stade Gerland tribunes
Guillaume Baviere

Stéphanois, "parasites" ?

Stéphanois "parasites". Le qualificatif, lancé par un responsable des supporters lyonnais à la sono du stade de Gerland dimanche soir avant le derby, ne passe pas pour Olivier Longeon et Bruno Charles, deux élus EELV, respectivement 1er vice-président de la commission sport du conseil régional Rhône-Alpes et vice-président de la Métropole de Lyon.

Ce fut un superbe derby. Engagé, âpre même avec au final un score qui permet à l'Olympique Lyonnais de continuer à rêver au titre et au podium pour l'ASSE. Et, foi de supporters stéphanois, elle a de la gueule et un talent fou cette jeune équipe de l'OL !

Seulement voilà, il y a eu un mot de trop, un mot lourd de sens. Un mot qui gâche la soirée. Juste avant le match, celui qui s'est vu confier par l'Olympique Lyonnais le soin d'animer les tribunes… et surtout un micro connecté à la sono du stade a lancé : "c'est sans doute le dernier derby à Gerland et il est impensable de ne pas remporter une victoire éclatante sur ces parasites".

Stéphanois "parasites" ! Parasites, ce mot n'est pas innocent. Pour les nazis, les juifs étaient des parasites. Pour les génocidaires hutus, les tutsis étaient des parasites. C'est-à-dire des gens à éliminer.

Simple connerie d'un supporter de football dont l’ignorance n’excuse même pas la débilité ? Pas sûr que cette explication soit suffisante …

D'abord parce que les tribunes populaires des clubs de football ont fait l'objet d'une stratégie délibérée d'entrisme et de contrôle de la part de l'extrême droite et des identitaires. Tribune Boulogne à Paris, groupe néonazi à Lyon, racisme omniprésent en Espagne et en Italie. Et ne parlons même pas du sinistre match entre Albanie et Serbie à l’automne, qui s’est terminé en bagarre générale dans le stade à cause d’un drapeau, et des supporters serbe criant « tuez, tuez les albanais ». Les clubs de football ont partout dû faire face, avec une volonté très variable, à la prise de pouvoir de noyaux d'extrême droite dans les clubs de supporters.

Ensuite parce qu'il ne s'agit pas d'un phénomène isolé. Le racisme dans le football est un phénomène malheureusement récurrent. La violence aussi, et elle déborde des stades : il y a quelques mois, une famille en voiture a été prise en chasse par un groupe de supporters lyonnais violents dans une station-service autoroutière au simple prétexte qu'elle était immatriculée dans la Loire.

Enfin, parce que c'est à notre connaissance la première fois qu'une personne s'adressait ainsi à un stade rempli.

La seule réponse des autorités politiques et de celles du football est parfaitement stupide. Au lieu de traiter le problème, on pratique une politique de prix destiné à éloigner des stades le public populaire, supposé violent. Cela a d'abord été le cas en Angleterre, c'est la politique du Paris-Saint-Germain aujourd'hui et ce sera sans doute celle de l'Olympique Lyonnais dans son nouveau grand stade. Cela traduit un profond mépris de la droite et de la gauche bien-pensante des formes d’expression populaire. Salauds de pauvres !

Ce n’est pas en éloignant et en méprisant les pauvres, que l’on enrayera l'évolution violente et raciste de la société. Pendant ce temps, l'extrême droite continue à infuser sa pensée raciste et à gangrener dans des proportions de plus en plus importantes notre société, sur fond de crise économique et politique.

Par leur popularité, les clubs de football ont une responsabilité politique. Ils ne peuvent se contenter d'être des entreprises d'organisation de spectacles sportifs ayant pour seul objectif la rentabilité.

Nous ne pouvons pas faire semblant de ne pas voir, ou de minorer le problème en le prétendant isolé. Nous devons éradiquer le racisme et réhabiliter la culture populaire. Sinon, nous assisterons à une multiplication des conflits et des crimes identitaires et racistes, ici même, en France et dans toute l’Europe. 

Et le processus est déjà bien lancé.

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