Richard Brunel est à la mise en scène de Wozzeck © Jean-Louis Fernandez

"Wozzeck" à l’Opéra de Lyon : psychologie d’un meurtre

La saison de l’Opéra de Lyon débute avec Wozzeck d’Alban Berg, sur fond de crime passionnel porté par la démarche avant-gardiste du compositeur viennois.

Composé entre 1912 et 1922, Wozzeck d’Alban Berg – l’un des trois fleurons de l’“école viennoise” de l’époque comprenant Arnold Schönberg et Anton Webern avec qui il expérimente des formes de sorties du discours tonal (sérialisme, dodécaphonisme…) – s’inspire de la pièce Woyzeck de Georg Büchner.

Cette dernière est elle-même inspirée par un fait divers tragique survenu en 1821 : la condamnation pour meurtre d’un soldat déclaré coupable de l’assassinat, par sept coups de couteau, de sa maîtresse. L’originalité de ce triste épisode tient dans le fait que, pour la première fois, la justice avait mis en œuvre une expertise psychologique de l’auteur du féminicide visant à rechercher d’éventuelles circonstances atténuantes.

À la sortie de la première viennoise de la pièce en 1914, Berg en sort bouleversé avec la conviction qu’il s’agit d’un excellent sujet pour un opéra. Son maître et complice Arnold Schönberg tentera de l’en dissuader, sceptique quant au fait que ce thème se prête à une œuvre lyrique.

Abandonnant pour un temps cette idée – aidé en cela par le départ pour la guerre –, Berg n’en démord pourtant pas et reprend dès 1917, à l’occasion d’une permission, l’écriture de son premier opéra.

Dans son adaptation, le compositeur se concentre sur la figure du soldat meurtrier et son appartenance à la classe populaire, celle des pauvres et des exploités sur laquelle s’abat la fatalité. C’est en ce sens une œuvre socialisante – rappelons qu’elle sera interdite par le régime nazi en 1933 eu égard, notamment, à l’antimilitarisme du compositeur.

Dialectique de la forme

Considéré comme le premier opéra d’avant-garde du XXe siècle, Wozzeck adopte, sous la plume de Berg, un discours s’éloignant radicalement des canons romantiques et de la tonalité classique. La vocalité est également un domaine de recherche et Berg a recours à divers modes tels que le parlé-chanté, le cri, le chuchotement ou le rire en rythme.

Il mobilise pourtant l’héritage du passé par le recours à des formes anciennes codifiées (pavane, gavotte, passacaille, polka, fugue…) qu’il stylise à sa guise.

Première production de la saison de l’Opéra de Lyon, Wozzeck est le fruit d’une collaboration avec l’Opéra royal de Stockholm qui verra les deux maîtres d’œuvre lyonnais – Richard Brunel à la mise en scène et Daniele Rustioni à la direction – faire leur grande rentrée.

À noter la présence de l’excellent baryton-basse Stéphane Degout dans le rôle-titre.

Wozzeck –Du 2 au 14 octobre à l’opéra de Lyon

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