Après Alexandre Gabriac et Olivier Wyssa, le parti d'extrême droite pourrait perdre un autre élu ce mercredi. Yvan Benedetti, conseiller municipal de Vénissieux, comparait en commission des conflits du FN. Il avait affirmé à un blog qu'il était "antisioniste, antisémite, antijuif". Cet élément radical est un proche de Bruno Gollnisch. L'intéressé estime qu'il s'agit de "purges" visant le rival de Marine Le Pen.
Après Alexandre Gabriac et Olivier Wyssa, un autre élu rhône-alpin va-t-il être exclu du Front National ? Yvan Benedetti, conseiller municipal à Vénissieux et proche de Bruno Gollnisch, passe ce mercredi en commission des conflits du parti. L'avis de cet organe n'est que consultatif et c'est la présidente, Marine Le Pen qui tranchera dans la foulée. L'élu ne se fait guère d'illusion sur son sort. "J'entends le menuisier qui fabrique mon cercueil", plaisante-t-il, détaché.
"Nos amis juifs ont toute leur place au FN"
Parmi les reproches qui lui sont faits, un billet publié sur son site après l'annulation en mars dernier de l'interview de Marine Le Pen sur Radio J. Il venait au secours de sa présidente, tout en ajoutant qu'à son sens, cet épisode démontrait qu'il "ne sert à rien de s'engager dans une forme quelconque de repentance au service d’une prétendue dédiabolisation". Un crime de lèse-majestée. "Ce n'est pas à lui de définir la ligne du mouvement", tranche Steeve Briois, secrétaire général du FN et bras droit de la présidente. L'autre motif de sa convocation tient à ses propos tenus à une étudiante en journalisme et publiés sur le site Trans Europe extrêmes : il lui a confié être "antisioniste, antisémite, antijuif".
De l'humour, s'est-il ensuite défendu. "Ce sont des sujets que je n'aborde jamais. Des questions complexes qui ne sont pas libres de réflexion à cause des lois liberticides", développe aujourd'hui Yvan Benedetti. Steeve Briois note qu'il n'a jamais demandé un droit de réponse pour corriger le tir. Ces louvoiements apparaissent incompatibles avec la nouvelle ligne du parti. "Le Front national est un mouvement ouvert à tous dès lors que la patrie passe avant la religion. Nos amis juifs y ont toute leur place", expose le secrétaire général du mouvement à la flamme tricolore.
Un ex-dirigeant de l'Oeuvre française
Bruno Gollnisch regrette cette procédure. "La judiciarisation des problèmes qu'il peut y avoir dans le mouvement est fâcheux. Nous sommes une famille", invoque-t-il. Le vice-président du FN juge la convocation d'Yvan Benedetti "abusive" notamment parce que celui-ci a déjà été entendu à l'automne dernier par la même commission. On lui avait alors demandé de choisir entre le FN auquel il appartient depuis six ans, et l'Oeuvre française, groupuscule radical d'extrême droite dont il est membre depuis vingt ans. Selon Steeve Briois, il était même l'un des dauphins de son fondateur, Pierre Sidos. L'Oeuvre française est une organisation radicale qui ne cache pas son opposition à la démocratie et sa préférence pour un régime autoritaire. "Un Français 100% ne peut être physiquement qu'indo-européen, politiquement gallo-romain, spirituellement greco-latin" énonce leur site Internet. Marine Le Pen a plusieurs fois dénoncé les tentatives d'entrisme de leurs membres qui sont désormais personæ non gratæ au FN. Elle veut à tout prix lisser le parti pour le dédiaboliser.
Le FN "soutient une politique socialiste"
Du coup, l'aile droite du parti a le blues. "On ne parle plus du combat contre l'avortement ou des racines chrétiennes du pays au profit de la laïcité. On ne propose plus de supprimer l'impôt sur le revenu. On soutient une politique socialiste", s'emporte Olivier Wyssa. Avant Benedetti et après Gabriac, ce conseiller régional originaire de l'Ain avait été aussi exclu. Une décision à laquelle il porte une responsabilité : il avait démissionné fin janvier de son poste de secrétaire départemental du FN dans l'Ain. Et dans la foulée, avait abandonné sa candidature aux cantonales quelques semaines avant l'élection. "Je n'étais pas en phase avec les orientations nouvelles", argue-t-il. Dans son sillage, dix autres membres du FN, proches de lui, ont été exclus. Chez eux pointe la nostalgie de l'ancien président, Le Pen père. "Lui avait réussi à unir les différentes tendances de la droite nationaliste", souligne Olivier Wyssa. Bruno Gollnisch regrette cet ostracisme à l'égard des éléments radicaux. "Il n'y a pas de raison d'entourer de suspicions les gens venus du mouvement nationaliste. C'est paradoxal alors que des personnes du mouvement marxiste viennent à nous, du PCF voire du NPA", observe le leader frontiste.
Des purges anti-Gollnisch ?
Au total, parmi les 17 convocations du mois d'avril (dont celle d'Alexandre Gabriac), quinze concernaient des proches de Bruno Gollnisch selon un blog du Monde (lire ici). Et parmi ces 15, treize étaient Rhônalpins, le fief du challenger de Marine Le Pen à la présidence du parti. La stratégie de dédiabolisation du FN converge avec celle d'exclure des soutiens de Bruno Gollnisch. Pour Yvan Benedetti, il n'y a pas de doute : il s'agit bien d'une "purge". "Si ce n'est pas une purge, je ne sais pas comment ça s'appelle", renchérit Olivier Wyssa. "Ce serait fâcheux d'en donner l'impression" euphémise Bruno Gollnisch. Steeve Briois refuse ce procès. "Quinze secrétaires départementaux ont été récemment changés. Or parmi eux, douze étaient en faveur de Marine. On n'a pas alors parlé de purge mariniste", relève-t-il.