Mais cette équipe de légende, de passage à Lyon, a surtout accompagné un siècle de culture afro-américaine et permis aux noirs de gagner leur place dans le sport pro américain.
Symbole du sport spectacle à l'américaine, les Harlem Globetrotters, 82 ans, sont, pour reprendre la célèbre formule de John Lennon, " aussi connus que le Christ ". Dans l'inconscient collectif, ils sont ces joueurs facétieux qui ridiculisent une équipe de blancs aux allures d'aides-comptables. Mais dans l'histoire du basket, les Harlem Globetrotters sont bien plus que cela. C'est à Chicago et non à Harlem, pendant la prohibition, qu'un jeune juif nommé Abe Saperstein crée cette équipe légendaire avec quelques joueurs de la Negro American Legion League, un championnat réservé aux noirs. Devenus New York Harlem Globetrotters, sans jamais avoir mis les pieds hors de l'Illinois (ils joueront leur premier match à Harlem en 1968), ils se révèlent rapidement invincibles. Leurs premières clowneries apparaissent en 1939, lors d'un match mené 112 à... 5. En 1948 et 1949, ils battent à deux reprises les champions incontestés de NBA, les Minneapolis Lakers de la star blanche George Mikan. A l'époque, celle de la ségrégation, les joueurs noirs ne sont pas admis dans les ligues pro. Les prouesses des Globetrotters vont faire changer les mentalités : en 1950, les Boston Celtics recrutent le premier joueur noir de NBA, Chuck Cooper, et ouvrent les vannes du sport professionnel américain aux athlètes de couleur. Ceux-ci se tournant vers la NBA, contre laquelle il ne peut lutter, Saperstein décide alors de privilégier le spectacle à la compétition. Reece Tatum, petit bonhomme aux bras interminables (il peut toucher ses genoux sans se pencher) mène alors un show qui réunit 50 000 spectateurs à Rio et 75 000 au stade Olympique de Berlin en 1951.
Mais les Globies abritent aussi quelques-uns des plus grands joueurs de l'histoire comme Connie " The Hawk " Hawkins, légende du basket de rue et future star pro, ou Wilt " L'Echassier " Chamberlain, 2,13m en chaussettes, qui marquera un jour 100 points en un seul match de NBA. Avec lui, ces fous du ballon gagnent 224 matches d'affilée entre 1958 et 1959, en jouant jusqu'à trois rencontres par jour. Les années 70 et 80 marquent ensuite la mutation de l'équipe, qui apparaît dans des films et des dessins animés, en monument de la pop culture, seule formation sportive à obtenir, en 1982, son étoile sur le Walk of Fame d'Hollywood. Si elle a remporté 98 % des 22 000 matches disputés depuis 82 ans, l'équipe n'est aujourd'hui plus composée de stars mais d'anciens universitaires un peu justes pour le haut niveau professionnel. Mais elle est toujours capable de battre la crème des équipes universitaires et s'attache à être la plus compétitive possible. Quant au label Globetrotters, il fait toujours recette car la légende est éternelle. La liste des Globies honorifiques en dit d'ailleurs long : de Magic Johnson à Bill Cosby en passant par Nelson Mandela, Henry Kissinger et même... Jean-Paul II. A leurs débuts, Abe Saperstein avait prédit que son équipe jouerait un jour sur Mars. Il n'avait sûrement pas prévu qu'ils gagneraient leur place au paradis.
Harlem Globetrotters. Le 11 mai au Palais des Sports, 350 avenue Jean Jaurès Lyon 7e.