Taxer à 75% les entreprises sur les salaires de plus de 1 million d’euros. L’annonce a eu l’effet d’une bombe dans le monde du football français. Les présidents de clubs dénoncent une taxe exorbitante qui provoquerait des effets néfastes sur le sport préféré des Français.
"La mort du foot français". Voilà ce que redoute Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football professionnel (LFP). Selon une récente estimation, 112 joueurs du championnat de Ligue 1 gagneraient aujourd’hui plus de 1 million d’euros par an. Pendant deux ans, leurs clubs devront donc s’acquitter d’une taxe à 75% sur leur salaire. Et faire le dos rond, s’ils le peuvent. "C’est très impactant pour le foot car il se trouve dans un marché globalisé international où les salaires se négocient en net d’impôt et net de charge",regrette Frédéric Bolotny, économiste du sport spécialisé dans le football. La mesure devrait coûter aux alentours des 82 millions d’euros pour les clubs selon la LFP.
"Ils s'en iront"
Pour sa part, Jean-Michel Aulas, le président de l’Olympique lyonnais, prévoit un coût de 15 à 17 millions d’euros pour son équipe. Un coût non négligeable pour un club dans le rouge avec un bilan de -28,5 millions d’euros en 2012. Cette taxation exorbitante pour les grosses écuries de Ligue 1 provoquerait donc des effets néfastes pour le foot français mais pas seulement. "Les joueurs sont de bons contribuables pour l’Etat. Si les clubs ne leur donnent plus le même salaire alors ils s’en iront", prévient Bolotny. La taxe à 75% pourrait donc produire l’inverse de ce qu’espère le gouvernement. Mais heureusement pour François Hollande, la mesure ne gênera pas les patrons qataris du PSG qui envisagent encore un recrutement extraordinaire pour cet été.
"Politiquement, il est difficile d’exonérer les clubs"
Mais la longue descente aux enfers de la Ligue 1 ne date pas d’aujourd’hui. Et du retour de la gauche au pouvoir. La suppression du droit à l’image collective (DIC) par le gouvernement Sarkozy en 2011 avait déjà provoqué un tollé. Cette mesure permettait aux clubs professionnels d’être exonérés de 30% de charges sociales sur la rémunération versée aux joueurs. Déjà à l’époque, Jean-Michel Aulas et les présidents de L1 s’indignaient de cette décision. "Une perte de 6 millions d’euros", clamait alors l’ancien patron de la CEGID. Cette fois-ci, il est question d’environ 15 millions d’euros pour le club rhodanien soit environ 10% du budget de l’OL. "C’est un coup de canif en plus", déplore Frédéric Bolotny.
Avant de préciser. "Politiquement, il est difficile d’exonérer les clubs de foot pendant cette période de crise. Surtout avec la mauvaise image que ce sport a véhiculé récemment". Si le football français a perdu sa compétitivité depuis plusieurs années, la construction des grands stades en vue de l’Euro 2016 suscite l'espoir de relancer l’économie du ballon rond. A certaines conditions. "Les clubs ont besoin d’avoir un projet de développement économique derrière les stades. Si les ressources du stade et de sponsoring ne sont pas mieux développées, ça ne servira à rien. Les enceintes seront vides", s'inquiète enfin Bolotny.