Virilité, force, Haka...seraient-ils les ingrédients du fantasme ?
"Les All Blacks ont ratatiné les italiens! Je les adore même s'il y a de fortes chances qu'ils nous dégomment aussi" lance Sarah, jeune étudiante lyonnaise. Anne vient d'acquérir le maillot modèle femme de l'équipe de France de Rugby. Mais si elle supporte "les petits" lors de cette Coupe du Monde, ce n'est pas l'équipe qui l'a fait plus rêver: " Je suis plus admirative des All Blacks que de l'équipe de France ". Lorsqu'on demande aux femmes quelles équipes de rugby elles connaissent, la réponse est souvent la même chez les néophytes : la France (la réponse en fait est souvent Michalak) et les All Blacks. La prononciation même de ce nom suscite un émoi chez ces dames. Pourquoi tant d'admiration pour les " Tout Noirs " ? Est-ce parce qu'on a souvent tendance à soutenir le plus fort ? Pour Sylvie Bernard, joueuse de rugby à Sassenage en Isère, les All Blacks sont "des forces sûres" : "on sait qu'ils vont arriver au moins en quart de finale". Comme d'habitude, me diriez-vous ? Bien qu'ils aient un palmarès inégalé et qu'ils terrifient les autres équipes, les All Blacks n'ont remporté la Coupe du Monde qu'en 1987.
Non, lorsqu'on parle des All Blacks, la première chose qui vient à l'esprit ce n'est pas leurs victoires, mais le haka et toute la culture qui va avec. "Le haka est une incantation des esprits guerriers...C'est toute la culture maorie, que nous ne connaissons pas, qui leur donne ce côté mystérieux et inaccessible", raconte Virginie. Là où réside le paradoxe, c'est que le fameux haka, ce chant empreint de hargne et de virilité, une fois traduit, est un chant de remerciements, bien moins sanglant que la Marseillaise. En plus, la plupart des All Blacks n'ont rien de maoris et sont des descendants des colons...Alors les terribles néo-zélandais ne seraient pas des machines à gagner possédées par les esprits guerriers de leurs ancêtres ?
Depuis le calendrier des Dieux du Stade, les femmes sont de plus en plus réceptives à la plastique des rugbymen. Virginie expose : "Les All Blacks, c'est la représentation de l'homme massif, sécurisant, fort et indestructible...". Bon nombre d'entre eux atteignent les 2 mètres de haut et défoncent leur balance avec leur centaine de kilos. Mais même si le numéro 10, Dan Carter, est en bonne place pour être le " canon " de cette Coupe du Monde, la virilité à l'état brut impressionne mais ne séduit pas. Sarah par exemple n'est pas très emballée mais en emploierait bien un comme garde du corps: "Des garçons avec un coup de taureau et des cuisses qui font le tour de ma taille, j'aurai peur de mourir étouffée ! Mais quand tu te promènes avec eux dans la rue, au moins tu dois te sentir en sécurité !"
Est-ce parce qu'elles aimeraient bien se mêler à ce monde de guerriers que les femmes admirent les All Blacks? Où, lassées par les métro-sexuels et autres modèles masculins androgynes, elles reviennent aux armoires à glace capables de les protéger ? Toujours est-il que les All Blacks, grâce aux mythes qui les entourent, sont un fantasme à l'état pur : une construction imaginaire qui nous permet d'exprimer un désir plus ou moins refoulé ou de surmonter une angoisse.