Debat, le président du groupe PS : “Vous présentez des chiffres ici pour prouver ailleurs.” Le débat sur le document de référence de l’action régionale a surtout été l’occasion pour Laurent Wauquiez de tacler le Gouvernement et la politique menée par Emmanuel Macron. “Je veux bien contractualiser avec l’État pour faire des économies, mais qu’ils en fassent autant que nous !” a-t-il notamment tonné. Durant tout l’examen du budget, il n’a eu de cesse de rappeler des désengagements de l’État, des baisses de dotations qui auraient coûté 100 millions d’euros au conseil régional. Dans le style plus simpliste de Laurent Wauquiez, il convient de parler d’un État qui “a volé l’argent des habitants de la région”. Le candidat à la présidence du parti Les Républicains n’a pas manqué non plus de souligner la manœuvre parlementaire de La République en Marche, menée par des députés du Rhône, consistant à transférer des recettes de la région vers la métropole de Lyon (45 millions d’euros sur une dizaine d’années). Laurent Wauquiez et sa majorité promettent de récupérer cette enveloppe sur d’autres dossiers partagés avec la métropole de Lyon.