Alain Platel Mahler Projekt Biennale 2016
© Chris Van der Burght

Biennale de la danse 2016 : le corps, racine de la danse !

La 17e Biennale de la danse ressemble à de la danse comme on aime : sans chichis, avec des surprises et toujours le souci des publics. Mais cette édition (dévoilée ce lundi) a ceci de particulier qu’elle donne à voir, de manière intense, ludique et charnelle, la matière corps du danseur et l’âme de l’interprète. Panorama.

Mahler Projekt – Chorégraphie d’Alain Platel © Chris Van der Burght

© Chris Van der Burght
Mahler Projekt – Chorégraphie d’Alain Platel.

Un parcours savant-populaire

Avec 15 % de budget en moins (6,7 millions d’euros au lieu des 7,8 millions de 2014) dont 5 % de subventions publiques et une Biennale ramenée à 17 jours, Dominique Hervieu semble avoir redoublé d’imagination pour créer l’événement avec 37 spectacles (dont 23 créations ou premières françaises).

Un des fils conducteurs sera le parcours créé entre la danse savante et la danse populaire dont s’emparent nombre de chorégraphes pour revivifier la création contemporaine. Les comédies musicales qui ont accompagné des crises économiques ou des mutations de société en font partie. Elles seront revisitées par la “French touch” de Jean-Claude Gallotta qui dans Volver expérimente le lien entre la danse de Cunningham (chez qui il s’est formé) et ce genre qu’il considère comme noble, le tout sur des chansons d’Olivia Ruiz. Ou encore par Yan Duyvendak dans un Sound of Music qui s’annonce décapant. Construit comme un show clinquant venu de Broadway, le spectacle fait surgir une bande de jeunes qui dansent sur fond de naufrage économique et écologique décrivant une vie sans espoirs.

Battle of styles / Corbeaux (B. Ouizguen) © Christoph Seidler / Araf Bendaoud (montage LC)

© Christoph Seidler / Araf Bendaoud
Battle of styles / Corbeaux (B. Ouizguen).

On découvrira aussi Bouchra Ouizguen avec Corbeaux dansé uniquement par des femmes âgées, autour du rituel et de la transe. Très attendu, Christian Rizzo présente Le Syndrome Ian, troisième acte d’une trilogie sur les danses populaires qui aborde, après les danses folkloriques méditerranéennes, les danses de club. On n’oubliera pas un événement jubilatoire, le Battle of styles qui confrontera les danseurs du Pockemon Crew (hip-hop), du ballet Preljocaj et de la Forsythe Company (néo-classique) et du Tanznetz de Dresde (contemporain). Un mélange des genres et une première française qui va électriser le palais des sports de Lyon !

Découvrir et discuter avec de grands interprètes

Christiana Morganti dans “Jessica and Me” © Virginie Khan

© Virginie Khan
Christiana Morganti dans “Jessica and Me”.

Dominique Hervieu a eu cette très belle idée d’inviter, avec leur création, de grands interprètes ayant contribué au succès de grands chorégraphes. Ainsi Cristiana Morganti, qui a dansé toutes les pièces de Pina Bausch, parle dans le solo Jessica and Me de son travail avec Pina, tout en questionnant son parcours de danseuse et son rapport au corps.

Les Lyonnais retrouveront Louise Lecavalier, la muse du chorégraphe québécois Édouard Lock qui a hélas arrêté sa compagnie. Elle présente un duo qui met les corps dans des états mécaniques, des mouvements presque déshumanisés.

Olivia Grandville a dansé avec Dominique Bagouet dans ses dernières créations. Sa pièce Combat de Carnaval et Carême explore avec dix danseurs le rythme.

Plus jeune danseur à avoir intégré la compagnie Merce Cunningham, Jonah Bokaer vient pour la première fois en France, avec un travail très visuel sur une musique de Pharel Williams.

Ce focus, accompagné de discussions avec les interprètes, est une manière subtile d’approcher la danse autrement que par la notion de représentation, abordant la danse de l’intérieur, celle de l’ombre, des répétitions, du vécu d’artistes que l’on met peu en lumière. Il réjouira aussi les passionnés de danse qui ont vu les œuvres des chorégraphes concernés.

Les événements

La Biennale s’ouvre en même temps que la grande exposition au musée des Confluences sur les “Corps rebelles”, retraçant l’histoire de la danse depuis 1913. Symbole de modernité mais aussi d’un corps rebelle annoncé, celui du danseur Nijinski, Le Sacre du printemps sera à l’honneur avec des films sur les versions de plusieurs chorégraphes.

Maurice Béjart, un autre rebelle, sera également présent, dansé par le CNDC d’Angers sous la baguette du chorégraphe Hervé Robbe, avec un extrait d’une pièce révolutionnaire, Messe pour le temps présent, sur la musique de Pierre Henry.

Le 18 septembre, le défilé de la Biennale sera au rendez-vous autour de la thématique “Ensemble”, avec un final magistral sur la place Bellecour. Le circassien Yoann Bourgeois posera son trampoline circulaire au milieu de la place, entouré de la foule qui terminera la fête par une tarentelle façon “rumba”.

Corps en défis… Corps engagés !

Le Belge Jan Fabre se lance, seul, dans une performance sur un vélo au vélodrome du parc de la Tête-d’Or, histoire de ne pas battre le record du monde de l’heure d’Eddy Merckx.

Chorégraphies de Catherine Gaudet (à gauche) et Fabrizio Favale © Mathieu Doyon / Giovanna Bigazzi (Montage LC)

© Mathieu Doyon / Giovanna Bigazzi
Chorégraphies de Catherine Gaudet (à gauche) et Fabrizio Favale.

Catherine Gaudet est à ne pas rater avec un quatuor de danseurs sur la force du désir sexuel.

Inconnu à Lyon, l’Italien Fabrizio Favale réunit huit danseurs masculins et une femme DJ, entre danse virtuose, danse archaïque et hypnotique.

Alain Platel revient avec une nouvelle création, Mahler Projekt (notre photo de une), et neuf danseurs pour se pencher sur l’Europe juste avant la Première Guerre mondiale. On ira les yeux fermés !

Olivier Dubois revient en force avec vingt-quatre danseurs dans Auguri, une quête éperdue du bonheur. Les danseurs s’entraînent actuellement sur l’endurance comme des athlètes de haut niveau pour tenir le rythme de cette course sur scène.

On n’oubliera pas le duo Tordre de Rachid Ouramdane, qui explore les fondements de la danse chez deux femmes dont une a un bras en prothèse et l’autre explore à l’envi, depuis son enfance, la notion de cercles dans l’espace. La rencontre s’annonce fragile et sensible.

Tordre – Chorégraphie de Rachid Ouramdane © Patrick Imbert

© Patrick Imbert
Tordre – Chorégraphie de Rachid Ouramdane.

Une Biennale au plus près de la danse

Construite pour beaucoup autour de formes légères (restrictions budgétaires obligent) et sans scénographies grandiloquentes, cette Biennale nous donne l’heureuse sensation de nous rapprocher d’une certaine intimité chorégraphique, comme si le corps reprenait sa place. Pour nous dire que c’est de lui que tout jaillit. Le sens du mouvement, l’âme de la danse, l’émotion du danseur… et la nôtre !

Biennale de la danse – Du 14 au 30 septembre, à Lyon.
Défilé le 18 septembre.
Horaires et réservations sur le site Internet de la Biennale.
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Et pour tout savoir sur la saison de la Maison de la danse, cliquer ici.

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