La nouvelle est tombée cette nuit : Facebook va racheter l'entreprise Oculus VR, connue pour son casque de réalité virtuelle, l'Oculus Rift. Cette acquisition marque peut-être la fin d'un rêve, celui d'un périphérique de réalité virtuelle dédié aux jeux vidéo à un prix inférieur à 400 euros.
Avant d'être rachetée par Facebook pour deux milliards de dollars, l'entreprise Oculus VR était avant tout le rassemblement de passionnés de jeux vidéo qui pensaient pouvoir fabriquer un casque de réalité virtuelle accessible et simple à prendre en main. Ainsi, en 2012, ils ont lancé leur projet Oculus Rift sur la plateforme de financement collaboratif, Kickstarter. En quelques semaines, leur concept attire plus de 9 500 investisseurs et permet de récolter 2,4 millions de dollars. Grâce à ce succès et deux levées de fond, l'Oculus Rift voit enfin le jour en 2013 dans une version réservée aux développeurs. Le modèle destiné au grand public devait voir le jour fin 2014.
Se plaçant sur la tête, l'Oculus Rift permet à son utilisateur d'être propulsé directement dans un jeu vidéo grâce à un écran placé directement devant ses yeux. L'effet 3D est parfait tandis qu'un dispositif de reconnaissance de mouvements permet de bouger la tête dans ce monde virtuel et de regarder autour de soi naturellement. Toute personne qui essaye l'Oculus Rift est immédiatement conquise. Les sensations sont saisissantes et le cerveau se laisse rapidement berner. En effet, il est impossible de ne pas avoir la tête qui tourne lorsque l'on fait des montagnes russes virtuelles, comme dans le monde réel
La fin d'un rêve
Dès lors, difficile de ne pas voir le rachat d'Oculus VR par Facebook d'un mauvais œil. Dans un communiqué de Mark Zuckerberg, créateur du réseau social affirme : "Le mobile est la plateforme d'aujourd'hui, et maintenant nous serons près pour les plateformes de demain […] l'Oculus est une chance de créer la plateforme la plus sociale jamais réalisée et change la manière dont nous travaillons, jouons et communiquons". Par ailleurs ce même communiqué précise que l'entreprise Oculus VR restera basée à Irvine en Californie et continuera de travailler sur l'Oculus Rift. Malgré ces bonnes paroles, la méfiance est de mise pour plusieurs raisons. Jusqu'à présent Facebook gagne principalement de l'argent en commercialisant de la publicité. Ainsi, entre ses mains, l'Oculus Rift apparaît désormais comme un nouveau vecteur pour afficher encore plus de réclames, en témoigne la déclaration de Mark Zuckerberg sur le mobile "plateforme d'aujourd'hui", Oculus Rift celle de demain.
Une nouvelle interface homme / Facebook ?
Destiné avant tout aux jeux vidéo sur PC ou depuis un smartphone, le casque de réalité virtuelle va-t-il être perverti pour devenir un simple robinet à publicité ? La question mérite d'être posée. De même, la promesse de "créer la plateforme la plus sociale jamais réalisée" laisse la porte ouverte à plusieurs possibilités. Facebook se prépare-t-il à lancer une réalité virtuelle dans laquelle les utilisateurs pourront rencontrer leurs amis tel un Second Life de nouvelle génération.
Par conséquent, alors qu'aujourd'hui l'interface homme / Facebook passe par le duo clavier / souris ou l'écran tactile, demain, sera-t-elle possible grâce à l'Oculus Rift d'évoluer directement dans le réseau social. Le casque permettrait de regarder autour de soi et une manette de jeu de se déplacer. Il est même possible d'envisager une forme de tapie roulant ou glissant qui autoriserait de marcher naturellement comme c'est le cas aujourd'hui de l'Omni (voir vidéo ci-dessous).
Le créateur de Minecraft a peur
Facebook ne va pas se contenter de commercialiser un simple périphérique pour PC ou console de jeu, devenant ainsi simple constructeur d’accessoire. Le réseau social a davantage d'ambitions et c'est bien ce qui inquiète. Ainsi, le créateur de Minecraft, Markus Persson, vient d'annoncer via son Twitter officiel qu'il arrêtait le portage de son célèbre jeu vidéo sur Oculus Rift car : "Facebook me fout la trouille". Par ailleurs, la nouvelle version du casque de réalité virtuelle qui arrivera cet été, toujours réservée aux développeurs, sera commercialisée avec une caméra pour reconnaître les mouvements de la tête. Une caractéristique anodine en temps normal qui d'un coup prend une autre tournure avec Facebook derrière. En effet, qui aura envie de filmer son salon ou son bureau tout en sachant que le périphérique provient de l'une des entreprises spécialisées dans la collecte de données personnelles et sa commercialisation. De là à penser que l'Oculus Rift est un cheval de Troie pour mieux rentrer dans nos maisons, il n'y a qu'un pas que le principe de précaution permet de franchir allègrement.
Facebook fossoyeur, Sony sauveur ?
Dans ce contexte, le rachat d'Oculus VR par Facebook est loin d'être une excellente nouvelle. Le réseau social va permettre à la réalité virtuelle d'être davantage connue du grand public tandis qu'Oculus VR devrait recevoir d'important financements pour continuer son travail. Néanmoins, les faits sont durs et l'avenir de l'Oculus Rift en matière de périphérique est incertain. Mark Zuckerberg a bien quelques choses en tête, la vraie question est de savoir de quoi il s'agit.
Paradoxalement, dans ce contexte, le grand gagnant de ce rachat pourrait être Sony. Le géant japonais à présenté la semaine dernière son propre casque de réalité virtuelle, le projet Morpheus. Destiné à la PlayStation 4, il a été conçu comme un objet de divertissement avant tout. Après avoir joué publiquement la carte du gentil constructeur sauveur du jeu vidéo face à un Microsoft qui voulait imposer une Xbox One toujours connectée à Internet, Sony risque bien de se retrouver une nouvelle fois dans la peau du "dernier espoir". La guerre de la réalité virtuelle ne fait que commencer et en l'espace d'une semaine deux géants ont abattu leurs cartes.
