Le 1er avril dernier, l'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi intégrant la notion de non-consentement dans la définition pénale du viol. Une loi portée par la députée de la 3e circonscription du Rhône Marie-Charlotte Garin.
C'est un grand pas pour la lutte contre la culture du viol. Mardi 1er avril, l'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi intégrant la notion de non-consentement dans la définition pénale du viol. Une proposition nommée "loi Riotton-Garin", avancée par la députée de la 3e circonscription du Rhône Marie-Charlotte Garin (groupe écologiste et social) et de l’ancienne députée de la 1re circonscription de Haute-Savoie Véronique Riotton (Renaissance).
Le texte adopté en première lecture a été voté pour à 161 voix, et contre à 56 voix. Il est le fruit de quatorze mois de travail, réalisé avec la mobilisation d'un groupe d'experts juridiques et d'associations. Ce dernier prévoit notamment l'inscription dans le code pénal de la notion de consentement à un rapport sexuel.
"Certaines victimes ne se reconnaissent pas dans la définition actuelle"
La proposition reformule ainsi la définition légale de l'agression sexuelle. Les mots "commise avec violences, contrainte, menace ou surprise", seront remplacés par les mots "non-consentie commise sur la personne de l’auteur ou sur la personne d’autrui". Afin d'éclairer le terme "non-consenti", une précision sera également stipulée : le consentement est "spécifique", il peut être retiré avant ou pendant l’acte à caractère sexuel, et "ne peut être déduit du silence ou de l’absence de résistance de la personne."
"Cette loi apporte un impact éducatif", affirme la députée Marie-Charlotte Garin à l'origine de la proposition. Un impact éducatif qualifié "d'indispensable", en vue du programme d'éducation sexuelle instauré dès septembre prochain. "Alors que le programme d'éducation sexuelle va être dispensé dans les école, la loi sur le consentement se doit d'être très claire afin que chacun l'intègre de la bonne manière", explique-t-elle.
Selon la députée, cette réédition devrait également permettre aux victimes de mieux se reconnaitre dans la définition du viol : "certaines victimes ne se reconnaissent pas dans la loi actuelle", explique Marie-Charlotte Garin. Elle poursuit : "dans la définition actuelle, on entend le stéréotype de viol violent et agressif, alors que ce n'est pas forcément le cas." La modification constitue également un outil supplémentaire pour les juges, permettant d'installer un cadre plus restreint autour des décisions prises : "jusqu'à maintenant la définition reposait sur la juriprudence et pouvait donc être interprétée différemment selon les juges", explique la député. "Avec cette loi, les agresseurs seront tous jugés de la manière, peu importe le juge et l'endroit."
PS et RN aux mêmes loges
Avec 56 voix contre, notamment issues du Rassemblement national et du Parti socialiste, le texte semble faire débat. Pour certains, celui-ci serait même un "fausse bonne idée". En février dernier, des députés socialistes et l'association "Osez féministe" avaient publiés leurs inquiétude dans Le Monde, quant à cette proposition de loi. Selon eux, cette inscription du non-consentement aurait un potentiel dangereux pour les victimes. Ces derniers craignent que le texte vienne centrer le débat sur le consentement et fasse ainsi peser la preuve du consentement sur les victimes de viol.
A cela, Marie-Charlotte Garin rétorque : "aujourd'hui, les agresseurs utilisent cette loi contre les victimes." Elle précise ensuite : "Au contraire, cette nouvelle définition va placer l'agresseur au centre du débat, on va lui demander de justifier son acte." L'introduction du non-consentement dans la législation vise ainsi à soulager les victimes de l'obligation de fournir des preuves et de se justifier, comme c'est le cas actuellement.
Pour justifier ses propos, la député évoque l'exemple de la Suède ou du Dannemark, où la notion de non-consentement a été intégrée dans la législation: "Nous avons pu voir que cela fonctionnait bien", affirme-t-elle.
Si la proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale, celle-ci sera présentée au Sénat en juin prochain : "Tous les feux ne sont pas verts mais ils ne sont pas rouges non plus, en attendant on va poursuivre notre travail et espérer que les autres députés nous suivent", partage la député. "Un peu moins de 20 ans après le mouvement Mee Too et après le récent drame de l'affaire Pélicot, nous ne pouvons pas revenir en arrière", conclut-elle.
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