Boris Tavernier, député Les Ecologistes de la 2e circonscription du Rhône, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
Alors que les Ecologistes comme les Socialistes se déclaraient prêts à faire des compromis si Emmanuel Macron nommait un Premier ministre issue de la gauche, le choix de François Bayrou ne passe toujours pas pour le député lyonnais écologiste Boris Tavernier. "François Bayrou c'est quand même celui qui a inventé en même temps le ni de droite, le ni de gauche il y a une quinzaine d'années. C'est le plus proche de Macron, nommé par Macron pour faire la politique de Macron", déplore-t-il. Il pronostique d'ailleurs une espérance de vie limitée pour le futur gouvernement Bayrou.
Boris Tavernier fixe ses lignes rouges pour un éventuel pacte de non-censure : "on veut absolument, évidemment, revenir sur l'abrogation de la loi retraite. On voudrait aussi que le gouvernement Bayrou puisse, en tout cas, ne pas utiliser le 49.3 nous semble indispensable pour avoir des vrais débats démocratiques au sein de l'hémicycle, les questions environnementales et sociales aussi, évidemment, et puis retravailler le budget avec plus de recettes et limiter aussi ces économies qui font un mal fou à nos services publics".
La retranscription intégrale de l'entretien avec Boris Tavernier
Bonjour à tous et bienvenue, vous regardez 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale et aujourd'hui nous sommes avec Boris Tavernier. Vous êtes député Les écologistes de Lyon. On voulait revenir avec vous sur cette actualité politique toujours folle. La France a un nouveau Premier ministre, François Bayrou qui succède à Michel Barnier. On est passé d'un Premier ministre issu d'un groupe d'une quarantaine de députés à un Premier ministre qui dispose d'un groupe d'une trentaine de députés acquis à sa cause. Est-ce que pour vous, ce gouvernement va finalement reproduire le scénario du gouvernement Barnier ?
C'est fort probable. Bayrou c'est quand même celui qui a inventé en même temps le ni de droite, le ni de gauche il y a une quinzaine d'années. C'est le plus proche de Macron, nommé par Macron pour faire la politique de Macron. Donc, évidemment, il y a quand même peu de chances que ça change. D'autant plus quand on voit que la première personnalité politique invitée à échanger avec lui, c'est Bruno Retailleau. J'ai des doutes sur un changement de cap.
Est-ce qu'il y a des contacts qui ont été noués ? Il a aussi reçu les socialistes, les écologistes. Est-ce que vous, vous pouvez envisager, les écologistes, de participer à un gouvernement ou en tout cas de collaborer avec ce gouvernement ?
Non, on aurait participé à celui de juillet si les votes avaient été respectés. Aujourd'hui, on a quand même de grosses lignes rouges, c'est un peu le terme à la mode, les lignes rouges. Nous, on veut absolument, évidemment, revenir sur l'abrogation de la loi retraite. On voudrait aussi que le gouvernement Bayrou puisse, en tout cas, ne pas utiliser le 49.3 nous semble indispensable pour avoir des vrais débats démocratiques au sein de l'hémicycle, les questions environnementales et sociales aussi, évidemment, et puis retravailler le budget avec plus de recettes et limiter aussi ces économies qui font un mal fou à nos services publics.
Vous pensez-vous, si François Bayrou s'engage à ne pas utiliser le 49.3, vous ne vous engagez en échange à ne pas déposer de motion de censure ?
En tout cas, moi, je ne m'engage pas du tout à ne pas déposer une motion de censure parce qu'on ne sait pas du tout comment ça va évoluer ces prochaines semaines. La loi immigration que nous prépare Otaio, moi, je n'en veux pas. Elle était déclarée, en tout cas, tout ce qu'il veut reprendre, était déclarée comme anticonstitutionnelle il y a quelques mois. Donc moi, je n'ai pas du tout envie d'aller dans cette dérive. Donc évidemment qu'on va plutôt surveiller ce qui se passe, ce qui se dit, mais juste le 49.3 n'est pas suffisant. Il y a quand même aussi beaucoup d'autres enjeux et on attend de voir. On discute, c'est normal. On était échangé avec Michel Barnier, c'est normal d'aller discuter avec François Bayrou, mais on veut voir ce qu'il va nous proposer. Je suis sceptique, je ne fais pas non plus de film.
Un jour, il faudra que la France ait un budget. Si vous deviez censurer ou en tout cas mettre en minorité le gouvernement, qu'est ce qui se passera derrière pour vous? Quelle est la sortie, quelle peut être la sortie de cette crise? Comment est ce que la France peut adopter un budget?
Aujourd'hui, on a quand même vu pendant le pendant le budget initial que des choix différents avaient pu être pris. On a réussi à voter beaucoup de nouvelles recettes. Et c'est cette volonté de ne pas toucher aux riches qui est quand même compliqué. Je pense qu'il faut quand même aujourd'hui prendre l'argent là où il est. Les super profits, le patrimoine, ça, le modem était d'accord avec vous. Le modem avait appuyé vos votes. C'est pour ça que s'il n'y a pas de 49.3, je pense qu'on peut gagner des amendements, des articles qui pourront permettre d'améliorer les recettes. Donc, je pense qu'il y a une possibilité si on va jusqu'au bout des votes. Moi, ce qui m'a le plus scandalisé dans ma jeune vie de député, c'est lors du projet de loi de finance de la Sécurité sociale. Il est minuit, il nous reste quelques articles. L'Assemblée est d'accord pour prolonger jusqu'à 5 heures du matin pour finir de manière démocratique ses votes et le gouvernement balaye tout d'un revers de la main. Le texte part en version initiale au Sénat. Donc, c'est un mois et demi de travail de 9 heures à minuit qui est balayé. Donc voilà, moi, j'ai pas envie de revivre ça.
Chacun a ses lignes rouges, vous avez les votes, le gouvernement, le Bloc central a les siennes. Finalement, ça flèche quand même une forme d'impasse.
Je pense qu'on va être dans une forme d'impasse parce qu'il y a toujours eu ce déni de démocratie aussi de la part du président. Oui, on n'a pas gagné les élections. En tout cas, on n'a pas de majorité absolue. Néanmoins, on est arrivé premier aux Jeux olympiques. On peut avoir un millième d'écart avec le deuxième. C'est celui qui a fait le meilleur temps, qui est médaille d'or et qui va avoir cette médaille autour du cou. Donc, on aurait dû déjà pouvoir proposer un gouvernement et proposer des parties de notre programme. Je ne suis pas évidemment qu'aujourd'hui, le programme avec le programme, ça ne passera pas. Donc, on doit en tout cas, on aurait dû avoir notre chance. Là, aujourd'hui, le président de la République continue.
Vous auriez pu en faire quoi ? Les autres partis vous auraient censuré.
Ça aurait duré trois jours l'expérience...
On n'en sait rien. On ne saura jamais. Là, c'est de la politique fiction. Mais moi, je pense que comme on l'a montré pendant le budget, on aurait pu avoir des petites victoires et réussir à faire avancer quelques textes pour améliorer la vie des Français. Aujourd'hui, moi, ce qui m'inquiète le plus, vous savez, je viens du milieu associatif. J'ai travaillé beaucoup dans les banlieues avec des publics précaires. Ce qui me ce qui m'insupporte aujourd'hui, c'est pendant toutes ces discussions, pendant ce déni de démocratie et de continuer perpétuellement dans le macronisme, c'est que les gens souffrent. Les gens ont faim. Les frigos sont vides. Ils n'arrivent pas à payer leur électricité. Ils n'arrivent pas à pouvoir se soigner. Et ça, il faut qu'on y réponde au plus vite. Il y a quand même une urgence sociale et environnementale en France. Donc là, il faut y aller maintenant.
On a vu ce qui a évolué finalement autour de la nomination de François Bayrou. C'est qu'il y a quand même des lignes qui, elles, ont bougé, en tout cas politiquement. On voit que le nouveau front populaire s'est fissuré puisque vous, les écologistes et les socialistes, vous n'êtes plus tout à fait sur la même ligne que les Insoumis. Est-ce que le NFP est mort ?
Pas du tout. Je pense que le NFP n'est pas mort. Il y a beaucoup d'échanges. On le prouve aussi ici à Lyon, avec Marie-Charlotte Garin, avec Anaïs Belouassa et Sandrine Runel. On fait énormément de choses en commun. Il y a beaucoup d'échanges, de visites communes au niveau parlementaire, c'est la même chose entre différents députés. Là, il y a juste des choix différents de rencontrer ou non le Premier ministre. Quand on est toujours d'accord sur le programme, on est toujours d'accord sur ce qu'on a envie de défendre et ce qu'on a envie de porter.
L'ancien monde (qui mène à leur perte les générations suivantes), s'accrochera au pouvoir jusqu'à la fin, car il ne peut admettre qu'il ait tort.