Et à l'occasion de la constitution des listes européennes, ces cinq femmes socialistes se sont opposées au maire de Lyon, et lui ont fait subir son premier revers fédéral. (Article paru dans le numéro d'avril de Lyon Capitale)
Un militant socialiste s'interroge : "Ont-elles émergé parce qu'elles avaient déjà ce caractère de chiens ou l'ont-elles adopté pour émerger ?". Une chose est sûre : elles ont bien émergé ! Trois d'entre elles sont maires. Les deux autres, Sylvie Guillaume et Farida Boudaoud, vont représenter le Rhône lors des prochaines européennes. Cette dernière vient, avec Nathalie Perrin-Gilbert, d'être promue au secrétariat national du PS - le gouvernement du parti.
"Collomb n'est pas un dictateur"
Entrées en politique à force de militantisme, elles ont appris à jouer des coudes pour s'imposer. Particularité : loin de s'affronter, elles se sont entraidées. "Je pourrais leur tourner le dos sans craindre qu'elles y enfoncent un poignard", assure Sylvie Guillaume. Grâce à la parité, elles se sentent protégées contre les mouvements d'humeur de responsables socialistes. Aussi font-elles montre d'autonomie, même face au leader des socialistes du Rhône.
Ce ne sont pas de jeunes recrues dociles, façon Najat Vallaud-Belkacem. Ce ne sont pas non plus des compagnons de route de Gérard Collomb, comme Alexandrine Pesson ou Nadine Gelas, liées à lui par une longue fidélité. Il a donc dû apprendre à composer avec elles. "Collomb n'est pas un dictateur, même s'il n'a pas été facile de soutenir un autre candidat que Royal à la primaire de 2006 désignant le candidat socialiste à la présidentielle", glisse un militant. Or trois d'entre elles ont justement fait un choix différent, notamment Christiane Demontès, strauss-kahnienne, qui tient alors la fédération du Rhône.
"Il n'a qu'à rejoindre Sarkozy"
Transporté par son triomphe aux municipales de l'an dernier, Gérard Collomb a depuis changé de dimension, pensant du même coup faire taire ceux qui ne le suivaient pas totalement. Or loin d'être impressionnées, ces élues militantes trouvent à redire à son succès. Elles lui reprochent sa trop grande ouverture au centre et à la société civile quand il ne retient que sept adjoints socialistes sur vingt-et-un. "On a mis à l'écart des gens qui n'avaient pas démérité. Le PS a payé le prix fort", maugrée Sylvie Guillaume. Nathalie Perrin-Gilbert pointe la nomination du sarkozyste Richard Brumm comme adjoint aux finances. "Si c'est ça le modèle lyonnais qu'il veut exporter, il n'a qu'à faire comme Besson, et rejoindre Sarkozy", lâche-t-elle récemment. Ambiance... Qu'importe ces critiques, Collomb a déjà les yeux tournés vers Paris : lors du congrès de Reims, il entend peser sur le choix du premier secrétaire. Aussi veut-il une fédération en ordre rangée derrière sa motion, cosignée avec Royal. Certes, il obtient un score très net en sa faveur, mais aucune ne le soutient, Annie Guillemot et Farida Boudaoud se rangeant derrière Aubry, les autres derrière Delanoë, son grand rival.
Le face à face entre elles et lui s'est prolongé ces derniers mois lors de la constitution des listes européennes.
Curieusement, les rôles se sont inversés : c'est lui le frondeur minoritaire qui ferraille contre la direction du parti. Il s'insurge contre le parachutage de Vincent Peillon dans le sud-est, ourdit une pétition, intime aux militants à s'abstenir ou à voter contre ladite liste. "Il a franchi la ligne jaune : nous avons lancé la contre-offensive", raconte Farida Boudaoud, 4e de la liste. Un texte appelant à investir la liste est co-signé par nombre d'élus... dont les cinq amazones. "Par parallélisme des formes, je tenais à donner aux militants nos arguments", fait valoir Sylvie Guillaume, en 2e position. Le maire n'est pas content, et le lui fait sèchement savoir. D'autant qu'il accuse le coup : 70,7 % des militants suivent au final la ligne nationale. Mauvais perdant, il a beau souligner la faible participation, il essuie à cette occasion son premier revers fédéral. Pourrait-il être tenté de leur faire payer ? Christiane Demontès ne le croit pas : "il s'énerve de notre comportement mais il n'est pas rancunier, suppose-t-elle, mutine. Au fond, il nous aime bien". Elles le châtient bien.
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