Une "intimidation scandaleuse des élus de la République", selon le député Philippe Meunier (UMP), qui s'apprête à saisir le Premier Ministre de cette affaire.
Jean-Michel Aulas a finalement saisi ses avocats, franchissant ainsi un pas supplémentaire dans sa tentative de museler ceux qui émettent des réserves sur son projet de Grand Stade. Michel Forissier, secrétaire départemental de l'UMP et maire de Meyzieu, a ainsi reçu un courrier de l'avocat Yvan Guillotte et de son associé, l'ancien élu UDF André Soulier, le menaçant très clairement de l'attaquer pour atteinte à la transparence des marchés, en diffusant "des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives" d'une société cotée en bourse, OL Groupe. Un délit passible de deux ans de prison et de 1,5 millions d'euros d'amende.
Si le courrier n'annonce pas des poursuites pour l'instant, il menace : "La direction d'OL Groupe sera particulièrement vigilante à propos de toute nouvelle déclaration infondée qui serait de nature à agir sur les cours du titre et plus généralement à nuire à ses projets comme aux intérêts de ses actionnaires".
Fuites sur l'agrandissement de Gerland : Aulas veut des noms !
Qu'est-ce qui explique la colère d'Aulas ? Il reproche à Forissier d'avoir déclaré publiquement que son projet de grand stade était "bloqué", en précisant dans Lyon Capitale il y a quinze jours : "Je ne vois pas comment on peut concilier l'inconciliable". Forissier estime en effet que l'OL n'obtiendra pas son permis de construire, car le club est incapable d'expliquer comment on pourrait amener 60 000 personnes à Décines les soirs de match, à moins de demander aux collectivités locales d'investir des centaines de millions d'euros dans des liaisons routières et un métro.
Forissier ajoute même que, selon des sources qu'il garde confidentielles pour les protéger, le Grand Lyon a relancé des études pour l'agrandissement de Gerland. Dans leur courrier, Soulier et Guillotte enjoignent Forissier "de communiquer ces sources au Président d'OL Groupe (...) aux fins de vérification, l'anonymat n'étant pas généralement une marque de courage".
Malgré ces menaces, Michel Forissier n'entend pas se laisser faire : "Je n'ai rien contre l'OL, au contraire, et je ne conteste pas le principe de faire un grand stade. Mais le site qui a été retenu n'est pas raisonnable, car il impliquerait des dépenses considérables pour les contribuables. Si Aulas me prouvait le contraire, je soutiendrai son projet ! Moi, on me convainc avec des arguments, pas avec des menaces".
Forissier prêt à attaquer Aulas
Le maire de Meyzieu devrait dans les prochains jours écrire à tous les élus de l'agglomération : "Je vais leur faire savoir qu'on n'a pas le droit d'être contre ce projet, qu'il n'y a pas de débat possible. Aulas veut qu'on chante : Tout va très bien, Madame la Marquise"! " explique-t-il. Forissier n'entend donc pas se laisser faire. Il prépare même une riposte judiciaire : "Mes avocats travaillent là-dessus. Si M. Aulas veut vraiment aller devant les tribunaux, on va y aller ! Les élus sont là pour protéger les faibles, pas pour être aux ordres des sociétés cotées. Au nom de quoi l'intérêt privé primerait sur l'intérêt général ?"
Le député du secteur, Philippe Meunier (UMP), ne décolère pas et entend voler au secours de son collègue Forissier : "Je vais écrire au Préfet et au Premier ministre cette semaine. Cette méthode qui relève de l'intimidation auprès des élus de la République est insupportable". Proche de Forissier, pour avoir été membre de son cabinet à la mairie de Meyzieu, le député tranche : "Si Aulas croit qu'on va se coucher, il nous connaît mal ! Il est hors de question que les élus de la République se fassent dicter leur conduite par des représentants du capital. On ne va pas se taire parce que ces messieurs ont de l'argent en bourse. Surtout quand le même Aulas demande de l'argent aux contribuables pour réaliser son projet !"
Le président de Carton Rouge, Franck Buron-Fosse, ne se dit pas impressionné non plus par Aulas : "C'est un requin, il est vraiment prêt à tout". Mais on n'a pas peur pour le moment ! Tant qu'on reste sérieux, il n'y a pas de souci. Nous aussi on a un avocat..."
Quand autant d'avocats commencent à se pencher sur le berceau d'un grand projet d'agglomération, ce n'est en général pas franchement un bon signe de ses chances d'aboutir dans un délai raisonnable. Face aux difficultés, Aulas a décidé de passer en force. Une méthode qui lui a souvent réussit dans le monde sportif. Qu'en sera-t-il dans le monde politique, où les exigences démocratiques sont tout de même un peu plus présentes que dans le football ? Première embûche sur son parcours : l'enquête publique sur la révision du Plan Local d'Urbanisme s'ouvre le 19 mai. Une étape incontournable pour son projet. Et tous les citoyens auront le droit d'exprimer leurs éventuelles réserves, sans qu'Aulas ne puisse leur enjoindre de se taire.
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