Le théâtre de la Croix-Rousse sera désormais identifié par une grande croix ornant ses affiches. Mais c’est surtout ce qu’elles contiennent qui nous intéresse. Panorama de la prochaine saison.
En haut de la “colline qui travaille”, l’orientation musicale, développée depuis l’arrivée aux manettes de Jean Lacornerie, reste forte. Mais le plateau sera cette saison davantage ouvert au théâtre de texte, au nouveau cirque, à la danse (Biennale oblige) et à la philosophie. L’ensemble stimulant notre curiosité entre découvertes de jeunes artistes et relectures parfois iconoclastes de grands textes.
De la musique avant toute chose
Côté spectacle musical, le patron des lieux continuera de mettre la main à la partition, avec un récital intitulé Menu : Plaisirs, qui va de Charles Trenet à Poulenc en passant par Serge Lama et Offenbach. Jean-Paul Fouchécourt y incarnera une sorte de diva masculine, changeant d’apparence au fur et à mesure de son exploration aléatoire de l’histoire de la musique. Jean Lacornerie proposera aussi une mise en scène opératique de Roméo et Juliette, basé sur le livret de Boris Blacher, compositeur allemand qui eut son heure de gloire dans les années 1930. Il continuera en cette occasion sa collaboration avec les chanteurs et l’orchestre de l’Opéra de Lyon.
Autre création maison, Le Roi et moi nous transportera dans le royaume de Siam sur les notes du livret d’Oscar Hammerstein II et d’après l’histoire racontée par Margaret Landon, lointainement inspirée par celle de l’institutrice Leonowens, chargée de l’éducation des enfants du roi Rama IV en 1860. Citons aussi dans les spectacles musicaux une version originale de Didon et Enée où la metteuse en scène Caroline Muttel s’appuiera sur des dessins de Florence Dupré La Tour pour sous-titrer l’intrigue inventée par Henry Purcell.
Des classiques toujours modernes
Trublion connu dans notre région pour quelques mises en scène décapantes, Laurent Brethome sera de retour à la Croix-Rousse avec une version des Fourberies de Scapin qui devrait envoyer du bois.
David Bobée reprendra la mise en scène de Lucrèce Borgia qu’il présente cet été au château de Grignan. On y attend une certaine Béatrice Dalle dans le rôle de l’héroïne hugolienne, femme fascinante et sulfureuse, empoisonneuse, incestueuse, fille de pape et de courtisane, fière et forte dans un monde masculin et violent…
Pour ce qui est des lectures iconoclastes de chefs-d’œuvre, on attend aussi Jean-Michel Rabeux. Il s’attaquera au mythe de la littérature enfantine Peau d’âne avec une mise en scène qui devrait en éclairer le caractère sulfureux. Et il s’emparera des Fureurs d’Ostrowsky avec la ferme intention d’en faire un incroyable carnage puisque l’histoire est (très lointainement) inspirée de celle des Atrides.
Des textes contemporains
Événement de la saison, le retour de celui qui déclencha les passions lors de ses premiers pas théâtraux, Emmanuel Meirieu. Son spectacle Mon traître a reçu un excellent accueil critique la saison dernière à Paris. Il est basé sur le roman éponyme de Sorj Chalandon, qui décrit le basculement d’un militant de l’Ira dans le camp ennemi avec une remarquable profondeur psychologique.
Une autre Lyonnaise, Véronique Bettencourt, reprendra Le Fantasme de l’échec, une analyse fine et drôle (basée sur de nombreux témoignages) des déconvenues artistiques.
Tout aussi déconcertant s’annonce Elle brûle, spectacle écrit par Mariette Navarro, qui s’empare de la figure d’Emma Bovary d’une façon inattendue.
Visuel et burlesque
Enfin, comme nous l’annoncions en préambule, le cirque aura une place importante cette saison, surtout s’il se mélange avec l’art du burlesque. En témoigne Quien soy ?, un duo d’acrobates voltigeurs venu de Colombie qui se penche de façon aérienne et drôle sur notre place dans un monde perpétuellement en mouvement. Et Pan-pot, pièce singulière de la compagnie lyonnaise Petit Travers, qui joue sur les déplacements de différents sons dans la salle, accompagnés par des balles savamment lancées. Une sorte de nouvelle écriture musicale…
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