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Surtaxe Hollande à 75% : au moins 15 joueurs de l'OL touchés

François Holland © tim douet  ()

© Tim Douet

La nouvelle tranche d'impôt sur le revenu que veut instaurer le candidat socialiste à la présidentielle rattraperait au moins 15 stars lyonnaises du ballon rond dont nous publions la liste. Selon nos calculs, Yoann Gourcuff paierait 851 700 euros de plus au Fisc. L'OL va-t-il en faire les frais ?

François Hollande sera-t-il le fossoyeur du championnat de France de football et de l'Olympique lyonnais ? Le candidat socialiste a proposé d'instaurer une tranche d'imposition exceptionnelle de 75% pour tous les revenus supérieurs à un million d'euros annuel. Peu de Français se sont apitoyés sur le sort de ces grands patrons qui affichent des émoluments annuels à six zéros. S'émouvront-ils de nos stars du ballon rond ? Le salaire moyen de Ligue 1 s'établit à 46 000 euros, loin du seuil des 106 000 euros brut mensuels (déduction forfaitaire incluse), atteint par cette nouvelle tranche d'impôt sur le revenu. Ne seraient donc frappés que les clubs de l'élite, dont l'Olympique lyonnais.

D'après nos calculs, au moins 15 joueurs de l'OL sur les 35 ayant un contrat professionnel * seraient rattrapés par le Fisc : Yoann Gourcuff (4,4 millions d'euros annuel brut), Lisandro Lopez (4,1 millions d'euros), Kim Källström (3,5 millions d'euros), Bafé Gomis (295 000 euros par mois), Jimmy Briand (280 000 euros mensuels), Maxime Gonalons, Michel Bastos, Ederson, Aly Cissokho, John Mensah, Anthony Reveillère, Dejan Lovren, Cris, Rémy Vercoutre, Hugo Lloris.

+ 60% d'impôt pour Gourcuff

Prenons l'exemple de Yoann Gourcuff, célibataire sans enfant. Sur la base de charges salariales estimées à 20% du salaire brut, il verserait aujourd'hui chaque année 1 423 663 euros au Fisc. Avec la surtaxe, il s'acquitterait d'un chèque de 2 275 363 euros au Trésor Public. Soit 851 700 euros de plus (+60%).

Deuxième gros salaire de l'OL : Lisandro Lopez, lui aussi célibataire sans enfant. Son impôt passerait de 1 325 263 euros à 2 095 363 euros. Soit 770 100 euros de plus (+ 58%). Ces simulations n'incluent pas les primes de matches, les contrats publicitaires et autres revenus financiers. Elles ne prennent pas non plus en compte d'éventuels dispositifs de défiscalisation dont ils peuvent profiter. Il n'empêche, il y aura bien pour eux un avant et un après-présidentielle.

Gare aux délocalisations de joueurs !

Cette réforme préoccupe déjà les joueurs, même s'ils font preuve officiellement de retenue. "Cela peut poser des problèmes au football français mais François Hollande ne doit pas penser qu’au football, a relativisé Bafé Gomis, lors d'un point presse jeudi. Il essaie d’améliorer le quotidien des Français. C'est vrai aussi qu’il y a un fossé énorme entre le foot français et d’autres pays européens, on le voit en Ligue des Champions. Cela risque d’amplifier la difficulté qu’on a d’attirer les grands joueurs en France." De son côté, l'entraineur de l'OL Rémi Garde a déclaré : "En tant que citoyen avec certaines valeurs, je pense qu’en temps de difficultés la solidarité doit s’exercer. C’est vrai que dans notre profession particulière, il faut veiller à ne pas favoriser un exode des footballeurs".

Cette nouvelle disposition fiscale ne baisserait peut-être pas le salaire de tous nos sportifs : comme l'explique lefigaro.fr, "de plus en plus de joueurs n'hésitent pas à ajouter dans leur contrat une clause stipulant qu'un changement de fiscalité serait à la charge de leur employeur". Autrement dit, ce serait les clubs qui feraient les frais de cette mesure. Jean-Michel Aulas l'a bien compris : "C’est contrariant, choquant. Dans une concurrence européenne, comme dans une entreprise, les gens intelligents vont là où ils ont les meilleures conditions de rémunération. Là, cette taxation supplémentaire peut toucher un tiers des effectifs à Lyon ou Paris. On va dégoûter les meilleurs. Ce n’est pas bon pour l’élévation moyenne de notre secteur d’activité, surtout quand on est en recherche d’investisseurs", s'inquiète le président de l'OL dans le Républicain Lorrain.

Que la charge incombe aux joueurs ou aux clubs, le monde du ballon rond n'a pas tardé à monter au créneau. "Si cette proposition aboutit, le championnat de France serait évidemment relégué en deuxième division européenne. Nos meilleurs joueurs qui sont sur le marché mondial partiraient", s'est alarmé Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football professionnel, sur RMC. Dans la foulée, David Douillet, ministre des Sports et soutien de Nicolas Sarkozy, a envisagé un scénario catastrophe, imaginant une perte sèche d'un milliard d'euros pour le football professionnel.

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"Le foot ne résume pas la vie de la France"

Nous avons interrogé Michel Sapin, sherpa économiste de François Hollande, lors de sa venue à Lyon jeudi soir. "Il ne faut pas brandir le cas de footballeurs pour tenter de faire obstacle à une mesure de justice", souligne-t-il, invoquant "l'intérêt supérieur de la Nation". "Le foot ne résume pas la vie de la France". Le député de l'Indre ajoute : "Je crois savoir qu'il existe des mécanismes d'imposition particuliers qui tiennent compte des carrières courtes".

Comme nous l'explique Me Gilles Coumert, avocat spécialisé en droit fiscal au bureau Francis Lefebvre Lyon, les artistes du spectacle et les sportifs salariés peuvent opter pour le système dit de la moyenne triennale "qui permet d'atténuer les effets de la progressivité de l'impôt". Il permet de lisser ses revenus sur trois ans : les revenus perçus de 2011 peuvent être étalés sur 2012, 2013 et 2014. Mais ce dispositif n'est vraiment valable qu'à l'entame d'une ascension professionnelle.

"C'est un dispositif très utile pour accompagner la montée des revenus et ne pas assommer fiscalement une carrière qui commence, comme peut-être l'actrice de The Artist", décrypte Me Gilles Vidal, avocat spécialisé en droit fiscal. Pour un footballeur étranger, la régularisation - et le coup de massue - survient alors souvent à son départ de France. Comme l'explique Me Vidal, la charge fiscale apparaît au final généralement identique - effet de lissage ou pas - pour les joueurs à la carrière déjà bien lancée : parce que Lisandro Lopez et Yoann Gourcuff crèvent largement le plafond de revenus de la tranche supérieure, ils n'échappent pas au taux marginal d'impôt sur le revenu. Et paient plein but quoi qu'ils arrivent.

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* Joueurs sous contrat évoluant avec le groupe professionnel, prêtés ou jouant avec l'équipe réserve Pro 2. Le défenseur Hamdan El-Kamali ne rentre pas dans cette liste.

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