La guerre et une promesse, voilà deux choses inconciliables. Surtout quand on promet au père de son ami, avec lequel on part combattre, qu’il reviendra vivant. Car la guerre elle-même est une promesse monstrueuse. Celle, tenue, qu’une fois qu’elle aura mis la main sur vous elle ne vous lâchera plus. Que, même rentré vivant, elle sera toujours là à vous ronger les os.
C’est l’histoire (à succès l’an dernier) racontée dans Yellow Birds par un immense écrivain ayant servi en Irak (et non l’inverse). L’histoire de Bartle, impuissant à ramener le très jeune Murph à son père, confronté qu’il est à la dévoration permanente de la guerre.
Cela se passe au Moyen-Orient il y a dix ans, mais ce pourrait être un livre sur les tranchées des Ardennes, la bataille de Bastogne ou la guerre du Vietnam. On y chante des chants immémoriaux sur les yellow birds – “Un moineau jaune/ Au bec jaune/ S’est penché/ Sur ma fenêtre/ J’lui ai donné/ Une miette de pain/ Et j’l’ai éclaté/ Ce putain d’serin” – et l’on s’y fait tirer comme eux, comme des lapins. Ceux qui ne rentrent pas sont morts, ceux qui rentrent morts-vivants. Point de politique là-dedans, pas de morale, juste l’absurdité, la trouille jusqu’aux tripes et le remords qui mange le cerveau.
“Face à la guerre”, Kevin Powers l’a été. Il en a rapporté un roman qui nous hantera autant que cette mangeuse d’hommes le fera avec lui.