Football amateur dans le Rhône : la poule aux œufs d’or ?

Si le football professionnel est devenu un spectacle à part entière avec un business clairement établi, le football amateur semble prendre le même chemin, avec des clubs obligés de bien payer les joueurs de leur équipe fanion pour continuer d’exister sportivement.

“Avant, l’ancien président avait les moyens, il payait de sa poche. On sait tous qu’il y avait des dessous de table pour payer les joueurs.” Le témoignage de ce dirigeant d’un club de football amateur fait froid dans le dos. Si, avec 1.400 clubs et 190.000 licenciés (48.000 dans le Rhône), le football rhônalpin se porte plutôt bien au regard des baisses constantes dans la plupart des autres régions françaises, l’omniprésence de l’argent au sein du foot amateur est devenue une réalité. À tel point qu’une instance, la commission régionale de contrôle de gestion (CRCG), créée en 2004, contrôle les budgets de tous les clubs de CFA2 et d’honneur régional (HR). Des experts-comptables sont chargés de passer les comptes au peigne fin, ce qui a permis de responsabiliser les présidents des clubs amateurs. En somme, de leur apprendre à ne pas dépenser plus que ce qu’ils gagnent. Sous peine de s’exposer à de graves sanctions, comme l’interdiction d’accéder aux divisions supérieures ou l’interdiction de recruter.

Mi-pro, mi-amateur

Malgré tout, en usant et abusant des lois en vigueur, de nombreux clubs ont favorisé un système où, à l’image du football professionnel, l’argent a pris une place considérable. “Ici, le plus gros salaire fixe est à 2.000 euros. Les différences de salaires sont acceptées par les joueurs, puisque pour la plupart ils viennent de clubs plus prestigieux, confie le président de l’AS Duchère, Mohamed Tria. Cela permet aussi de stimuler les autres, de leur donner envie de prendre leur place. Mais, dans le contexte économique, c’est plus difficile de payer les joueurs. On a plus de mal à trouver des sponsors. En CFA, il est normal de donner de l’argent aux joueurs. On est obligé.” Malgré tout, celui qui a toujours fait preuve de transparence depuis qu’il a pris la présidence du club du 9e a adopté une politique plutôt équilibrée, en favorisant la formation de jeunes pour la plupart issus du quartier, tout en ayant une équipe senior très compétitive. “Nous voulons être un club complémentaire de l’OL”, ambitionne-t-il.

Des joueurs en mode mercenaire

Seulement, les dérives persistent. Le football amateur singe le football professionnel. Pour le meilleur et pour le pire. “À Feyzin, il y avait même des primes pour l’équipe senior2. Mais l’ambiance était délétère au club, il n’y avait quasiment aucune relation de solidarité entre les joueurs. Sans parler de toutes les magouilles entre les dirigeants. J’ai préféré partir”, confie un joueur. Même si les instances fédérales et les dirigeants ont une grande part de responsabilité, certains joueurs adoptent une attitude pour le moins intéressée. Et sans y voir le moindre problème. Business is business. “Si on ne me donnait pas d’argent, je ne jouerais pas ici. L’argent, c’est primordial”, souffle un licencié du MDA Chasselay. Pis, certains joueurs préfèrent faire l’impasse sur une équipe évoluant en CFA, pour aller dans un club de division d’honneur plus rémunérateur. “Au FC Lyon, on ne veut pas d’une équipe de mercenaires. Mais ils ont quand même une prime de résultat en fin de saison”, confie son président, Hervé Baudoux. Pris entre leur désir de conserver un esprit de football populaire, éducatif et formateur, et leur volonté de rester attractifs et compétitifs, les clubs amateurs semblent se diriger inéluctablement vers une professionnalisation.

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